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BO84T3 - L’art de vivre et de mourir
3e causerie
Bombay, Inde
11 février 1984



0:41 May we continue with what we were talking about last time that we met here? We were talking about conflict, whether it is possible to live in this world without problems and conflict. We shall go on talking about that because for most of us, life, the daily living, is a series of struggles, conflicts, pain, and varieties of anxieties. And we were asking whether it is possible, living in this crazy world, to live a life in which every kind of problem and conflict doesn't exist. It may sound rather absurd, or even crazy, to think about such thing, to live without a single conflict. Pouvons-nous poursuivre ce que nous disions la fois dernière? Nous parlions du conflit et de la possibilité de vivre en ce monde sans problème ni conflit. Nous devons rester sur ce sujet car pour nous, en général, la vie au quotidien est une succession de luttes, de conflits, de chagrins, et de toutes sortes d'inquiétudes. Et nous nous demandions s'il est possible, dans ce monde détraqué, de vivre une existence où n'existe aucun type de problème ou de conflit. Cela peut sembler absurde, ou même délirant, d'envisager une chose pareille, de vivre sans le moindre conflit.
2:23 As we were saying the other day, the enquiry into this question requires considerable intelligence, considerable energy, application. Merely to discuss, or have a dialogue between you and the speaker verbally, theoretically, has very little meaning. So, if we could together this evening – in spite of the crows – could think together, go into this problem whether there is an art of living in which one can live in daily life – not in a theoretical world, in daily life – to live without, psychologically, inwardly, without all the turmoil, the pain of change, and the anxiety involved in that change, whether it is possible to live such a life. L'autre jour, nous disions qu'enquêter sur cette question requiert une intelligence considérable, une énergie considérable, de l'application. La discussion, le dialogue entre vous et l'orateur au niveau verbal et théorique, a très peu de sens. Donc, si nous pouvions ce soir, tous ensemble – en dépit des corneilles – penser ensemble, approfondir ce problème de savoir s'il existe un art de vivre qui nous fasse vivre au quotidien – pas dans un monde théorique, au quotidien – vivre intérieurement, psychologiquement, sans l'agitation, la douleur du changement, l'anxiété qu'entraîne ce changement – s'il est possible de vivre une telle existence.
4:17 To ask such a question may seem quite incredible because our life, from the moment we are born till we die, is a series of conflicts, struggles, ambition, trying to fulfil itself, and all the pain of existence, with sorrow, pleasure, and so on. So if we could go into this question, the art of living. In daily life. We have many arts : the art of painting, the art of making a marvellous shoe, first-class shoe, and the art of painting, the art of engineering, the art of communication – there are many, many arts. But for most of us, probably for the rest of the world too, we have never asked this question, the art of living. To find that out... – this is a terrible… Bombay is rather dirty country, it makes one's eyes water, I am not crying. It requires investigation, how to live. Because the art of living is the greatest art, and the most important art, greater than any other art, greater than the art of governments, the art of communication, in spite of all that, we have never enquired very deeply what is the art of living our daily life, which requires such subtlety, sensitivity, and a great deal of freedom. Because without freedom you cannot find out what is the art of living. The art of living isn't a method, a system, or ask another how to find the art of living, but requires considerable intellectual activity, and also a deep abiding honesty. Very few of us are honest. It is getting worse and worse in the world. We are not honest people. We say one thing, do another, we talk about philosophy, God, all the theories that the ancient Indians have invented, and we are rather good at all that kind of stuff, but the word, the description, the explanation, is not the deed, the action. And that's why there is a great deal of dishonesty. And to enquire into the art of living there must be a fundamental, unshakeable, immutable honesty. Honesty which is not corruptible, which doesn't adjust itself to environment, to demands, to various forms of challenges. It requires a great integrity to find out because we are dealing with a very, very complex problem. It isn't just easy to live a life which is perfectly orderly, without dissipating energy, without living in any kind of illusion or tradition. Tradition, however old, however modern, is merely carrying on the old pattern. And the old pattern cannot possibly adjust itself to the new. Cela peut sembler incroyable de poser une telle question, car notre vie, de la naissance à la mort, n'est qu'un chapelet de conflits, de luttes, d'ambitions, de tentatives de satisfaction personnelle, – toute la tristesse de l'existence, avec la souffrance, le plaisir, et tout le reste. Donc, si nous pouvions approfondir cette question, l'art de vivre – la vie de tous les jours. Il y a beaucoup d'arts, l'art de peindre, l'art de fabriquer une merveilleuse chaussure, de première qualité, l'art de peindre, l'art de l'ingénieur, l'art de la communication – il y a beaucoup d'arts. Mais la plupart d'entre nous, et peut-être aussi le reste du monde, n'avons jamais posé la question de l'art de vivre. Pour trouver cela... – c'est terrible, Bombay est un endroit plutôt sale, il fait larmoyer, je ne suis pas en train de pleurer – pour découvrir comment vivre, il faut chercher. Car l'art de vivre est l'art suprême, l'art qui importe le plus, supérieur à tout autre, plus grand que l'art de gouverner, l'art de communiquer, et malgré cela, nous ne sommes jamais allés bien loin dans l'enquête sur ce qu'est l'art de vivre notre vie de chaque jour, qui demande tant de subtilité, une telle sensibilité, et une grande dose de liberté. Sans liberté, vous ne pouvez saisir ce qu'est l'art de vivre. L'art de vivre n'est pas une méthode, un système, on ne demande pas à un autre ce qu'est l'art de vivre. Mais cela exige une forte activité intellectuelle et aussi une profonde et inaltérable honnêteté. Très peu d'entre nous sont honnêtes. Le monde va de mal en pis. Nous ne sommes pas des gens honnêtes. Nous disons une chose et en faisons une autre, nous parlons de philosophie, de Dieu, de toutes les théories inventées par les anciens Indiens – nous sommes plutôt bons à tous ces petits jeux – mais le mot, la description, l'explication, n'est pas la chose, n'est pas l'action. C'est pour cela que règne une telle malhonnêteté. Et pour enquêter sur l'art de vivre, il faut une honnêteté fondamentale, inébranlable, immuable. Une honnêteté qu'on ne peut corrompre, qui ne s'ajuste pas à l'environnement, aux exigences, aux diverses formes de provocation. Découvrir cela demande une grande intégrité, car nous traitons d'un problème extrêmement complexe. Ce n'est pas si facile de vivre une vie parfaitement ordonnée, sans dissipation d'énergie, sans vivre dans l'illusion, ou selon une tradition. La tradition, qu'elle soit ancienne ou moderne, n'est que la continuation du vieux modèle. Et le vieux modèle est incapable de s'adapter à ce qui est neuf.
10:53 So together, and we mean together, it is not that the speaker is saying something to which you agree or disagree, but together, exercising your intellect, your reason, your sanity, if you have sanity, and together, looking at this very complex problem. As we said the other day, this is not a lecture, this is not a lecture to give you information, facts, instruct you, to persuade you, to slightly, delicately, direct you in a particular direction. Not doing any kind of propaganda to inseminate a new set of ideas, it is not anything of that kind. That would be dishonourable on the part of the speaker when he says it is not that, and he means that. So you are exercising your own brain, your own sense of urgency, demand, to find out if there is a way of living which is totally orderly. So please, if you will, be serious for this evening. You may not be serious for the rest of the year, or the rest of the week, but at least for once in one's life to be totally earnest, to be completely honest with oneself. Then we can together go into this question : what is the art of living. Donc, ensemble – et nous insistons, ensemble, il n'y a pas un orateur qui expose une chose et vous qui êtes d'accord ou pas. Mais ensemble, exerçant votre intellect, votre raison, votre bon sens, si vous avez du bon sens. Ensemble, regardons ce problème très complexe. Nous l'avons dit l'autre jour, ceci n'est pas un cours, ce n'est pas un cours pour vous informer, vous montrer des faits, vous instruire, vous persuader, vous orienter un peu, avec subtilité, dans une certaine direction. Nous ne faisons aucune sorte de propagande pour diffuser un nouvel assortiment d'idées, rien de tout cela. Ce serait un déshonneur pour l'orateur. Quand il dit que ce n'est pas cela, il parle sérieusement. Donc, vous faites fonctionner votre cerveau, votre sentiment personnel d'exigence, d'urgence, pour découvrir s'il y a une façon de vivre qui soit intégralement en ordre. Donc, je vous en prie, soyez sérieux ce soir. Si vous n'êtes pas sérieux toute l'année, ou le reste de la semaine, au moins une seule fois dans votre vie, soyez totalement sérieux, totalement honnête avec vous-même. En ce cas, nous pouvons ensemble approfondir cette question : qu'est-ce que l'art de vivre.
14:11 How are we going to find out? The art. To put everything in its right place, not exaggerating one or the other, not giving one's instinct, one's urges in one direction, and neglecting totally the other. Not trying to fulfil in a particular direction, but together, you and the speaker, are going to find out – for ourselves, not that you will be told by the speaker, this is important to understand. Comment va-t-on le découvrir? L'art. Mettre chaque chose à sa juste place, ne pas donner plus d'importance à l'une qu'à l'autre, ne pas privilégier certains instincts, certains désirs et négliger tous les autres. Ne pas vouloir s'accomplir dans une direction donnée, mais ensemble, vous et l'orateur, nous allons découvrir – de nous-mêmes, sans y être incités par l'orateur, il faut comprendre ceci, c'est important.
15:22 I am sorry, the crows are having fun ! They are saying good night to each other. They will quieten down when it gets a little darker. Désolé, les corneilles prennent du bon temps ! Elles se souhaitent mutuellement bonne nuit. Elles vont se calmer à la tombée du jour.
15:46 So please, for this evening at least, see how important it is to find out a way of living in which conflict, problems don't exist. Because conflict and problems waste our energy. One has to find out why problems exist. There are mathematical problems, geographical problems, and so on – academic problems, we are not talking about those problems. We are talking about the problems of human beings. They are first human beings, afterwards they are scientists, engineers, businessmen – all the rest of it. First we are human beings. But when you give importance to other things you forget that you are a human being. So please, together, let's find out. Donc, je vous en prie, pour ce soir au moins, voyez à quel point il est important de découvrir une façon de vivre où n'existent ni conflits, ni problèmes. Car les conflits et les problèmes épuisent notre énergie. On doit trouver pourquoi les problèmes existent. Il y a les problèmes de mathématiques, de géographie, etc., les problèmes académiques, nous ne parlons pas de ces problèmes-là. Nous parlons des problèmes des êtres humains. Ce sont d'abord des êtres humains, et ensuite des savants, des ingénieurs, des hommes d'affaires et tout ce qui s'ensuit. Nous sommes d'abord des êtres humains. Mais, à trop mettre l'accent sur d'autres choses vous oubliez que vous êtes un être humain. Donc, je vous en prie, cherchons ensemble.
17:23 The art of living, doesn't it mean to lead a life, a daily life, with tremendous precision, accuracy of order. Order does not mean conformity, following a pattern set and adjusting yourself to that pattern. We will go into this slowly. Does it not mean to become fully conscious, aware of one's own disorder? Are we aware of that? Or do we think that is merely an environmental difficulty, but inwardly we are perfectly orderly. We are pointing out together that inwardly we live in disorder, in contradiction. That's a fact. Even the greatest saints – they are generally slightly neurotic – even the greatest saints live in disorder, because they are trying to become something all the time. The very becoming – you understand? I hope we are following each other. Becoming : I am this, I will become that. In that endeavour to change 'what is' to 'what should be', there is an interval, a gap, in which conflict takes place. And that conflict is the essence of disorder. Right? You have understood? Where there is division – different classes of people, races, religions, and in ourselves a contradiction, a division, 'I am this, I must become that', in that there is a division. That very division is the root of disorder. Because in that there is a contradiction – right? – I am this, I want to be orderly. When I say 'I want to be orderly' I recognise I am in confusion, so I attempt to bring about order, so I make a diagram, a sketch of what is order and then I try to follow that. We are saying, if you will kindly listen together, that that very fact is the cause of disorder. Right? Have you understood? Are we together in this a little bit, slightly? Not too much, but just enough. L'art de vivre, c'est, n'est-ce pas, vivre une vie quotidienne dans un ordre extrêmement précis et rigoureux. L'ordre ce n'est pas se conformer, suivre un modèle établi et s'adapter à ce modèle. Voyons cela tranquillement. Ne s'agit-il pas de devenir pleinement présent, totalement conscient de notre propre désordre? En sommes-nous conscients? Ou pensons-nous que les difficultés viennent de notre environnement, et qu'à l'intérieur de nous, tout est parfaitement en ordre ? Nous sommes en train de préciser – ensemble – qu'intérieurement nous vivons dans le désordre et la contradiction. C'est un fait. Même les plus grands saints – qui sont en général légèrement névrosés – même les grands saints vivent dans le désordre, car ils essaient en permanence de devenir quelque chose. Le fait même de devenir... Vous comprenez? J'espère que nous nous comprenons. 'Devenir' : je suis ceci, je vais devenir cela. Dans cet effort de changer 'ce qui est ' en 'ce qui doit être' existe un intervalle, un hiatus, où s'installe le conflit. Et ce conflit est l'essence du désordre. D'accord? Vous avez compris? Il y a division – différences de classe, de race, de religion, et en nous-mêmes aussi, une contradiction, une division : 'je suis ceci, je dois devenir cela' c'est une division. C'est cette division-là qui est la source du désordre. Car c'est en cela qu'est la contradiction – n'est-ce pas? – je suis ceci et je veux être en ordre. Dire 'je veux être en ordre' c'est admettre que je suis confus, donc je tente de mettre de l'ordre, donc je fabrique un schéma, un canevas de ce qu'est l'ordre après quoi j'essaie de m'y conformer. Nous disons – si vous voulez bien écouter tous ensemble – que c'est ce fait-là qui est la cause du désordre. N'est-ce pas? Avez-vous compris? Nous comprenons-nous un peu, un petit peu? Pas trop, mais juste assez.
21:42 So, where there is division in us psychologically, there must be conflict, and therefore disorder. Now, as long as there is disorder, trying to find order is still disorder. Right? You understand what I mean? I am confused, my life is in disorder, I am fragmented, broken up inside, and being confused, out of that confusion I create a pattern, an ideal, a scheme, and I say I am going to live according to that scheme. But the origin of that scheme is born out of my confusion. Right? Clear? So, what I have to understand is why am I confused, why am I disorderly. If I can understand that, then out of that comprehension, perception, order naturally comes without a single effort. That is, if I can find the causation of my confusion, then confusion doesn't exist, then there is order. I wonder if you see this. Are we together in this, a little bit? Are we? Good. When you say 'Yes, sir', do you really mean it? Or it is just verbal assertion – 'let's get on with it'. That is dishonesty ! If we don't see things clearly, don't say yes – say 'I don't see it' then we can together have a dialogue. But if you say yes, your concern is then : let's go on. Donc, cette division en nous, psychologiquement, crée fatalement du conflit, et par conséquent du désordre. Et, tant qu'il y a désordre, vouloir rechercher l'ordre est encore du désordre. D'accord? Vous comprenez ce que je veux dire? Je suis incohérent, ma vie est en désordre, Intérieurement, je suis partagé, morcelé, donc, à partir de cette confusion je me crée un modèle, un idéal, un projet, et je me dis, je vais vivre selon ce projet. Mais l'origine de ce projet, c'est mon incohérence. Bien? C'est clair? Donc, ce qu'il me faut comprendre c'est pourquoi je suis incohérent, pourquoi je ne suis pas en ordre. Si je peux comprendre ça, de cette compréhension, de cette perception va naître l'ordre, naturellement, sans le moindre effort. C'est-à-dire, si je trouve ce qui cause ma confusion, la confusion n'existe plus, et donc l'ordre est là. Je me demande si vous voyez ça. Nous comprenons-nous, un tout petit peu? Oui? Très bien. Vous dites 'oui, Monsieur', mais parlez-vous sérieusement? Ou c'est juste une façon de dire 'allez, on continue !'. Ça, c'est de la malhonnêteté ! Si ce n'est pas clair, ne dites pas 'oui', dites 'je ne vois pas' alors nous pouvons dialoguer tous les deux. Mais si vous dites 'oui' ce qui vous intéresse c'est 'allons, poursuivons !'
24:47 So please, look at it carefully. We have got a whole hour. And this awareness of confusion – not we should not be confused – but the very awareness of confusion brings about the cause of it, the causation. So what is the cause? Do you understand? If I am ill and I go to the doctor, and the doctor – if he is fairly good – says you are eating or doing certain things that upset your whole organism, so he says don't do this and don't do that. So I change, I eat properly. In the same way if we can find the cause, then the effect is changed. And if there is a change in the effect there is change in the cause. Do you understand? Are we together or you are asleep? Let's proceed. Je vous en prie, faites-y attention. Nous avons toute une heure devant nous. La prise de conscience de la confusion – qui n'est pas 'il ne faut pas être confus' – le seul fait de prendre conscience de la confusion dévoile sa cause, la relation cause-effet. Donc, quelle est la cause? Vous comprenez? Si je suis malade, je vais chez le docteur, et le docteur – s'il n'est pas trop mauvais – vous dit que ce que vous mangez ou bien ce que vous faites fait du tort à votre organisme, donc, dit-il, ne faites pas ceci et ne faites pas cela. Alors je change, et je mange ce qui convient. De la même façon, si nous pouvons détecter la cause, l'effet va être changé. Et s'il y a changement dans l'effet, il y aura changement dans la cause. Vous comprenez? Nous sommes ensemble ou vous dormez? Continuons.
26:32 So, order is only possible when we understand the nature of disorder. And the nature of disorder can be totally wiped out. If I am quarrelling with my wife, or the wife is quarrelling with me, I find out why we are quarrelling. If we like to quarrel, that's a different matter, but if want to stop quarrelling we say, 'Let's talk about it, let's see why we quarrel.' And then we find we are quarrelling about opinions, I want this and you want something different. And thereby we begin to communicate with each other and ultimately come to some point where we both of us agree. So similarly, together, to live a life, the art of living so that it is completely orderly. That is the art of living. Donc l'ordre n'est possible qu'en comprenant l'origine du désordre. Et l'origine du désordre peut être complètement effacée. Si je me dispute avec ma femme, ou si ma femme se dispute avec moi, je découvre pourquoi nous nous disputons. Si nous aimons cela, c'est une autre affaire, mais si nous voulons cesser de nous quereller, nous disons : 'il faut en parler, voyons la raison de ces disputes'. Et nous découvrons que c'est une querelle d'opinions, moi je veux ceci et vous voulez autre chose. De ce fait, nous commençons à communiquer et finalement nous arrivons à un point d'accord. Pareillement, ensemble, vivre une existence, un art de vivre, une existence complètement en ordre. C'est l'art de vivre.
28:06 Then, the art of living implies that there should be no fear. Right? Shall we go into it? Are you interested in it? We are saying that the art of living demands that there should be no fear at all – fear of psychological security, fear of death, fear of not becoming something, fear of losing, gaining – you know, the whole problem of fear. Shall we talk about it together? Whether it is possible to be free completely of fear, because a brain that is frightened, a brain that is frightened is a dull mind, a mind that is not capable of observing, living. Aren't you all frightened? Be a little honest with it. We are all frightened, inwardly. We will first examine the inner, then we'll look at the outer, not the other way round. You understand? We all want physical security, that's what everybody demands – money, position, safety, security physically. But we never enquire into the security, certainty, inwardly. Because the inward activity shapes the outer, controls the outer. Right? You understand it? Ensuite, l'art de vivre implique qu'il n'y ait pas de peur. Non? Faut-il développer? Cela vous intéresse? Nous disons que l'art de vivre exige l'absence totale de toute peur – peur pour sa sécurité psychologique, peur de la mort, peur de ne pas devenir quelqu'un, peur de perdre, peur de gagner – tout le problème de la peur. Voulez-vous en discuter, ensemble? Voir s'il est possible d'être complètement libéré de la peur, parce qu'un cerveau qui a peur, un cerveau qui a peur est un esprit paralysé, un esprit incapable d'observer, de vivre. N'êtes-vous pas tous effrayés? Soyez un peu honnêtes. Nous avons tous peur, à l'intérieur. Examinons d'abord l'intérieur nous verrons l'extérieur ensuite et pas le contraire. Vous comprenez? Nous voulons tous être en sécurité physiquement, chacun l'exige – de l'argent, une situation, être à l'abri, la sécurité physique. Mais nous ne remettons jamais en question la sécurité, la certitude intérieures. Car l'activité intérieure modèle l'extérieur, contrôle l'extérieur. Oui? Vous comprenez?
30:56 So, we are asking, the art of living consists not only having complete order, but also to be totally, psychologically, inwardly free of fear. Is that possible? Because we have lived with fear from childhood. Fear of the husband, fear of the wife, fear of not achieving, fear of not fulfilling, fear of not being satisfied – you know the nature of fear, I am sure, all of you. So, we are asking what is the nature and the structure of fear. Ask yourself the question first. What is fear, how does it arise, what is the cause of it, the root cause of it? I may be afraid of darkness, I may be afraid of public opinion, I may be afraid of somebody who is going to beat me up. There are various forms of fear. So shall we deal with the various forms one by one – your particular fear, her particular fear, or my particular fear – or shall we go together and find out the root of it, the cause of it? Right? Which do you want? The various branches of fear, or the very hidden root, hidden nature of fear? You understand? What is the root of fear? The speaker is asking you this question, and if you will kindly be honest this evening – you can be dishonest afterwards, that's your nature, that's what you want – but for this evening find out for yourself what is the root of it, what brings all this fear about. Because fear is most destructive. In it, one lives in an enclosed... a sense of physical nervous tension, feeling small, frightened, you know, the feeling of fear, and where there is fear every kind of neurotic action takes place, irrational, pretending to be rational. So it is important to find out for yourself what is the root of it. Or are there many roots of it, or only one single root? Probably you have not thought about this, you are too busy earning money, you are too busy worrying about your states, you haven't probably ever given thought or enquiry to find out if you can live without fear. Donc, nous disons : l'art de vivre, c'est être complètement en ordre, mais c'est aussi être psychologiquement, intérieurement, totalement affranchi de la peur. Est-ce possible? Parce que, depuis l'enfance, nous vivons dans la peur. Peur du mari, peur de la femme, peur de ne pas y arriver, peur de ne pas s'épanouir, peur de ne pas être satisfait – je suis sûr que vous savez tous ce qu'est la peur. Et nous interrogeons la substance et la constitution de la peur. D'abord, posez-vous la question à vous-mêmes. Qu'est-ce que la peur, comment elle surgit, pour quelle raison, quelle raison fondamentale? J'ai peut-être peur du noir, peur de l'opinion publique, peur de quelqu'un qui s'apprête à me frapper. Il y a bien des formes de peur. Alors, faut-il prendre chacune de ces formes une par une – votre peur particulière, sa peur particulière, ma peur particulière – ou chercher ensemble la raison d'être, l'origine? D'accord? Lequel voulez-vous? Les diverses branches de la peur, ou la racine bien cachée, la nature cachée de la peur? Vous comprenez? Quelle est la racine de la peur? L'orateur vous pose la question et, si vous voulez bien être honnête ce soir – vous pourrez toujours être malhonnête plus tard, c'est votre nature, c'est cela que vous voulez – mais, pour ce soir, découvrez vous-mêmes quelle est la racine, qu'est-ce qui produit toute cette peur. Parce que la peur est ce qu'il y a de plus destructeur. A cause d'elle, on vit dans un enfermement... une sensation physique de tension nerveuse, on se sent tout petit, effrayé, vous savez, avoir peur, et à la peur se mêlent toutes sortes d'actes névrotiques, irrationnels, mais qui prétendent être rationnels. C'est pourquoi il importe que vous découvriez quelle est sa racine. A-t-elle plusieurs racines, ou bien une racine unique? Vous n'y avez probablement jamais pensé, vous êtes trop occupés à gagner de l'argent, vous êtes trop occupés à vous tracasser à propos de vos États, vous n'y avez probablement jamais pensé, jamais cherché à découvrir s'il est possible de vivre sans la peur.
35:51 Change from 'what is' to 'what should be' is one of the causes of fear. I may not ever arrive there, so I am frightened of that too. I am also frightened of what is going on. I am also frightened of the past. Right? So we are trying together – not accepting what the speaker is saying – to find out. That requires honesty, scepticism, not accepting a thing that the speaker is saying, but to see for ourselves the essence and the structure of fear. Right? What is fear? Not what we are afraid about. I am afraid about death – suppose – because I am getting old and I am getting frightened. We are not asking what you are afraid of, but what is fear 'per se', in itself. You understand? Are you getting tired? All right. So what is fear itself? How does it come about? We will go together into the investigation of it, but you must together share it, not verbally accept it. Then if you verbally accept it, theoretically or intellectually, at the end of it you are still frightened. And that's a waste of time, your time and the speaker's time. But if you and the speaker can walk together, journey together into the whole nature of fear, and you yourself capture the truth of the cause of fear, then you are free. Unless you want to be frightened for the rest of your life – you may like it, because people do love some kind of fear because that makes them feel at least they have something to hold on to. Changer 'ce qui est' en 'ce qui devrait être' est l'une des causes de la peur. Je pourrais ne jamais y arriver, donc j'ai peur de ça aussi. Mais j'ai aussi peur de ce qui se passe maintenant. Et j'ai aussi peur du passé, n'est-ce pas? Alors, nous essayons ensemble – sans accepter ce que dit l'orateur – nous essayons de découvrir. Cela demande de l'honnêteté, du scepticisme, de ne rien accepter de ce que dit l'orateur, mais de découvrir nous-mêmes l'essence et la structure de la peur. D'accord? Qu'est-ce que la peur? Pas ce dont nous avons peur. Supposons que j'aie peur de la mort, parce que je vieillis et je commence à avoir peur. La question n'est pas ce dont vous avez peur mais ce qu'est la peur 'per se', la peur en soi. Vous comprenez? Êtes-vous fatigués? Très bien. Donc, qu'est-ce que la peur elle-même? Comment se produit-elle? Nous allons enquêter ensemble, mais vous devez partager, pas vous contenter d'explication verbale. Si l'explication verbale, la théorie, l'intellectuel vous suffit, à la fin, vous aurez encore peur. Et c'est perdre son temps, votre temps et celui de l'orateur. Mais si vous et moi, l'orateur pouvons marcher ensemble, faire ensemble le voyage au pays de la peur, et si vous saisissez vous-même la vraie cause de la peur, alors vous êtes libre ! Sauf si vous voulez avoir peur pour le restant de vos jours – on peut aimer cela, les gens aiment un certain type de peur qui leur donne la sensation qu'ils ont au moins quelque chose à quoi s'accrocher.
39:10 What is the past? Please listen, we are talking about fear. What is the past, what is the present, and what is the future? The past is all that you have accumulated as memory, the remembrance of things gone, and the present is the past, modifying itself to the future. Right? This is the actual fact. So you are the past memories, past remembrances, past accidents, the whole accumulation of the past. You are that. You are the bundle of memories. That's a fact. If you had no memories you don't exist. So you are that. The past – please listen – is time, isn't it? The past has been gathered through time. I have had an experience, a week ago, that experience has left a memory, and that memory is born from the past experience, which is, when I use the word 'past', it's already time. Right? Agreed? So it is time. The past is time. And also the past is memory, knowledge, experience. Right, sirs? The past is experience, knowledge, stored in the brain as memory, and from memory thought arises. This is a fact. So time, which is the past, and also memory, which is the past, so time and thought are the same, they are not separate. Are you understanding this? Are we together? A little bit? Qu'est-ce que le passé? S'il vous plaît, écoutez, nous parlons de la peur. Que sont le passé, le présent et le futur? Le passé est tout ce que vous avez entassé comme mémoire, les souvenirs de choses disparues, et le présent est le passé, qui se métamorphose en futur. D'accord? C'est le fait réel. Donc vous êtes la mémoire du passé, les souvenirs du passé, les accidents du passé, toute l'accumulation du passé, vous êtes cela. Vous êtes le baluchon des souvenirs. C'est un fait. Si vous n'aviez aucun souvenir, vous n'existeriez pas. Donc, vous êtes cela. Le passé – écoutez bien – c'est le temps, n'est-ce pas? Le passé s'est amoncelé au fil du temps. J'ai fait une expérience la semaine dernière, cette expérience a laissé une trace dans la mémoire, cette mémoire est née de l'expérience passée, et quand je dis 'passé', c'est déjà du temps. Bien? D'accord? C'est le temps. Le passé c'est le temps. Le passé est aussi la mémoire, le savoir, l'expérience. N'est-ce pas, Messieurs? Le passé c'est l'expérience, les connaissances stockées dans le cerveau sous forme de mémoire, et de cette mémoire surgit la pensée. C'est un fait. Donc le temps c'est le passé, la mémoire aussi, c'est le passé. Donc le temps et la pensée sont la même chose, ils ne sont pas séparés. Non? Vous comprenez cela? Nous sommes ensemble? Un petit peu?
42:31 So, we are asking, fear is both time and thought. I did something a week ago, which caused fear, I remember that fear, and I want to prevent that happening again. So there is the past incident which caused fear, and it is recorded in the brain as memory. That recording is time. Right? This speech, this talk, is being recorded, this recording is time, between the word and the thing, that is time. I hope you understand all this. And thought is also time, because thought comes into being through memory, through knowledge, through experience, so thought and time are similar, together they are not separate. Right? And we are asking, is that the root of fear? Time and thought, time-thought? That is, I am afraid of death. Right? I am still young, old, whatever, I am healthy, but death is waiting for me, and I am afraid of death. That is, I have put it away from me, but I am still afraid of that. Aren't you all afraid of death? Yes? No? You must be strange people if you are not afraid of death. Donc, nous disons : la peur est à la fois le temps et la pensée. La semaine dernière, j'ai fait une chose qui m'a fait peur, je me souviens de cette peur et je veux empêcher qu'elle recommence. Donc il y a l'incident passé qui a causé de la peur, et il est enregistré dans le cerveau en tant que mémoire. Cet enregistrement, c'est le temps, non? Cette causerie est enregistrée, cet enregistrement c'est du temps, entre le mot et la chose, il y a du temps. J'espère que vous comprenez tout cela. Et la pensée aussi c'est du temps, puisque la pensée naît de la mémoire, du savoir, de l'expérience, donc pensée et temps sont similaires, ils vont ensemble, ils ne sont pas indépendants. D'accord? Et nous demandons : est-ce là la racine de la peur? Le temps et la pensée, le temps-pensée. Voyons, j'ai peur de la mort, n'est-ce pas? Je suis encore jeune, ou vieux et en bonne santé, mais la mort m'attend, et j'ai peur de la mort. En fait, je l'ai tenue le plus loin possible de moi mais j'en ai quand même peur. N'avez-vous pas tous peur de la mort? Oui? Non? Vous êtes des gens bien bizarres si vous n'avez pas peur de la mort.
45:10 So, fear, the root of fear, is thought-time. Don't say 'How am I to stop time and thought?' If you say 'how' then you demand a system, a method, then you will practise that method which means time. Right? So you are back again in the same old pattern. Have you understood? But if you understand, grasp, have an insight into the nature of fear and the causation of fear, which is thought and time, if you really grasp that, then hold it, don't run away from it ! Look... I don't know why I should explain all these things, they are all so simple. But you are all very complicated people, too intellectual, too learned, too experienced, you can never meet anything simply. We'll go into it. Donc la peur, la racine de la peur, est la pensée-temps. Ne dites pas 'comment puis-je stopper le temps et la pensée?' Demander 'comment' c'est vouloir un système, une méthode, et mettre cette méthode en pratique, cela suppose du temps. D'accord? Vous voilà retombé dans le même vieux schéma. Vous avez compris? Mais si vous comprenez, saisissez, percevez immédiatement la nature de la peur et sa cause, qui est la pensée, le temps. Si vous réalisez vraiment cela, alors ne le lâchez plus, ne vous en évadez pas ! Écoutez... Je ne vois pas pourquoi il me faut expliquer toutes ces choses, elles sont toutes tellement simples. Mais vous êtes tous très compliqués, trop intellectuels, trop instruits, trop expérimentés, vous n'abordez jamais rien simplement. Reprenons.
46:53 Fear arises from something that has happened before. I have had a toothache, go to the dentist, he heals it, but it has been recorded, the pain has been recorded. Where there is a recording there must be the memory and saying 'I hope it will not happen again tomorrow.' So, the pain of yesterday is recorded, then the memory, which is the recording, says, 'I hope I won't have it' – the whole process of that is fear. Right? If you understand the principle of it, the fundamental nature of fear, then you can deal with it, but if you are escaping from fear, trying to rationalise it, trying to say, 'How am I, tell me, help me to escape from it', then at the end of it, as you are, for the rest of your life you are frightened. Right? La peur surgit d'un élément qui est arrivé avant. J'ai eu mal aux dents, le dentiste m'a soigné, mais cela a été enregistré, la douleur a été enregistrée. Dès qu'il y a enregistrement, la mémoire intervient : 'j'espère que cela ne va pas recommencer demain'. Donc, la douleur d'hier est mise en mémoire, et le souvenir, l'enregistrement me dit : 'j'espère ne plus l'avoir' – l'ensemble de ce processus est la peur. Bien? Si vous comprenez ce principe – le fondement de la peur – vous saurez comment vous y prendre. Mais si vous vous en évadez, si vous rationalisez, si vous demandez quoi faire, comment y échapper, au bout du compte – c'est ce qui vous arrive – vous avez peur votre vie durant, n'est-ce pas?
48:24 So the root of fear is time-thought. If you understand that – see the beauty of it, the subtlety of it. And the other thing is : people are afraid – as you are – most human beings throughout the world are afraid of death. That's one of the fundamental fears of life. And we all know death is for everybody, for you and the speaker. That's an absolute certainty. Right? You can't escape from that. You might live longer by not wasting your energy, by leading a simple, sane, rational life, but however way you live, death is inevitable. Would you accept that? Not accept – it is a fact. Would you face that fact? You are going to die ! So is the speaker. You – who are you? Who are you, sirs and ladies – who are you? Your money, your position, your capacity, your dishonesty, your confusion, your anxiety, your loneliness, your bank account – you are all that, aren't you? Be simple and honest. It is so ! Donc, la racine de la peur c'est le temps-pensée. Comprendre cela – en voir la beauté, la subtilité. Il y a autre chose : les gens ont peur – tout comme vous, presque tous les humains sur la terre ont peur de la mort. C'est l'une des peurs fondamentales de la vie. Et nous savons tous que la mort est pour tout le monde, pour vous et pour l'orateur. C'est une certitude absolue, d'accord? Vous n'y échapperez pas. On peut vivre plus longtemps en préservant son énergie, en vivant une vie simple, saine et raisonnée, mais quoi qu'il en soit, la mort est inévitable. N'est-ce pas? Vous l'acceptez? Pas l'accepter – c'est un fait. Allez-vous regarder ce fait en face? Vous allez mourir ! L'orateur aussi. Vous – qui êtes-vous? Mesdames et Messieurs, qui êtes-vous? Votre argent, votre situation, vos aptitudes, votre malhonnêteté, vos incohérences, vos inquiétudes, votre solitude, votre compte en banque – vous êtes tout cela, n'est-il pas vrai? Simplement et honnêtement, c'est comme ça !
51:01 And we are asking, what is the art of living when we are going to die? It is there, whether you like it or not. What is the art of living so that one is not afraid of death? You understand? Let's go into it. Let's go into it, not verbally, not intellectually, not theoretically, but actually, so that you know what death means. We are not advocating suicide. There are certain philosophers, the existentialists and others, who say life is a perpetual going up the hill and coming down the hill, pushing up the hill, and after you reach a certain height, coming down. And life, such a life has no meaning, therefore commit suicide. Do you understand? We are not saying that is the way to live, that's not the art of living. But we are asking ourselves, why are we afraid of death. Whether we are young, old, and so on, why is there this torment of which we are so... – it may be conscious or unconscious. And the fear of death is also suffering. Right? Suffering in leaving my family, suffering – you know, all the things I have accumulated, and I am leaving all that. So, the art of living is not only to find out how to live our daily life, but also to find out what the significance of death is, while living. Right? Et la question est : qu'est-ce que l'art de vivre alors que nous allons mourir? Que cela vous plaise ou non, c'est là. Quel est l'art de vivre pour que l'on n'ait plus peur de la mort? Vous comprenez? Voyons cela. Voyons-le sans le mot, sans le concept, sans la théorie – la réalité, pour que vous sachiez ce que signifie la mort. Nous ne prêchons pas le suicide. Certains philosophes, existentialistes et autres, disent que la vie c'est monter et descendre sans cesse, se hisser vers le haut pour retomber ensuite. Et une telle vie n'a aucun sens, donc, suicidez-vous. Vous comprenez? Nous ne disons pas qu'il faut vivre ainsi, ce n'est pas cela, l'art de vivre. Nous nous demandons pourquoi nous avons peur de la mort. Qu'on soit jeune ou vieux, pourquoi ce tourment conscient ou inconscient? La peur de la mort est aussi une souffrance, non? Je souffre de laisser ma famille, je souffre de laisser tous les objets que j'ai amassés, d'abandonner tout cela. L'art de vivre c'est trouver comment vivre au quotidien, mais aussi découvrir quel est le sens de la mort pendant que je suis en vie. Bien?
54:03 What is death? There is the biological, organic ending through disease, through old age, through accident, through some misfortune – I go down the street, a brick may fall on me by chance and I am killed. So what do we mean by dying? If we can understand that then life and death can live together. You understand? Not death at the end of one's whole… when the organism ends, but to live together, to live with death and life. Have you ever asked this question? Probably not. You ask that question. Put it to yourself, this question whether it is possible to live – which is the art of living – living, and living with death. Then to find that out you must find out what is living. Right? Which is more important, dying or living? Before or after? You understand my question? Most people are concerned with after, whether there is reincarnation, all that kind of stuff. But they never ask, which is more important, the living, which is an art... If there is right living, perhaps death is also part of right living, – you understand – not at the end of one's stupid life ! Qu'est-ce que la mort? Il y a mort biologique, organique, pour cause de maladie, d'âge avancé, d'accident ou de quelque mésaventure – je descend la rue, une brique tombe par hasard sur moi, et je meurs. Qu'entendons-nous par mourir? Si vous comprenez vraiment cela, alors la vie et la mort peuvent coexister. Vous saisissez? Non pas la mort au bout de à l'arrêt de l'organisme, mais de vivre à la fois, vivre à la fois la mort et la vie. Vous êtes-vous jamais posé cette question? Probablement pas. Posez-la, cette question. Posez-la à vous-même. Savoir si l'on peut vivre – c'est ça l'art de vivre – vivre avec la mort. Pour le découvrir, il vous faut découvrir ce qu'est vivre, non? Qu'est le plus important, mourir ou vivre? Avant ou après? Vous comprenez ma question? En général, les gens se préoccupent de l'après, de savoir s'il existe une réincarnation, et toutes ces histoires. Mais ils ne demandent jamais qu'est-ce qui importe le plus, vivre, qui est un art... Si on mène une vie juste, peut-être la mort aussi fait-elle partie de cette vie juste, vous comprenez, pas à la fin d'une vie stupide !
56:38 So one must enquire first, what is living. You answer it, sir. We will discuss it, have a dialogue about it, but you have to answer that question for yourself. Which means, what is your life? What's your daily life, which is what your life is, a long series of daily lives. What are those long series of lives? Pain, anxiety, insecurity, uncertainty. Right? Some kind of illusory devotion to some entity which you have invented, some kind of fanciful, illusory existence, a make-believe life, having faith, having belief – all that is what you are. Right? You are attached to your house, to your money, to your bank, to your wife, children. Right? You are attached, hold, right? This is your life. Would you contradict that? Would you contradict that? The description, which the speaker has pointed out, that you live a constant struggle, constant effort, comfort, pain, loneliness, sorrow – that's your life. And you are afraid to let that go. And death says, 'My friend, you can't take it with you. You can't take your money, your family, your knowledge, your beliefs.' Death says you have to leave all that behind. Right? Would you agree to that? Or do you deny that? Face it, sirs. Donc il faut commencer par voir ce qu'est vivre. c'est vous qui répondez, Monsieur, nous allons en débattre, dialoguer, mais vous devez trouver la réponse tout seul. En fait, qu'est-ce que votre vie? Votre vie de tous les jours, c'est cela votre vie, une longue suite de vies quotidiennes. Qu'est donc cette longue suite de vies? La douleur, l'anxiété, l'insécurité, l'incertitude, n'est-ce pas? Une sorte de dévotion illusoire à une entité que vous avez inventée, un genre d'existence chimérique, une vie de faux-semblant, avec la croyance, la foi – tout cela, c'est ce que vous êtes. Vous êtes attaché à votre maison, à votre argent, à votre banque, à votre femme, à vos enfants, n'est-ce pas? Vous êtes attaché, tenu, non? Voilà votre vie. Vous le contestez? Contestez- vous cela? La description que l'orateur vient de faire, votre vie faite de lutte constante, d'effort permanent, de réconfort, de chagrin, de solitude, de souffrance – voilà votre vie. Et vous avez peur de lâcher ça. Et la mort dit : 'Cher ami, impossible de ne rien prendre, pas question d'emporter votre argent, la famille, le savoir, les croyances. il faut tout laisser derrière', dit la mort. Bien? Vous êtes d'accord? Où vous le contestez? Voyez-le en face, Messieurs.
59:23 So, the art of living is – need I answer it? You see, you are waiting for me to answer it. Look sir, I am attached to my wife, or to a certain conclusion, I am tremendously attached to it. Now, death says to me, 'You can't. When I'll come you'll have to let go.' Now, is it possible for me, living, to let go? Yes, sir ! Will you? Will you let go? Absolute silence. I am attached to my furniture, I have polished it, I have looked after it, it's an old piece of furniture, I won't give it away, it's mine. I have lived with it for years, eighty years. It's part of me. When I am attached to that piece of furniture, that furniture is me. I know you laugh, but you won't let that furniture go. So death says to you, 'My friend, you can't take that desk with you.' So can you be totally free, totally free of that attachment to that piece of furniture? You live with that furniture, but totally free of attachment to that. That is death. You understand? So that you are living, living and dying all the time. Oh, you don't see the beauty of it ! You don't see the freedom that it gives you the energy, the capacity. Where you are attached there is fear, there is anxiety, uncertainty. Uncertainty, fear, causes sorrow. Donc, l'art de vivre, c'est – faut-il donner la réponse? Vous voyez, vous attendez que je réponde. Regardez, Monsieur, je suis attaché à ma femme, ou à une conclusion quelconque, j'y suis formidablement attaché. Alors, la mort me dit : 'quand je viendrai, vous devrez tout lâcher'. Alors, est-ce que je peux tout lâcher tout en vivant? Oui, Monsieur ! Le ferez-vous? Allez-vous tout lâcher? Silence total. Je suis attaché à mon meuble, je l'ai ciré, j'en ai pris grand soin, c'est un meuble ancien, je ne vais pas le donner, il est à moi. J'ai vécu avec lui quatre-vingts ans, il fait partie de moi. Si je suis attaché à ce meuble, ce meuble c'est moi. Je sais, vous riez, mais vous n'allez quand même pas lâcher ce meuble. Donc la mort vous dit : 'Cher ami, pas question de prendre ce bureau avec vous'. Donc, pouvez-vous vous libérer complètement, être totalement dégagé de l'attachement à ce meuble? Vous vivez avec ce meuble, mais en n'y étant absolument plus attaché. C'est cela la mort, vous comprenez? Ainsi, vous vivez en vivant et mourant sans arrêt. Oh, vous n'en voyez pas la beauté ! Vous ne voyez pas la liberté que cela donne, l'énergie, la capacité. Là où vous êtes attaché, il y a de la peur, de l'anxiété, de l'incertitude. L'incertitude, la peur causent la souffrance.
1:02:49 And to go into the question of sorrow – that's part of life. Everyone on earth has suffered, has shed tears. Haven't you shed tears? Your husband doesn't care for you, he uses you and you use him. And you suddenly realise how ugly that is, and you suffer. Man has killed man throughout history in the name of religion, in the name of God, in the name of nationality… Right? So man has suffered immensely. And they have never been able to solve that problem, never suffer. Because where there is suffering there is no love. In suffering there is not only self-pity, there is also fear of loneliness, of separation, of division, a remorse, guilt – all that is contained in that word. And we have never solved this problem. We put up with it, we shed tears and carry the memory of the son, or the brother, or the wife, or the husband for the rest of your life. Is there an end to sorrow? Or must man forever and ever carry this burden? To find that out is also the art of living. The art of living is to have no fear. And also the art of living is to have no sorrow. So to enquire into that complex problem, why man not only has been inhuman but also cruel to other people, brutal, violent, killing by the millions, thousands. And how many people have shed tears over their sons, or their husbands, or their relations, and so on? And we are still carrying on the same old rotten, filthy, brutal game, killing each other. Et, si nous parlons de la souffrance – elle fait partie de la vie. Chacun sur terre a souffert, a versé des larmes. N'avez-vous pas versé des larmes? Votre mari ne vous aime pas, il vous utilise et vous l'utilisez. Et soudain vous réalisez comme tout cela est laid, et vous souffrez. L'homme a tué l'homme tout au long de l'Histoire, au nom de la religion, au nom de Dieu, au nom du nationalisme... non? Donc les hommes ont immensément souffert. Et ils n'ont jamais été capables de résoudre ce problème, de ne plus jamais souffrir. Car quand il y a souffrance il n'y a pas d'amour. Dans la souffrance, il y a de l'apitoiement sur soi, mais aussi la peur de la solitude, de la séparation, de la division, du remords, de la culpabilité, il y a tout cela dans ce mot. Et nous n'avons jamais résolu ce problème. Nous le supportons, nous versons des larmes, nous gardons la mémoire du fils, du frère, de l'épouse, du mari pour le restant de nos jours. Y a-t-il une fin à la souffrance? Ou l'homme doit-il porter ce fardeau à perpétuité? Découvrir cela fait aussi partie de l'art de vivre. L'art de vivre est de n'avoir aucune peur. Et l'art de vivre c'est aussi de n'avoir aucune souffrance. Donc il faut examiner ce problème complexe, pourquoi l'homme s'est-il montré non seulement inhumain mais aussi cruel envers les autres, brutal, violent, tuant par milliers, par millions. Combien de personnes ont versé des larmes sur leurs fils, leurs maris, leurs relations, etc.? Et pourtant nous continuons à jouer à ce bon vieux jeu, ce jeu pourri, dégoûtant, brutal : nous entretuer.
1:07:04 You are going to have, I believe I saw as we came down, a naval show here. Right? Yes, sir. And you are very proud of your army, and your navy, and all that rot ! And every country is proud of its own military instruments to kill thousands of people. And you agree that we should not, and you carry on the next day, never enquiring whether you can stop in yourself violence, why wars exist. Do you realise, sirs, there have been wars for six thousand years – man killing man. The filthiness, the ugliness of it all. And you don't mind. It is happening far away somewhere, and you don't mind. But you are preparing for it too. Je crois qu'il va y avoir ici – je l'ai vu en venant – une parade navale. Est-ce exact? Oui, Monsieur. Vous êtes très fier de votre armée, de votre marine, toutes ces foutaises! Chaque pays est fier de son arsenal militaire, fait pour tuer des gens par milliers. Vous êtes bien d'accord qu'il ne faut pas, et vous continuez le lendemain, vous n'examinez jamais comment stopper la violence en vous-mêmes, et pourquoi les guerres existent. Réalisez-vous qu'il y a des guerres depuis six mille ans, – l'homme tuant l'homme. L'abjection, la laideur de tout cela. Et cela ne vous fait rien. Cela se passe quelque part très loin et cela ne vous fait rien. Mais vous vous y préparez, vous aussi.
1:08:51 So that is one of the problems of life, whether it is possible to live without sorrow. What is sorrow? Why, when my son dies – my son, not yours, that's your affair – when my son dies something has broken in me, especially if I am a woman. I have born him in my womb, give birth, and I have nursed him, looked after him, and the pain of all that and the pleasure, the joy of the mother, and then he ends up being killed – for your country. Your honour demands that he'll be killed. You understand all this, don't you? Why do you allow it? Donc, c'est l'un des problèmes de la vie, est-il possible de vivre sans souffrance. Qu'est la souffrance? Pourquoi, quand mon fils meurt – pas le vôtre, Monsieur cela vous est personnel – quand mon fils meurt, quelque chose s'est brisé en moi, surtout si je suis une femme. Je l'ai porté en mon sein, je l'ai mis au monde, je l'ai nourri, je m'en suis occupée, avec les peines et les plaisirs, les joies d'une mère, et finalement il se fait tuer – pour votre pays. Votre honneur commande qu'il soit tué. Vous comprenez tout ceci n'est-ce pas? Alors pourquoi le permettez-vous?
1:10:35 So what is sorrow? Is it that my son, – gone, can never return, though I think we'll meet next life, or in heaven, or in hell – he is gone, that's a fact. But I carry the memory, I keep his picture round my heart. I live on that memory, shedding tears. I can't forget. It is part of my burden. Don't you know all this? Or is the speaker saying something irrelevant? And you have never asked why we suffer. And we have never enquired into sorrow, into suffering, and asked whether it can ever end, not at the end of one's life, but now, today. If you begin to enquire into it – as we are doing now I hope – what is the cause? Is it self-pity? Is it that he was young, fresh, alive – and gone? Is it that I am attached to him? Face all this, sirs ! Is it I am attached to him? And that attachment, what is that attachment? To whom am I attached? To my son? What do I mean by my son? – be rational, logical – what is my son? I have a picture of him, I have an image of him, I want him to be something. Right? I want him to be something, and he is my son. And I am attached desperately because he will carry on my business, he will be better at getting more money. You know, you are all playing this game, you know it very well. And that's one side. And also I have a certain affection for him. We won't call it love, but we'll call it a certain kind of affection. If you loved your son you would have a different kind of education, a different kind of upbringing, not just follow your footsteps. He is the new generation, and a new generation may be totally different from yours, I hope he is. I want him to be a new generation, of a different type of person than me. Not follow what I have been doing – engineer, businessman, and all that business. But I want him to inherit my money, my possessions, my house – you know the game you are all playing. And when he dies everything is broken. That is, my picture of him, my wanting him to be this and that, that just comes to an end, and I am shocked. And I turn to my nephew, my niece, to someone to carry on the same pattern, because I have lots of money or a single room. Don't you know all this? How cruel all this is. And this is one of the causes of great sorrow. Donc, qu'est la souffrance? Est-ce que mon fils – il est mort, il ne reviendra jamais, même si je pense le revoir dans une autre vie, au paradis, ou en enfer – il est mort, c'est un fait. Mais je porte sa mémoire, je garde sa photo près de mon coeur. Je vis dans sa mémoire, je verse des larmes. Je ne peux pas oublier. Il fait partie de mon fardeau. Ne connaissez-vous pas tout cela? Ou ce que dit l'orateur est-il sans objet? Et vous n'avez jamais demandé pourquoi nous souffrons. Nous n'avons jamais examiné le chagrin, la souffrance, et demandé s'ils peuvent un jour prendre fin, pas à la fin de notre existence, mais maintenant, aujourd'hui. Si vous commencez à y réfléchir – j'espère que nous le faisons ici – quelle est la cause? Est-ce l'apitoiement sur soi? Parce qu'il était jeune, vivant, plein de fraîcheur et qu'il est mort? Est-ce parce que je me suis attaché à lui? Regardez tout cela en face, Messieurs ! Est-ce que je me suis attaché à lui? Et cet attachement, qu'est-ce que cet attachement? À qui suis-je attaché? À mon fils? Qu'est-ce que je veux dire par 'mon fils'? – soyez logique, rationnel – qu'est-ce que mon fils? J'ai une photo de lui, j'ai une image de lui, je veux qu'il soit quelqu'un, n'est-ce pas? Je veux qu'il soit quelqu'un, c'est mon fils. Je lui suis attaché désespérément, parce qu'il va reprendre mes affaires, il sera meilleur que moi à faire de l'argent. Vous savez, vous jouez tous à ça, vous connaissez le jeu par coeur. Cela, c'est un aspect. Et j'ai aussi une certaine affection pour lui. On ne l'appellera pas de l'amour nous l'appellerons une certaine forme d'affection. Si vous aimiez votre enfant vous auriez une autre éducation – non? – une autre façon de l'élever, pas seulement à marcher sur vos traces. Il est la nouvelle génération, et une nouvelle génération pourrait bien être très différente de la vôtre, du moins j'espère. Je veux qu'il soit la nouvelle génération, un autre genre de personne que moi. Ne pas suivre ce que j'ai fait – ingénieur, homme d'affaires et toutes ces histoires. Mais je veux qu'il hérite de mon argent, de mes biens, de ma maison – vous savez, le jeu auquel vous jouez, tous. Et quand il meurt, tout est détruit. Mon image de lui, mon désir qu'il soit ceci et cela, tout ça disparaît brusquement et je suis sous le choc. Alors je me tourne vers un neveu, une nièce, quelqu'un pour continuer sur les mêmes rails, parce que j'ai plein d'argent, ou juste une chambre. Vous ne connaissez pas tout cela? À quel point c'est cruel. C'est l'une des causes de grande souffrance.
1:16:56 And death of course is the final sorrow. But if you are living, with death and life together, then there is no change. You are incarnating every day afresh – not you, a new thing is incarnating every day afresh. And in that there is great beauty. That is creation. Not merely painting a picture, building a house, and architecture, but living with this : death and life. And in that there is tremendous freedom. And freedom implies also, the root meaning of that word 'freedom' is also love. Living, the art of living and the art of dying, together. That brings about great love. And love has its own intelligence, not the intelligence of a cunning mind. Intelligence is something outside of the brain. We will talk about that tomorrow. Et la mort, évidemment, est la souffrance ultime. Mais si vous vivez avec la vie et la mort à la fois, alors le changement n'existe pas. Vous vous incarnez à neuf chaque jour – pas vous, c'est une chose nouvelle qui s'incarne à neuf, chaque jour. Et en cela réside une grande beauté. C'est cela la création. Pas seulement peindre un tableau, construire une maison... mais vivre avec ceci : la mort et la vie. En cela réside une formidable liberté. Et la liberté implique aussi... Le sens premier de ce mot 'liberté' c'est aussi l'amour. Vivre, l'art de vivre et l'art de mourir à la fois. Cela fait naître un grand amour. Et l'amour a sa propre intelligence, qui n'est pas l'intelligence d'un esprit habile. L'intelligence est une chose qui est en dehors du cerveau. Nous en parlerons demain.