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BR78T2 - Comment trouver l’ordre absolu
2e causerie
Brockwood Park, Angleterre
27 août 1978



0:50 K: Pouvons-nous poursuivre ce dont nous parlions hier matin? Avant de nous y engager puis-je souligner que l'on devrait avoir un tant soit peu de scepticisme de doute, sans admettre ce que dit l'orateur mais en mettant ce qu'il dit en question, en étudiant ce qu'il dit, ou en examinant si ce que nous pensons comporte quelque vérité ou quelqu'erreur ou si ce qui est dit est pragmatique c'est-à-dire applicable à la vie quotidienne. Si l'on se contente d'accepter les mots, comme le fait la plupart d'entre nous, collectionnant mots et phrases nous passons à côté de beaucoup de choses. Nous parlons donc de la connaissance de soi, disant que se connaître soi-même est ce qu'il y a de plus important pas selon quelque psychologue psychanalyste, ou selon l'orateur mais en se connaissant vraiment tel que l'on est. Il s'agit ni de refuser, ni d'accepter ce qui est mais d'observer en regardant en soi, très, très profondément. Et ce que vous y découvrez doit provenir non de quelqu'un d'autre mais de ce que vous-même voyez et percevez de vos actions et réactions, etc. Il s'agit d'en être conscient afin de se connaître. Se connaître implique, n'est-ce pas de ne pas avoir déjà connu 'ce qui est' et le reconnaître. C'est-à-dire, se découvrir soi-même chaque fois à neuf non d'après le souvenir de quelque chose que vous avez déjà vu en vous-même et que vous reconnaissez, et continuez à reconnaître sans cesse. J'espère être clair là-dessus.
4:10 Ainsi, je veux me connaître. car si je ne me connais pas il n'y a pour moi aucune possibilité d'action juste, de comportement juste ni aucune base me permettant de voir clair. On peut se tromper si totalement vivre dans un monde d'illusions, un monde de chimères mais se connaître si complètement libère l'esprit de tous ses enchevêtrements de tous ses soucis de ses éternels bavardages et ainsi de suite.
5:02 Dans cette recherche, comme nous le disions hier nous sommes menés par le langage. Le langage se sert de nous plus que nous nous servons du langage. Nous avons assez approfondi cela hier. Et nous avons aussi dit que l'orateur n'étant pas ici vous parlez à vous-même et vous écoutez vous-même afin de découvrir ce qui se passe exactement en vous au fond de vous-même, dans votre sphère psychologique. Nous savons très bien ce qui se passe autour de nous à condition d'être bien informé mais très peu d'entre nous savent exactement où nous en sommes ce que sont nos réactions et s'il est possible de les dépasser.
6:10 Et nous disions également hier que la racine fonda- mentale de la peur dans laquelle vit la plupart d'entre nous, est le temps. Le temps chronologique tel qu'hier, aujourd'hui, et demain et aussi tout le mouvement de la pensée. Ce sont là les deux facteurs qui engendrent la peur. Et l'autre facteur est le souvenir. Le souvenir d'une peur passée et le fait de s'accrocher à ce souvenir et de projeter une peur future. Nous parlions de cela hier.
7:03 Nous aimerions donc continuer à approfondir d'autres éléments de notre personne. La plupart d'entre nous vit psychologiquement dans le désordre. Je ne sais si vous en êtes conscient. Nous sommes menés non seulement par le langage mais aussi par de très nombreuses pressions extérieures: économiques, sociales, politiques, nationales les croyances religieuses, etc. Mais psychologiquement, la pression la plus forte est celle du désir. chez la plupart d'entre nous. Comme nous l'avons dit hier nous sommes en communication les uns avec les autres. Vous ne vous contentez pas d'écouter la personne qui parle laquelle n'a pas la moindre importance. C'est ce qu'elle dit qui importe, pas la personne. C'est comme si vous aviez un téléphone vous n'accordez pas trop d'importance au téléphone vous l'entretenez, mais ce qui est dit au téléphone est de la plus grande importance. De même, la personne qui parle ici n'a aucune importance. Je tiens encore et toujours à insister là-dessus: la personne n'a aucune importance. Mais ce qui est dit est important. Donc votre admiration pour la personne ou l'antipathie que vous éprouvez à son égard toutes ces bêtises n'ont que fort peu d'importance. Si vous avez un bon téléphone, vous ne le cassez pas, vous le nettoyez, vous le respectez. Mais le téléphone lui-même n'a absolument aucune valeur tandis que ce qui est dit au téléphone devient signifiant. De même, ici, la personne n'importe pas. Avez-vous compris cela, clairement et absolument?
9:28 Nous disons que nous vivons dans le désordre, psychologiquement. Nous pouvons avoir une chambre ordonnée, faire les exercices qu'il faut faire du soi-disant yoga - je ne vais pas m'étendre sur ce mot sur ce qu'il signifie, sur son origine, etc. Ce n'est pas le moment. Nous maintenons de l'ordre à l'extérieur, en apparence mais il y a un désordre incroyable dans le monde. Ce désordre est peut-être engendré par le désordre psychologique de chacun. Désordre veut dire contradiction en soi-même penser à une chose et en faire une autre. Dire une chose et faire le contraire de ce que l'on a dit ou être hésitant, pas clair, contradictoire, etc. Tout cela indique le désordre. En outre, là où il y a contradiction il y a forcément effort, là où il y a division il y a forcément conflit, et ainsi de suite. Tout cela est un état de désordre dans lequel nous vivons. C'est un fait évident.
10:59 Et pour amener de l'ordre psychologiquement que faut-il faire? J'espère que vous vous lancez un défi au lieu d'accepter mon défi. Sachant consciemment, lucidement qu'on est dans le désordre, psychologiquement, que faut-il faire? Comment amener l'ordre? Car sans ordre tant psychologiquement qu'extérieurement on vit inévitablement dans le chaos étant donné que le monde devient de plus en plus chaotique destructeur, violent ce qui indique un grand désordre dans le monde. Et ce désordre est peut-être projeté par chacun de nous car nous vivons dans le désordre.
12:08 Nous demandons donc: comment peut-on avoir en soi un ordre complet, total est-ce possible? Là où existe l'ordre, une immense énergie est disponible. Là où existe le désordre, il y a dissipation d'énergie gaspillage d'énergie. Nous allons donc chercher, ensemble je ne cherche pas en moi-même, mais ensemble nous cherchons, explorons ensemble la question suivante: qu'est-ce que l'ordre et peut-il y avoir ordre sans compréhension du désordre? Nous cherchons ensemble, afin de découvrir cet état de fait que nous vivons dans le désordre. Est-ce là un fait concret, et non une description verbale du désordre? Le mot n'est pas la chose. La description du désordre n'est pas le désordre lui-même. La description d'une montagne si magnifiquement peinte soit-elle, la beauté de la vallée la lumière, la neige, les contours sur le ciel toute cette impression de majesté, la beauté de cette montagne peuvent être admirablement décrits mais la description n'est pas le fait réel. Pour la plupart d'entre nous la description suffit. Et nous sommes donc pris par la description non par le fait réel. Donc, quand nous demandons: 'qu'est-ce que le désordre?' est-ce là une idée que vous vous faites de l'ordre et la comparaison [du fait] avec l'idée que vous avez de l'ordre donne lieu au désordre, d'où, là encore, désordre total. J'espère que vous suivez tout ceci. Nous allons donc découvrir ce qui est le désordre et par un 'insight' [vision fulgurante] une perception rapide de toute la structure du désordre surgit l'ordre. Cet ordre ne se conforme pas à un modèle à un plan dressé par quelque sage quelque philosophe, ou quelque charlatan religieux. Et la plupart des prêtres religieux, et la hiérarchie et tout le reste, sont des super charlatans. Même le nouveau pape, j'espère. (Rires)
15:35 Alors (Rires) Alors, tout d'abord, sommes-nous conscients de vivre dans le désordre? Non la définition de ce mot mais le fait réel de la contradiction de la division moi et le mien, vous et le vôtre nous et eux, et toute cette division qui a lieu en nous-mêmes ce conflit continuel. Tout cela indique le désordre. Et comment observez- vous ce désordre? Comme nous l'avons fait hier, prenons par exemple l'attachement sous toutes ses formes: c'est un facteur de désordre. Et aussi, comme nous l'avons souligné hier comme nous l'avons découvert hier un facteur faisant partie de la peur. Donc, l'attachement à une personne, une idée, une conclusion, un souvenir passé un meuble, etc., etc engendre en effet le désordre. Voyons-nous ce fait?
17:17 Et se libérer de l'attachement sans pour autant s'isoler, devenir insensible, indifférent cela amène-t-il un certain ordre? Car ce que nous disons, c'est que quand nous avons tout mis en ordre il y a alors énormément d'énergie, une énergie formidable. Et l'on a besoin de cette énergie pour pénétrer au plus profond de soi. Nous demandons donc, découvrons par nous-mêmes d'abord le désordre dans lequel nous vivons et la nature de ce désordre qui fait partie de l'attachement, de la peur du plaisir, et ainsi de suite sans lui donner une direction particulière en espérant que cela amènera l'ordre mais en se contentant simplement d'être conscient de ce désordre sans aucun mouvement de recul à cet égard. Nous rencontrons-nous? L'orateur est-t-il clair? Puis-je développer ce sujet? Très bien.
19:02 Supposons que je vive dans le désordre intérieurement. Je puis me trouver extérieurement dans un ordre parfait mais peut-être suis-je en plein désordre intérieur. Et je me demande: que dois-je faire? Ce désordre est-il distinct de moi? Ou suis-je ce désordre? Comprenez-vous cette question? Il est vraiment très important de comprendre ceci car si le désordre est distinct de moi je puis alors agir sur lui je puis alors changer de schéma aller d'un coin à un autre ou amener l'ordre psychologique en réprimant, contrôlant, faisant ceci ou cela. Je puis faire quelque chose à ce sujet. Mais si le désordre n'est pas distinct de moi - il est un fait que le désordre est moi - alors surgit le problème suivant: que se passe-t-il dans ce cas? Suivez-vous tout ceci? Vous ne m'écoutez pas, vous vous écoutez vous-même. Alors peut-être amènerez- vous un changement. Mais si vous vous contentez d'écouter l'orateur vous pouvez l'écouter pour le restant de vos jours et j'espère que vous ne le ferez pas et si vous vous contentez de l'écouter, vous ne changerez pas. Mais si vous-même voyez que vous vivez dans le désordre et que ce désordre n'est pas distinct de vous que fondamentalement, à la base, vous êtes ce désordre que se passe-t-il alors? Auparavant, vous pouviez agir dessus parce que vous vous en sépariez et agissiez dessus et par conséquent, il y avait continuellement conflit défaillance, un jour vous pouviez le faire le lendemain vous ne le pouviez plus, etc., etc fluctuant de jour en jour. Alors que le fait est que vous êtes ce désordre. C'est un fait, pas une conclusion à laquelle l'orateur est arrivé et qu'il tente de vous imposer. Il ne fait pas cela. Nous ne nous livrons à aucune propagande et ne cherchons pas à vous convaincre de quoi que ce soit. Mais quand je suis le désordre je ne puis rien faire à cet égard ce qui signifie que je ne puis agir dessus, comme je le faisais avant. Aussi, je demeure dans ce désordre total. Le faites-vous pendant que nous parlons? Ou n'est-ce qu'une accumulation verbale? Ainsi, je ne suis pas distinct de ce désordre. Ce désordre existe parce que je me suis dissocié de ce que j'ai appelé le désordre. C'est là un des principaux facteurs du désordre. Je l'ai découvert. Chaque fois qu'il y a séparation entre moi et ce que j'observe psychologiquement cette division est un des principaux facteurs de désordre. Ainsi, si je prétends être hindou, ou musulman ou chrétien, catholique, ou Anglais, ou Français ou Allemand, ou quoi que ce soit la division est un facteur de désordre le Juif et l'Arabe, vous en avez quotidiennement un exemple évident cela arrive quotidiennement. Donc, psychologiquement quand il y a division entre le désordre et moi j'encourage et cultive le désordre. Alors qu'il est un fait que le désordre est moi-même et par conséquent, la réalisation de cette vérité amène l'ordre. Suivez-vous ceci? Vous êtes tous bien silencieux. Cela vous regarde.

Q: J'attends que cela se produise.
24:23 K: Le Monsieur dit qu'il attend que cela se produise. J'ai bien peur que vous n'attendiez longtemps! (Rires) C'est un fait, cela ne peut vous arriver. Voyez vous-même ce qui se passe par conséquent le fait lui-même la vérité de la chose libère l'esprit du désordre. La cause de ce désordre est la séparation d'un moi distinct du désordre. Vous comprenez?
25:09 Donc de même, pouvons-nous amener l'ordre dans notre vie? C'est-à-dire apprendre l'art de mettre chaque chose à sa juste place. L'ordre, c'est cela. Mais on ne peut remettre les chose à leur juste place que si celui qui le fait est lui-même très ordonné. Vous comprenez? Naturellement. Nous essayons donc de découvrir ce qu'est l'ordre et ce qu'est le désordre. Le désordre ne peut être dissout que quand la division entre moi et l'autre cesse, psychologiquement. Et il faut apprendre l'art de mettre les choses à leur juste place. L'argent, la plupart d'entre nous s'y accrochent, s'ils en ont beaucoup si vous en avez peu vous en voulez davantage, etc., etc. L'argent a pris une énorme importance dans le monde. Et le sexe aussi a pris une énorme importance. Je ne vais pas en parler; c'est important. Vous savez l'importance que cela a dans votre vie. Et, quand vous donnez autant d'importance à quelque chose ce fait même que vous donniez à une certaine chose une grande importance, est du désordre. N'est-ce pas? Si je donne une énorme importance aux exercices au soi-disant yoga je lui confère alors une place tout à fait démesurée. Ainsi, mettre chaque chose à sa juste place implique qu'on donne à toute chose sa juste valeur. N'est-ce pas? Pouvons-nous le faire? Le voulons-nous? Ou est-ce bien trop difficile? Ou dites-vous: 'nous avons vécu tant d'années dans ce gâchis, il n'y a qu'à continuer. Ne vous en mêlez pas'. Ainsi, vous acceptez le gâchis et vous y êtes habitué. Vous dites: 'nous nous y complaisons et ne voulons pas le modifier.' Mais quelqu'un qui se préoccupe sérieusement non seulement du monde qui nous entoure mais aussi intérieurement donnant à l'argent, au sexe, leur juste place apprend la beauté de la liberté. Sans cela, il n'y a pas de liberté.
28:43 Le problème suivant est donc celui-ci: nous vivons sous une grande pression, de plus en plus. Pressions des institutions pressions politiques, pressions économiques, pressions sociales etc., etc., etc. Et nous avons dit: peut-être la plus grande pression pour la plupart d'entre nous est-elle le désir d'agir la pression d'un énorme désir. N'est-ce pas? Suivez-vous tout ceci? Puis-je poursuivre?

Q: Oui.
29:27 K: J'espère que vous observez tout ceci en vous-même. Car, vous pouvez écouter ces paroles pendant les dix, vingt, ou cinquante prochaines années au terme desquelles vous direz: 'j'en suis encore au même point'. Parce que vous ne mettez pas en pratique vous ne dites pas 'je vais découvrir'. Vous vous bornez à vivre au niveau des mots.
29:58 La question qui suit est celle-ci: pourquoi le désir exerce-t-il une pression si terrible sur la plupart d'entre nous? La pression sexuelle, la pression du désir sexuel le désir d'expérience, le désir d'être connu, célèbre le désir - vous savez quelles sont toutes les activités du désir. Le désir d'illumination, c'est le désir le plus stupide qui soit! Car l'illumination ne vient pas par le désir. Vous aurez beau gravir les pics les plus élevés de l'Himalaya vous n'y trouverez jamais l'illumination. Il se trouve là-même où vous êtes, non aux Indes, ou au Japon ni en quelque autre lieu, ni même à Rome. (Rires) Je m'excuse de parler de Rome, mais je viens d'entendre ce matin que le Pape a été élu! (Rires)
31:18 Ainsi, si l'on est intéreurement conscient de soi-même on voit à quel point le désir est si extraordinairement puissant: désir de pouvoir, pour dominer les gens désir de… vous savez tout ceci, inutile d'entrer dans les détails. Vous le savez très, très bien. Et nous vivons sous cette pression. Et ainsi, non seulement on se rend malade physiologiquement sous cette tension, mais aussi psychologiquement c'est un grand souci, un grand problème. Par exemple, je désire être la personne la plus merveilleuse qui soit et c'est une tension continue pour devenir quelqu'un, être quelqu'un, parvenir à un résultat. On peut donc voir que le désir, si l'on n'en a pas compris toute la nature et la structure est un des facteurs du désordre. N'est-ce pas? Le voyons-nous? Je vous en prie, n'acceptez pas ce que je dis c'est totalement sans importance. Est-ce pour vous un fait, que vous avez découvert par vous-même en voyant que le désir sous toutes ses multiples formes et multiples expressions, engendre bien la confusion engendre bien le désordre? N'est-ce pas? Et la plupart des gens ont dit 'maîtrisez le désir réprimez le désir, ou accomplissez le désir allez jusqu'au bout du désir' - ils se sont livrés à tous ces tours. Parlez à n'importe quel moine et il vous dira 'il faut réprimer tout désir désir charnel ou autre pour servir Dieu, Jésus' - qui que soit ce dieu. Et il y a donc toujours cette répression ce contrôle, c'est un conflit perpétuel vous avez le désir de quelque chose, vous le réprimez le rationalisez, le maîtrisez, le fuyez, et ainsi de suite. Ce que nous essayons donc de faire ce que nous disons est ceci: découvrons la nature du désir comment il apparaît, si nous pouvons mettre le désir à sa juste place et aucunement le réprimer, le contrôler, le détruire. N'est-ce pas? Nous allons aborder cela.
34:39 Il faut donc découvrir toute la nature et la structure du désir. Le découvrir par soi-même sans qu'on nous dise quelle est la nature et la structure du désir. Car, si vous l'admettez vous reviendrez l'année prochaine ou pendant les trente ans à venir et direz: 'j'en suis exactement là où j'ai commencé et vous m'avez laissé là où j'en étais il y a trente ans'. Car l'on a vécu de paroles sans avoir réellement approfondi par soi-même. Pourquoi le désir a-t-il pris une telle importance? Il est encouragé par l'éducation sous toutes ses formes, la société; tout ce qui nous entoure encourage ce processus du désir. Je veux découvrir pourquoi le désir a pris tant d'importance en nous-mêmes, et qu'est-ce que le désir? Je dois donc d'abord comprendre la nature de la sensation. N'est-ce pas? La perception sensorielle, les sens. Je dois comprendre le cheminement des sens. Pouvons-nous continuer?
36:29 Les sens étant le toucher, l'odorat, le goût, etc. Et, nous ne fonctionnons jamais avec tous nos sens en action. Je me demande si vous comprenez ceci. Non? Le goût prend une telle importance si vous êtes un gourmet si vous aimez la bonne chair, le vin, etc le goût devient extraordinairement important. Ou si vous êtes sensible, la musique: seule importe la musique, à l'écoute d'un son ravissant et l'espace entre les sons, et la qualité du son. Ou quoi que ce soit. Donc nos sens sont morcelés, fragmentés nous ne voyons jamais quoi que ce soit avec tous nos sens, complètement. N'est-ce pas? Nous comprenons-nous? Pouvez-vous regarder quelque chose le mouvement de la mer la course des nuages le vent dans les arbres, regarder tout cela avec tous vos sens pleinement épanouis et attentifs? Pouvons-nous le faire? Alors, quand vous ferez cela, vous verrez, à titre d'essai - vous n'admettez pas ce que je dis faites-en vous-même l'essai - vous verrez alors qu'il n'y a aucun centre à partir duquel vous observez. Il n'y a aucune division venant d'un centre qui dit 'je suis distinct de cela'. Quand vous observez totalement un homme, une femme, ou un enfant ou votre amie, mari, épouse de tous vos sens éveillés alors aucun sens en particulier n'exige d'action. Suivez-vous tout ceci? Le faites-vous pendant que nous en parlons? Les sens ont donc leur juste place mais ils deviennent destructeurs, facteurs de division et de conflit quand un sens en particulier est développé et que les autres sont assoupis ou à moitié assoupis. Tandis que lorsque vous observez une chose entièrement, de tous vos sens il n'y a alors plus de division en vous-même.
39:48 Le désir fait donc partie des sensations c'est le début de la sensation. N'est-ce pas? C'est un fait, n'est-ce pas? Vous voyez une belle femme, un bel homme, un enfant, ou une voiture une montagne, ou une maison aux proportions parfaites, ou un jardin: il y a perception, sensation, et le désir surgit. N'est-ce pas? Et cette sensation, perception, créent l'image et le désir commence alors à agir. C'est là tout le mouvement du désir. C'est un fait quotidien, simple, évident, que vous pouvez observer si vous y prêtez attention.
40:50 Où donc le conflit, les ennuis, la confusion commencent-ils dans le mouvement du désir? N'est-ce pas? Vous suivez? Mettons par exemple que je vois un bel arbre, un jardin merveilleux. J'ai un lopin de terre et j'aimerais avoir un aussi beau jardin pour moi-même. Ainsi, il y a perception sensation, formation de l'image c'est-à-dire la pensée - n'est-ce pas? et la pensée poursuit alors ce qu'elle a observé pour se faire plaisir. Ainsi, chaque fois qu'il y a mouvement de la pensée à l'égard d'une sensation, le désir engendre alors le conflit. Vous comprenez ceci? Est-ce clair? Non, non, je vois que ce ne l'est pas. Je vais reprendre autrement.
42:04 Il y a la perception d'une belle maison bien proportionnée, et tout le reste. Il y a alors sensation. C'est normal, c'est essentiel sinon je suis aveugle, mes sens ne sont pas aiguisés, conscients. Mais le problème surgit au moment où la pensée crée l'image de la possession d'une telle maison et des démarches pour l'obtenir s'identifiant à cette maison, et ainsi de suite. Donc, quand la pensée commence à intervenir dans la perception alors apparaît la division alors commence le désir. Est-ce clair? Non, pas ce que je dis, mais en vous-même. Travaillez-vous autant que nous tous? Il fait chaud ici. Travaillez-vous aussi fort? Je l'espère. Peu importe, cela vous regarde.
43:25 La question est donc la suivante: perception, sensation, sont choses naturelles c'est bien naturel mais, cela peut-il s'arrêter là, sans que la pensée n'intervienne ne crée une image, et ne poursuive cette image qui devient le désir? Vous comprenez ce que je dis? Comprenez-vous ma question? La perception, la sensation sont choses normales, saines mais quand la pensée s'introduit, créant l'image et poursuivant l'image en tant que désir, alors commence le problème. Ne l'avez-vous pas remarqué chez vous? Vous pouvez voir une belle voiture et il y a la sensation et l'image de vous en train de la conduire la puissance que vous éprouvez, et tout cela au lieu de voir la voiture, d'éprouver la sensation, et d'en rester là. Pouvez-vous faire cela? Essayez, et voyez ce que cela implique. Là, il n'y a aucun contrôle. Vous voyez tout ce qu'implique le désir comment il apparaît comment la pensée crée l'image et la poursuit au lieu de la seule perception, la sensation, regardant la voiture ou la montagne, ou la fille ou le garçon ou quoi que ce soit. Là, il n'y a aucun conflit aucune répression du désir vous avez alors cette immense énergie que consume le mouvement de la pensée en tant que désir. Est-ce clair?
45:56 La question qui suit est alors celle-ci: nous cherchons en nous-mêmes pourquoi nous vivons tellement de souvenirs? Comprenez-vous ma question? Pourquoi les êtres humains vivent-ils dans le passé, dans le souvenir? N'est-ce pas? Vous paraissez tous tellement étonnés. Vous avez passé une journée agréable, et vous vous en souvenez et c'est stocké en tant que souvenir et vous vous régalez de ce souvenir, vous vivez dans ce souvenir ou vous vivez d'un souvenir sexuel ou du souvenir d'une réalisation que vous avez réussie. Ainsi, le souvenir a pris chez nous une importance extraordinaire en tant qu'expérience, en tant que savoir. Nous demandons: pourquoi? Comprenez-vous? Non qu'il ne faille pas se souvenir il faut bien sûr se souvenir comment conduire une voiture de l'endroit où l'on habite, et ainsi de suite du savoir technologique que l'on a acquis mais psychologiquement pourquoi le souvenir a-t-il tant d'importance dans notre vie? N'est-ce pas? C'est vous qui vous posez cette question. Qu'est-ce donc que le souvenir? Quel est le facteur du souvenir? Il s'est produit un incident, agréable ou douloureux un événement qui a amené un sourire ou une larme et cela a été enregistré dans le cerveau. N'est-ce pas? Naturellement. C'est simple. Et cet enregistrement devient le souvenir cet enregistrement est le souvenir de cet événement agréable ou de cet événement pénible. La question est alors la suivante: pourquoi faudrait-il enregistrer quoi que ce soit, psychologiquement? Vous comprenez ma question? J'ai posé une question: pourquoi le cerveau devrait-il enregistrer un événement qui fut malheureux ou heureux? Il peut enregistrer les choses dangereuses - n'est-ce pas? tel qu'un précipice, un animal dangereux ou un serpent dangereux, une personne dangereuse un escroc, etc., il peut enregistrer. Ce sont là des faits quotidiens évidents. Mais pourquoi le cerveau devrait-il enregistrer la blessure la flatterie, l'insulte le sentiment d'être comme ceci, et tout le reste pourquoi y aurait-il psychologiquement un quelconque enregistrement? Vous avez compris ma question, non? Nous rencontrons-nous? Est-ce l'heure de m'arrêter?

Q: Non!
49:57 K: (En français)
50:08 Nous nous demandons à présent ceci: une des fonctions du cerveau est d'enregistrer par nécessité. Je dois enregistrer du savoir technique si je travaille sur des machines, etc., etc. De même, si j'écris, si je suis chirurgien médecin, et ainsi de suite, cela doit être enregistré. Mais nous demandons pourquoi devrait-on enregistrer quoi que ce soit psychologiquement? Commençons pour le moins par comprendre la question. Est-ce nécessaire? Cela amène-t-il une clarification? Cela amène-t-il une plus grande énergie, une liberté, etc.? Ou l'enregistrement psychologique est-il un des facteurs qui détruit la joie véritable? Je vais y venir dans un instant.
51:40 Nous avons dit que le cerveau, dans son activité doit enregistrer certaines choses, c'est nécessaire. Mais nous demandons ceci: psychologiquement, intérieurement pourquoi le cerveau devrait-il enregistrer? Est-ce une habitude dans laquelle nous sommes tombés qui fait que lorsque vous m'insultez, je l'enregistre immédiatement? Quand vous me flattez, je l'enregistre immédiatement. Pourquoi? Quand vous me flattez, vous êtes mon ami quand vous m'insultez, vous n'êtes pas mon ami etc., etc., etc. Nous demandons à présent ceci: cet enregistrement peut-il cesser psychologiquement? Voyez ce que cela signifie. Cela signifie alors la régénération du cerveau. Le cerveau devient alors extraordinairement vivant, jeune, frais car il n'enregistre pas ce qui est inutile. Je me demande si vous suivez tout ceci. Dès lors, est-ce possible? Intellectuellement, on peut en voir la beauté, verbalement. On peut se dire: 'parbleu, ce doit être extraordinaire de n'avoir aucun enregistrement psychologique'. Mais cela ne signifie pas qu'on soit un végétal, ou vide, ou tout cela mais il y a liberté une extraordinaire sensation de joie une extraordinaire sensation de jeunesse le cerveau ne vieillit pas, ne s'use pas. Il faut donc découvrir si c'est possible. En effet, au fur et à mesure que nous vieillissons le cerveau devient de plus en plus mécanique de plus en plus bloqué dans une ornière, dans une voie et devient dur, friable, moins souple, moins rapide. Dès lors, est-il possible de ne rien enregistrer, psychologiquement? Avez-vous saisi la question? La question est-elle claire? Oui?
54:18 Alors, mettons-nous à chercher. Découvrir ne signifie pas que je vais vous le dire et alors vous le découvrez et dites 'oui, il en est ainsi'. Ensuite, vous reviendrez dans trente ans pour dire 'j'en suis toujours là à mon point de départ'.
54:36 Nous avons dit que le cerveau a besoin de sécurité pour fonctionner efficacement. Il doit enregistrer certains faits comme conduire une voiture, écrire des lettres, etc., etc la technique, etc. Le cerveau a alors réalisé qu'il faut mettre de l'ordre instaurer l'ordre afin de n'enregistrer que le nécessaire ce qui équivaut à amener l'ordre. N'est-ce pas? On peut alors se mettre à chercher pourquoi le cerveau, ou le psychisme, enregistre psychologiquement. Cela apporte-t-il de la sécurité, évite-t-il les dangers? Cela empêche-t-il de nouvelles blessures de nouvelles destructions, de nouvelles obstructions? Ou avons-nous inconsciemment cultivé l'habitude d'enregistrer? Nous avons enregistré dans ce domaine là, alors pourquoi pas ici? Nous sommes passés de celui-là à celui-ci. Psychologiquement. Extérieurement, c'est nécessaire mais psychologiquement, nous sommes passés de là à ici. Et est-ce le moins du monde nécessaire? Un exemple très simple: dès l'enfance, nous avons été blessés psychologiquement par les parents, par d'autres enfants, par l'école le collège, l'université si vous avez eu de la chance, etc., etc. Nous sommes meurtris, blessés psychologiquement. Et cette blessure est enregistrée. Et cette blessure a provoqué résistance isolement, peur, et tout le reste. Alors, est-il nécessaire d'enregistrer quand vous m'insultez? Comprenez-vous ma question? Est-il possible de prévenir l'enregistrement? Comprenez-vous ma question? Je l'espère! D'accord? Ce n'est possible que si, au moment où vous m'insultez ou me flattez tous mes sens sont éveillés et à l'écoute. Comprenez-vous ceci ? Il n'y a alors aucune réception. Tout ceci est-il de l'hébreu? (Rires) Je vois l'importance qu'il y a d'avoir un cerveau frais, jeune, brillant, clair. C'est de la plus haute importance. Est-il possible de conserver cette clarté cette précision, décision avec la beauté que tout cela comporte, jusqu'à ma mort? Ce n'est pas possible quand il y a enregistrement de choses qui ne sont pas absolument nécessaires. N'est-ce pas? Il faut donc découvrir le pourquoi de toute forme d'enregistrement psychologique qui devient mémoire, souvenir. Est-il possible de s'en abstenir? En approfondissant la question, on découvre que c'est possible. Ce n'est possible que quand on est réellement attentif au moment de l'insulte, au moment de la flatterie. N'est-ce pas? Avez-vous essayé?
59:35 L'autre jour, quelqu'un m'a dit: 'vous êtes un parfait idiot vous êtes coincé dans une ornière' plutôt impoli, mais voilà! (Rires) Alors, je suis allé dans ma chambre, et me suis dit: 'est-ce là un fait? Je veux le découvrir'. Il se peut que l'on soit coincé dans une ornière et que l'on soit un parfait idiot. On examine la chose et en observant très attentivement vous n'enregistrez pas vous n'enregistrez pas, vous écoutez le mot vous écoutez le fait que vous êtes ou non coincé dans une ornière. Etes-vous coincé dans une ornière? Vous comprenez? L'êtes-vous? Non, découvrez-le, ne répondez pas, je vous prie. Quelqu'un vous traite comme on m'a traité plus poliment, j'espère, et vous voulez savoir si c'est vrai. Vous ne niez ni n'acceptez la chose, mais vous contentez de l'observer. Si vous êtes coincé dans une ornière, c'est assez évident vous vous rendrez très vite compte que vous êtes dans une ornière.
1:01:01 Donc l'enregistrement n'a pas lieu quand vous êtes alerte vigilant, totalement conscient, avec tous vos sens en éveil il n'y a rien à enregistrer psychologiquement. Le ferez vous? Non, vous ne le ferez pas car pour nous, le plaisir a pris une énorme importance. N'est-ce pas? Si vous vous observez très attentivement vous verrez la part importante - peut-être essentielle que tient le plaisir dans nos vies: plaisir de trouver Dieu ou l'illumination plaisir d'être libre, plaisir d'avoir de l'argent des possessions, d'avoir une femme ravissante, ou un mari vous savez, toutes ces choses, le plaisir sexuel le plaisir du pouvoir, les politiciens avec leur plaisir d'un immense pouvoir. Ainsi, l'enregistrement du plaisir dans la vie de la plupart d'entre nous est immense. N'est-ce pas? Et la recherche du plaisir est devenue un facteur dominant: c'est-à-dire le souvenir d'un plaisir passé et la poursuite du plaisir passé en tant que souvenir et le désir qui se cache derrière, et la recherche la demande, la quête, l'exigeance. Les organisations religieuses reposent entièrement là-dessus. C'est un vaste divertissement cela donne beaucoup de plaisir, c'est-à-dire une vaste sensation d'être en présence de choses sacrées, etc.
1:03:35 Nous disions donc que l'enregistrement du plaisir d'un événement qui nous a procuré une grande satisfaction est enregistré, d'où sa poursuite dans notre vie.
1:03:50 Dès lors, la question est: qu'est-ce que le plaisir? Quand vous jouissez de quelque chose sur le moment, vous ne vous dites pas: 'comme c'est agréable, comme c'est beau', vous êtes dedans. Ce n'est qu'un instant après que la pensée intervient et dit: 'quel moment charmant ce fût là comme c'était beau, quelle sensation cela m'a donné quelle belle expérience'. Il y a donc eu enregistrement puis la pensée entre en action. Suivez-vous tout cela?
1:04:39 Nous parlons de tout ceci parce que cela fait partie de la connaissance de soi non, par des livres, non par des mots, non par des descriptions mais la véritable connaissance de soi. Connaître ne veut pas dire accumuler des souvenirs sur soi et observer à partir de cette accumulation. Si vous observez à travers l'accumulation, vous ne faites qu'accumuler ce que vous savez déjà. Tandis que si à chaque fois vous observez d'un œil neuf cela devient alors comme un grand fleuve dont les flots abondants coulent, roulent.
1:05:34 Alors, qu'est-ce que le plaisir? Est-ce le temps, est-ce la pensée en tant que peur? Nous avons dit que la racine de la peur est le temps. La racine de la peur est la pensée. La pensée, qui est souvenir, remémoration se souvient de certains événements qui provoquent la peur qui est enregistrée, et par la suite toute cette séquence de souvenirs est projetée. L'observez-vous? Alors, le plaisir est-il le temps et le mouvement de la pensée? Sont-ils tous deux identiques le temps et la pensée étant essentiellement identiques? Donc la pensée est le mouvement du plaisir non que vous ne puissiez regarder un bel arbre et en jouir une belle personne, une peinture, ou une belle vallée avec toutes ses ombres violacées. Vous pouvez regarder cela mais dès l'instant où c'est enregistré et remémoré ce n'est plus du ravissement, cela devient un plaisir c'est-à-dire le souvenir de choses qui se sont passées. Alors, si vous voyez toute la nature du phénomène complètement le plaisir trouve alors sa place le ravissement, et par conséquent psychologiquement intérieurement, il ne se produit aucun enregistrement de cet événement. L'esprit - le cerveau devient alors extraordinairement vivant jeune, frais, sans aucune réaction névrotique.
1:07:58 Terminé. Je me suis arrêté juste à temps. Si je puis vous le demander, n'applaudissez pas c'est à vous que s'adressent vos applaudissements, pas à moi ou applaudissez quand je serai parti. (Rires)