Krishnamurti Subtitles home


BR85T4 - La nature du cerveau qui vit religieusement
4e causerie
Brockwood Park, Angleterre
1er septembre 1985



0:55 L'orateur aimerait aussi faire une annonce et j'espère que vous la prendrez sérieusement. Ceci n'est pas une station estivale. Il y a bien une piscine, un cours de tennis et cela devient trop à la mode, trop important. Il y a des gens qui essaient d'interpréter ce dont parle K, et il a toujours dit: s'il vous plaît, n'interprétez pas. Alors veuillez considérer que nous allons mettre de l'ordre là-dedans de la rigueur, de façon à ne pas en faire un lieu de vacances de plus. En dépit de plusieurs annonces, cette musique continue comment l'appelle-t-on? Bong? Ces battements de tambour, etc. ont continué jusqu'à 10 h 1/2 hier soir. Alors je vous en prie, soyez courtois, attentifs aux autres et, faut-il le souligner où que K aille, il est un invité que ce soit en Inde en Amérique, ou ici. Il faut donc se comporter en invité faire preuve de respect, d'égards pour les autres faire preuve d'un certain ordre et ne pas trop laisser la chose trop grandir comme elle tend à le faire. Nous allons faire quelque chose à ce sujet l'année prochaine.
3:33 Pouvons-nous passer à autre chose? Nous parlions de divers problèmes de la vie, de nos vies quotidiennes, monotones, parfois agréables, en proie à la peur à l'anxiété, l'antagonisme et ainsi de suite. Nous avons vu la question du temps/pensée. Et hier, était-ce bien hier matin? Oui parbleu, excusez-moi. Hier matin nous avons parlé de la fin de la souffrance, de ce que cela implique de la nature de la souffrance et de toute la douleur, l'anxiété la solitude, la dépression, l'incertitude tout cela se retrouve dans a souffrance. Et dans certaines parties du monde on s'adonne au culte de la souffrance, de la douleur. Et l'on n'a jamais pu mettre fin à la souffrance non seulement à la souffrance découlant de la vie de chacun sous ses diverses formes, mais encore à la souffrance du monde en tant que tout. Voyez les terribles guerres qui ont lieu, ce qui se passe au Liban, en Afrique du Sud et dans le monde communiste, le totalitarisme absolu où l'on est contraint à penser selon certaines lignes les deux côtés se préparant à la guerre. avec au bout du compte la bombe atomique. Et voilà ce qui a lieu. Des millions et des millions de gens ont été massacrés au nom de Dieu de la paix, de la patrie, de quelque concept idéologique, de théories. Tel a été notre lot, et nous avons enduré tout cela pendant des millions d'années. Et tout au long d'une évolution autrefois nous étions des barbares, des sauvages quand on examine tout cela, ce qui se passe maintenant on voit que l'on est toujours barbare, violent intérieurement intérieurement préoccupé par nous-mêmes et par personne d'autre préoccupés par nos propres plaisirs, problèmes et ainsi de suite. Nous ne paraissons jamais nous rendre compte que nous sommes le monde, et que le monde est nous. Il ne s'agit pas là d'une théorie ni d'une chose à laquelle on réfléchit pour en venir à une conclusion idéologique ni d'une idée utopique, mais d'une réalité de la vie quotidienne. Vous êtes le monde, et le monde est vous. On se demande combien d'entre nous se rendent compte de ce fait, aussi nettement que l'on se rend compte d'une douleur physique, de la sensation d'être affectueux, tendre, calme. Il est un fait évident que vous souffrez et que le reste de l'humanité souffre. Vous êtes violent et le reste de l'humanité souffre, est violent. Quand vous avez l'intention de faire quelque chose pour vous-même et que vous voulez le réaliser vous devenez violent, comme le reste du monde. Nous avons approfondi tout cela pendant toutes ces dernières causeries, non seulement au cours des 70 ans écoulés - je regrette de devoir le mentionner - mais aussi maintenant. En fait nous ne ressentons pas ne réalisons pas dans notre coeur et notre cerveau que nous sommes le restant de l'humanité. Quand on se rend réellement compte de ce fait qui n'est ni une théorie, ni une idée, mais un fait concret quotidien, il y a alors une façon de vivre totalement différente. On n'appartient à aucun pays, aucun groupe religieux, aucune autorité spirituelle, pas plus qu'à ceux qui veulent interpréter ce que dit K. Et quand vous sentez vraiment que vous êtes effectivement le reste de l'humanité vous ne tuerez jamais un autre vous ne voudrez jamais consciemment ou inconsciemment ou délibérément blesser autrui psychologiquement.
11:05 Je vous en prie, tout ceci est très, très sérieux ce n'est pas un simple sujet de conférence ou de sermon dominical. Nous sommes ensemble dans le même bateau. Nous sommes ensemble en train de comprendre le monde et nous-mêmes et ce qui nous lie au monde; il ne s'agit pas de notre responsabilité mais de notre relation à l'égard du reste de l'humanité. Il se peut que vous soyez bien nourris, bien habillés bien logés, avec un beau jardin ou que vous viviez dans un bidonville, mais il y a des millions et des millions de gens qui meurent de faim, des races qui sont délibéremment détruites, des tribus massacrées. Aussi longtemps que nous ne ressentirons pas tout cela mais nous contenterons de l'admettre comme une idée une conclusion, nous continuerons à créer un monde monstrueux que nous sommes d'ailleurs déjà en train de créer. Et nous sommes ce qui est en train de se passer. Et nous devrions aussi parler d'autres choses ce matin
13:10 concernant notre vie. Nous avons parlé de la compassion, de l'amour, et cette compassion comporte sa propre intelligence. L'amour a sa propre intelligence pas l'intelligence d'une pensée habile, du calcul, du souvenir mais celle qui prévaut quand il y a compassion laquelle ne survient ou n'existe que quand la souffrance prend fin. Nous avons beaucoup parlé de cela. Malheureusement, l'orateur a publié des livres sur tout cela et il ne s'agit pas seulement de se souvenir de ce qu'il a dit ou de ce qu'il veut dire, mais de la réalité de ce sentiment de compassion. Et cela ne peut survenir que quand la souffrance prend fin et, quand on ressent concrètement dans son être, son coeur, son esprit qu'on est le restant du monde, que l'on n'appartient à aucune secte à aucun groupe, aucun gourou aucune église, aucune mosquée, aucun temple. On écoutera tout cela, ou on lira à ce sujet -dont K a parlé pendant si longtemps, et l'on dira: 'oui, quelle merveilleuse idée. Son raisonnement est excellent, très logique, mais...' et l'on peut y ajouter beaucoup de «mais». On poursuit son chemin, d'où la perpétuation du conflit. On entend une chose avec laquelle on est en accord ou en désaccord, ou l'on en voit la vérité et l'on veut se montrer à la hauteur, et donc le conflit recommence.
15:46 Nous avons beaucoup approfondi le conflit pendant ces causerie. Et nous avons dit que l'amour ne peut exister tant qu'il y a conflit entre l'homme et la femme, entre personnes nations, communautés, enclaves, et ainsi de suite. Notre cerveau, qui a évolué tout au long de tant d'années et si longtemps, ce cerveau a une capacité extraordinaire, le cerveau de chacun d'entre-nous a une capacité extraordinaire. Nous nous en sommes servis dans le monde de la technologie, dans le monde des ordinateurs et nous n'avons jamais examiné le monde psychologique qui est bien plus important, le subjectif tout le processus psychologique qui se poursuit intérieurement. Nous ne l'avons jamais regardé, nous ne l'avons jamais approfondi sans recourir aux autres, K inclus nous n'en avons jamais gratté la surface, même superficiellement. Et par conséquent nous ne nous posons jamais de questions fondamentales. Et maintenant nous discutons de ces choses ensemble sans que ce soit l'orateur qui dise quelque chose et que vous vous contentez d'écouter pour ensuite quitter la tente et tout oublier et reprendre la chose dix ans plus tard. Il s'agit de votre vie, de notre vie, et vouloir traiter sa vie sérieusement ou superficiellement, avec légèreté, est l'affaire de chacun.
18:34 Et nous avons aussi énormément parlé de la liberté liberté à l'égard de l'anxiété, de la souffrance de la douleur et de tout le labeur de la vie. Et il y a aussi une autre sorte de liberté une liberté en soi, pour elle-même non parce que vous voulez être libre de quelque chose - ce n'est là qu'une liberté très partielle. Il existe une liberté totale, non partielle. Et ce matin, nous devrions aussi parler de la mort.
19:33 N'est-ce pas? Nous avons parlé de tant d'autres choses. La mort n'est pas un sujet morbide par une sombre matinée ou une nuit obscure. On a écrit des livres sur comment mourir joyeusement comment l'admettre naturellement, comment laisser partir le corps... Vous savez, on en parle, on écrit sans fin à ce sujet. Et maintenant, vous et l'orateur sommes ensemble, s'il vous plaît ensemble il ne parle pas tout seul, il ne donne pas une conférence il ne parle pas d'une chose qu'il vous faut comprendre d'où le besoin d'interprètes pour vous expliquer ce que dit K. Et voilà ce qui a lieu ici même, cela semble tellement absurde.
21:03 Nous devrions parler ensemble de ce sujet si important si sérieux, si vaste, que l'on nomme la mort. Bien, allons-nous poursuivre? Veuillez considérer que ce n'est pas lui qui vous parle mais que nous nous parlons les uns aux autres. Il n'a aucune autorité, et j'insiste là-dessus. Il ne prétend pas à la supériorité de celui qui vous ferait la leçon à ce sujet. Mais ensemble, nous allons approfondir la chose. Si vous voulez bien. Si vous ne voulez pas, très bien. C'est aussi très bien. Personne ne vous impose quoi que ce soit, ni ne vous donne de directives en vous disant quoi faire ou quoi penser. D'accord?
22:26 Qu'est-ce que la mort? Et en posant cette question il faudrait également examiner ce qu'est la continuité et aussi ce qu'est 'finir', la finalité de quelque chose. La fin, la continuité, le temps et la mort, ou la pensée, n'est-ce pas? Tout cela est inclus dans la question posée: qu'est-ce que la mort? Le temps, la pensée, le besoin de continuité, et en formulant ce besoin de continuité, il faudrait aussi voir ensemble ce que veut finir signifie. Et y-a-t-il un commencement? Cette question 'qu'est-ce que la mort' inclut tout cela ce n'est pas seulement un manque d'oxygénation du cerveau qui tire alors sa révérence ou passe l'arme à gauche, comme vous voudrez. C'est là le grand sujet de préoccupation de l'homme: la façon dont il vit, et la façon dont il meurt.
24:18 Nous nous interrogeons donc ensemble sur ce qu'est la mort pourquoi la mort est-elle associée à la souffrance. Vous suivez tout ceci? L'orateur n'est pas en train de vous mener, ni de vous convaincre. Je m'ennuie à force de vous dire cela! Qu'est-ce donc que la mort? Il faut considérer le tout et non le seul fait de mourir. Considérer la naissance, la durée de vie: 40, 50, 60, 70 ans, 90 ans ou même un peu plus il faut considérer l'ensemble, pas seulement 'qu'est-ce que la mort?' Il est assez simpliste de demander qu'est-ce que la mort, et puis d'en pleurer, d'en avoir peur ou d'en faire un culte, comme chez les Chrétiens. Les Indiens, les anciens Hindous, explosèrent dans toute l'Asie de même que les Grecs dans le monde occidental ils avaient leurs théories, y compris Pythagore et les autres sur la réincarnation, dont nous parlerons dans un instant.
26:12 Nous devons donc examiner tout à la fois qu'est-ce que la continuité, qu'est-ce que finir qu'est-ce que le temps et la pensée qu'implique ce processus, c'est-à-dire que nous devons commencer par chercher 'qu'est-ce que vivre' et non 'qu'est-ce que mourir', n'est-ce pas? Nous sommes ensemble ici. Je ne le répèterai pas. Alors, qu'est-ce que vivre? Qu'entendons-nous par vivre? Dès l'instant de notre naissance tout au long de la période que nous appelons la vie le vivre, qu'est-ce qui s'y passe? - pas seulement en partie, mais pendant toute sa durée Dès l'enfance, nous avons des problèmes. Les enfants que l'on envoie à l'école ont aussitôt un problème: comment lire, écrire, comment apprendre les mathématiques et plus tard la chimie, la biologie, tout cela devient un problème. Ils sont éduqués dans les problèmes. Ce sont là des faits et non des produits de l'imagination de l'orateur. Ainsi, dès le début notre vie est un problème continuel: lutte douleur, anxiété, incertitude, confusion, foi, croyance Dieu, répétition perpétuelle de rituels sous le nom de religion culte d'un symbole, foi, croyance réussite, échec, souffrance, douleur. C'est tout cela que nous appelons vivre. C'est là un fait réel qui inclut le plaisir, le sexe et tout le reste. Voilà ce que nous appelons vivre. Se rendre au bureau de 9h à 17h, à l'usine de 9h à 17h ou se rendre dans un magasin pour y vendre des livres des vêtements, de la nourriture, et ainsi de suite. Telle est notre vie quotidienne, monotone, prétendument disciplinée. Serions-nous, vous et moi, en désaccord là-dessus? Ou le voyons-nous comme un fait? Il ne s'agit pas d'en admettre la description alors que c'est le fait réel de notre vie. D'accord, Messieurs? Et nous n'avons pas compris cela. Nous ne l'avons pas approfondi pour voir si l'on peut vivre d'une façon totalement différente.
30:19 Mais il y a toujours la mort. Il y a un très bon proverbe italien, mais je ne vais pas l'aborder. Il dit: 'tout le monde va mourir, je sais. Moi aussi, peut-être' (rires) Alors, que nous faut-il d'abord saisir, comprendre, approfondir, résoudre
30:57 vivre, la vie quotidienne, ou mourir? Et d’ailleurs, pourquoi sommes-nous si terriblement préoccupés par la mort? Un jour, l'orateur marchait sur une route ombragée, en Inde. Alors qu'il se dirigeait vers la mer, il entendit derrière lui un chant. Un corps sans vie était porté par deux hommes et son fils ainé portait le feu devant lui, devant le corps. Rien de plus, pas toute cette mise en scène, les fleurs, vous savez. C'était une chose très simple et vraiment belle. Le fils pleurait, et chantait en sanscrit marchant vers la mer, où l'incinération aurait lieu. Tout ce bruit que le monde occidental fait autour de la mort des Rolls, des montagnes de fleurs, et ainsi de suite. Alors, de quoi nous préoccupons-nous? De vivre ou de mourir? Je vous en prie, nous parlons l'un à l'autre. Qu'est-ce qui nous importe le plus que nous devons prendre à bras le corps à pleines dents, y consacrer toute notre énergie?
33:18 A propos d'énergie il y a ceux qui veulent libérer l'énergie, n'est-ce pas? D'une part, il y a l'acupuncture, de l'autre, diverses tentatives visant à accroitre son énergie, et ainsi de suite. Qu'est-ce que l'énergie? Il a fallu de l'énergie pour venir ici, énormément d'énergie pour dresser une tente, venir en voiture par un jour pluvieux, venteux rassembler tout ce qu'il faut pour venir ici. Cela a nécessité beaucoup d'énergie. Peut-être balaierez-vous tout cela et direz-vous 'je vais y aller', mais pour décider de venir conduire une voiture, ériger une tente, s'asseoir ici et écouter tout cela demande énormément d'énergie. Et nous voulons davantage d'énergie. Nous ne savons pas comment utiliser notre propre énergie. Vous avez plein d'énergie quand vous voulez faire quelque chose. Ils sont allés sur la lune toute cette énergie technologique qu'il a fallu de la part de tous. Il faut de l'énergie pour parler, pour penser, pour le sexe, pour tout la vie est énergie, mais nous, par notre intérêt pour soi notre spécialisation, notre besoin de réussite nos peurs et tout cela, nous avons restreint cette énergie. Nous l'avons rendue si petite, si particulière, si minuscule... Pardon! Et nos cerveaux ont été restreints par la spécialisation, par vous savez, tout ce qui s'en suit. Il y a donc l'énergie. Quand nous nous comprenons, nous-mêmes, cette énergie explose. Vous avez alors une passion formidable pas seulement la passion de quelque chose mais la fleur de la passion qui ne se fane jamais. Et cela ne peut venir que quand il y a compassion.
36:54 Alors, qu'est-ce qui nous préoccupe le plus: la mort ou le vivant? Nous l'avons dit, vivre consiste en une série, une succession de conflits de luttes, douleurs, souffrances et tout le reste. Ce n'est pas là un sombre tableau. Vous pouvez l'embellir en le colorant en rendre la description plus agréable, mais c'est là un fait. Alors ne faudrait-il pas d'abord comprendre la vie pour ensuite en venir à comprendre ce qu'est la mort? Vous comprenez? Et non l'inverse. Que donnerez-vous, pas financièrement que donnerez-vous pour découvrir comment de quelle manière on peut vivre de façon totalement différente? Il ne s'agit pas de se mettre à suivre quelque autre absurdité une nouvelle peinture, de nouveaux poèmes de nouvelles danses et tout ce fatras immature et puéril. L'orateur n'est pas intolérant, il ne fait que voir tout ce qui se passe. Alors, prenant conscience de ce qu'est notre vie de la réalité de l'existence sur cette terre pouvons-nous susciter une mutation pas un simple changement, un changement complet un renversement, ou ce que vous voudrez de sorte que ce que l'on a vécu, ce que l'on vit soit complètement terminé et que. quelque chose de neuf puisse advenir?
39:19 Il nous faut donc chercher, étudier ensemble ce qu'est la continuité... Qu'est-ce qui continue dans le cours de notre vie? La mémoire, est-ce cela? La continuité, une série d'événements qui se succèdent, d'expériences le 'moi', la 'persona', l'ego, tout cela est un ramassis de souvenirs. Cette idée ne plaira peut-être pas. On voudrait plus que de simples souvenirs, et vouloir cela n'est qu'une fabrication de souvenirs de plus, n'est-ce pas? On n'est pas satisfait de ce souvenir-ci, mais on en veut un autre. Ainsi cette continuation que nous appelons 'vivre' est une série une succession d'événements, de souvenirs, d'expérience et ce paquet est moi, est vous. Et la continuité est ce qui est connu. Comme nous sommes effrayés par ce qui mettra fin à tout cela! On a vécu une longue vie d'expérience, de savoir on a voyagé partout, Dieu sait pourquoi, mais on l'a fait et vous parlez, jugez, évaluez, vous savez tout cela. Et nous ne cherchons jamais à savoir ce qu'est la continuité et qu'est-ce que finir. Finir volontairement une chose que l'on chérit. Comprenez-vous ma question? Nous posons-nous mutuellement cette question? Supposons que l'on soit très attaché à une personne, à une conclusion que cette conclusion soit historique, dialectique, marxiste, léniniste bla, bla, bla, tout cela, on y est attaché comme une sangsue. Peut-on volontairement, facilement lâcher prise? Voilà ce que signifie la mort. Vous ne discutez pas avec la mort. Vous ne dites pas: 'accorde-moi encore deux ou trois jours pour que je puisse tout mettre en ordre'. Elle est là, à votre porte.
42:50 Alors, peut-on comprendre la continuité et y mettre un terme? Comprenez-vous ma question? Pour nous l'attachement a une grande signification. C'est l'expérience commune la plus satisfaisante être attaché à la terre, à certaines croyances à certains dogmes, rituels, habitudes et ainsi de suite. On est très attaché à une maison, à un mobilier, à une habitude. Peut-on devenir conscient de cela et y mettre fin complètement, dans cet état de lucidité? Pas après-demain, mais maintenant, tout en étant assis ici devenant conscient de tout cela: des explications de la réalité pas de la description, mais du fait de ce besoin constant de continuité. Continuité sexuelle, continuité des possessions, continuité familiale continuité de ses propres expériences profondes pour que tout cela finisse instantanément. Voilà ce qu'est la mort. Alors, sans attendre la mort à 60, 80, ou 100 ans il faut y mettre fin chaque jour, en vivant avec la mort. Ne soyez pas... Monsieur, l'orateur s'implique terriblement dans ce qu'il dit ici il ne s'agit pas d'une simple suite de mots mais de vivre une vie qui prend continuellement fin, tous les jours à chaque instant, de sorte qu'il n'y ait aucune continuité du passé ou du futur. Il n'y a que cette fin, qui est la mort. Et il s'agit de vivre ainsi. Allons, Messieurs. N'y réfléchissez pas, voyez-en la vérité. La pensée...peut créer construire un tas de choses, mais la pensée ne peut tromper la mort. Donc si l'on prend conscience de l'immensité de ce que signifie vivre avec cette fin que l'on appelle la mort, dans notre vie quotidienne, alors il y a une vraie transformation, une vraie mutation même dans les cellules cérébrales car les cellules cérébrales portent tous nos souvenirs tout le passé et tout le reste. Alors, pouvons-nous vivre ainsi? Sans faire semblant, sans dire: 'je dois faire un effort' vous ne faites pas d'effort pour mourir! à moins de sauter du 18ème étage et vous dites: 'pour l'instant çà va, pourvu que ça dure' (rires)
47:32 Et nous devrions aussi parler ensemble de ce qu'est la religion et de la nature d'un cerveau qui vit religieusement. La religion a pris beaucoup d'importance dans nos vies. Si vous êtes athées, vous direz peut-être: 'tout cela n'a aucun sens voilà un prêtre stupide qui prêche des absurdités'. Vous aurez beau vous fermer à tout cela, il y a pourtant ce besoin intérieur, ce commentaire intérieur qui dit: 'En fin de compte, que signifie tout cela cette vie, cette mort, cette douleur cette anxiété, quel est le sens de tout cela?' 'Qui l'a créé? Dieu? La nature? La cellule originelle?' Et ainsi de suite. La religion n'a donc rien à voir avec toute cette ineptie, ce cirque qui se poursuit que ce soit à Rome, en Angleterre ou à Bénarès en Inde ou dans les pays boudhistes, tout cela est construit par la pensée et c'est donc très, très limité. Il vous faut donc demander: qu'est-ce que la religion et la création? Qu'est-ce que la création? Y a-t-il une différence entre la création et l'invention? Nous parlions l'autre jour avec un excellent médecin, de tout premier ordre pas un de ces médecins tournés vers l'argent mais un bon médecin avec un bon cerveau. Il disait qu'il y a une certaine partie du cerveau qui peut toujours être activée. Je déforme peut-être ce qu'il dit, attention n'admettez pas intégralement ce que dit l'orateur à ce sujet. Il y a une certaine partie du cerveau - il se servit d'un terme technique que j’ignorais - qui, lorsqu'on tombe malade, s'amollit un peu et quand on vieillit, elle s'amollit encore davantage. Et il s'agit de savoir si cette partie interne du cerveau peut être réactivée, ranimée, n'est-ce pas? Ne l'admettez pas. Ne vous endormez pas. Nous parlions de cela. Je ne vais pas m'étendre là-dessus maintenant, car c'est trop complexe. Alors, qu'est-ce que l'invention, et qu'est-ce que la création? Cela concerne la religion. Et le cerveau est conditionné, moulé modelé par toutes sortes de choses: par la communauté par ce que vous lisez, ce que vous entendez par tous les prêtres qui ont promulgé certaines idées certains cultes, Dieu, tout cela a conditionné notre cerveau. Notre cerveau, le vôtre et le nôtre ce cerveau peut-il jamais comprendre ce qu'est la création? Ou se base-t-il fondamentalement sur le savoir c'est-à-dire l'expérience, accumulant, apprenant, mémorisant, etc. Ce cerveau peut-il comprendre ce qui n'est pas mesurable? Vous comprenez? Sommes-nous tant soit peu ensemble ici?
52:59 Nous mesurons, n'est-ce pas? Nous mesurons, ce qui signifie comparer, juger, évaluer. Nous sommes toujours en train de nous comparer à autre chose comparant un peintre à un autre un poème à un autre ou Beethoven à Bach et ainsi de suite, Mozart, incluons Mozart. Donc, l'invention n'est-elle pas basée sur le savoir? S'il vous plaît, nous en discutons ensemble. Il n'y a pas d'invention sans savoir. Il faut un fond de savoir pour découvrir quelque chose de neuf est-ce cela la création? Ou la création est-elle totalement hors du temps et de la pensée? Ceci a été un des problèmes, peut-être le plus important problème qui se pose à un cerveau religieux, de qualité religieuse. Nous ne nous servirons jamais plus du mot 'méditation'. J'espère que cela ne vous fait rien. Ce mot implique aussi la mesure, tant en sanscrit que dans les dictionnaires étymologiques. La mesure. Non seulement la mesure d'un tissu et de toutes les choses matérielles mais encore le fait de se mesurer soi-même à quelque chose. La mesure fut inventée par les Grecs, et probablement même avant eux. Sans mesure, il n'est pas de monde technologique possible. Et nous transposons ce même principe à nous-mêmes nous sommes toujours en train de mesure ce que nous sommes aujourd'hui espérant que demain sera pareil, ou qu'il sera différent. Cela revient toujours à comparer, juger, évaluer. Et ce mot qui a été tellement mutilé par les gourous qui ont introduit diverses formes de méditation nous n'allons pas discuter de ce mot qui est devenu tout à fait insensé. S'asseoir dans une certaine posture, respirer d'une certaine façon se concentrer, etc., déployant d'énormes efforts pour parvenir à quoi? Une carotte devant l'âne? Alors, il faudrait s'intéresser
56:55 non pas à la façon de tranquilliser le cerveau ce qui est assez facile mais s'intéresser à l'attention totale. Pas l'attention à quelque chose, mais la qualité de l'attention ce qui différe totalement de la concentration. La concentration est de l'effort, se focaliser sur une chose ou sur plusieurs choses, ce qui devient une habitude comme chez les pilotes, là-haut. Est-il donc possible d'être attentif? Et alors, en cela il n'y a aucune hypocrisie aucune prétention: vous êtes attentif. Et dans l'attention il y a un silence total, quand vous êtes attentif. Et cette attention n'a aucune frontière: 'cela' est attentif. Il n'y a pas de 'moi qui suis attentif', il n'y a qu'attention. Je vous en prie, considérons, prenons conseil ensemble à ce sujet.
59:05 Dès lors, qu'est-ce que la création? Il ne s'agit pas de la cellule primordiale, ni de comment nous avons évolué, et tout cela. On a dit que Dieu avait créé tout cela. Au contraire, nous avons fait Dieu à notre image partant de ce que nous sommes nous avons fait ce pauvre diable, là-haut! Nous lui avons attribué toutes les qualités qui nous manquent, la miséricorde, la charité l'amour, l'omniprésence, l'intelligence et tout le reste. Qu'est-ce que la création? Le cerveau, qui est le centre de tous nos nerfs de toute notre activité, de toute notre existence si petite soit-elle ce cerveau peut-il comprendre l'immensité de la création? Ou bien y a-t-il quelque chose au delà du cerveau? Attention ici, n'admettez rien de ce que dit l'orateur. C'est la première chose qu'il faut apprendre ne jamais rien accepter de prétendument spirituel. C'est de la pure ineptie. Il n'y a aucune autorité spirituelle. L'autorité d'un médecin, d'un scientifique, c'est autre chose. Le policier a de l'autorité, spécialement en Suisse! (rires) Terriblement! Une fois, nous nous y sommes fait prendre! Le cerveau est-il capable de vraiment voir ce qui n'est pas mesurable? On peut en parler, on peut l'inventer on peut bien dire que l'incommensurable existe tout cela, n'est qu'un tas de mots. Mais nous posons une question tout à fait différente: le cerveau qui est fait de temps, de mémoire, de pensée, d'expérience, etc ce cerveau peut-il jamais comprendre ce qui est sans limite? Vous comprenez ma question? Elle est réellement... Ou bien y a-t-il autre chose que le cerveau, c'est-à-dire l'esprit? N'inventez pas, car alors, nous sommes perdus. Nous nous demandons l'un l'autre: existe-t-il quelque chose que l'on nommera pour l'instant l'esprit (on pourra changer de mot) y a-t-il un esprit qui ne soit pas le cerveau? Existe-t-il une telle chose qui seule peut voir ce qui est immense? Et cet esprit peut alors communiquer avec le cerveau mais le cerveau ne peut pas communiquer avec lui. Avez-vous compris? Nous nous posons cette question l'un à l'autre. Le cerveau, tel que nous le connaissons a été considérablement rapetissé bien qu'il ait une capacité immense. L'ordinateur est quelque chose d'extraordinaire. Il va probablement prendre le contrôle de nos vies voilà probablement la nouvelle industrie. L'ordinateur va modèler nos vies. Il est déjà en train de le faire, silencieusement lentement, nous n'en sommes pas conscients. Nous avons parlé à beaucoup de ces experts en ordinateurs, ceux qui les construisent. Ils ne se soucient pas de ce qui arrive au cerveau humain. Vous comprenez? Ce qui les intéresse, c'est de les créer ah, pas de les créér, de les construire, ce mot est plus approprié. Quand l'ordinateur prend en charge nos vies, qu'advient-il de nos cerveaux? Ils sont meilleurs, bien plus rapides, si prompts ils vous sortiront des milliers de souvenirs à la seconde. Alors, quand ils prendront la relève, qu'adviendra-t-il de nos cerveaux? Vont-il graduellement s'étioler? ou se laisseront-ils complètement absorber par les amusements? Par le divertissement? Faites face à tout cela, je vous prie, c'est en train d'arriver. Toute ces reportages sportifs à la télévision, qui sont de plus en plus longs. Ils consacrent dix minutes au cricket et deux minutes à ce qui se passe en Afrique du Sud. L'industrie du divertissement est donc en train de prendre le dessus. Il faut faire face à tout cela. Et le divertissement religieux a aussi pris le dessus. Ainsi, nous nous faisons constamment divertir. Et nous estimons que notre réunion ici fait partie de cela. Je vous assure qu'il n'en est rien. Tout ceci est terriblement sérieux.
1:06:37 Alors, le cerveau peut-il jamais comprendre l'univers? On peut affirmer que Vénus a tel gaz, tel métal, etc., etc mais la description, la qualité, la saveur de la chose n'est pas Vénus sa beauté, son extraordinaire quiétude. Et pour comprendre toute cette immensité le cerveau peut-il être tranquille sans bavarder, bavarder, bavarder sans cesse? Ce cerveau peut-il devenir extraordinairement simple et par conséquent extraordinairement subtil? Et, si ce cerveau est capable de subtilité, de cet immense sentiment de la grande simplicité du temps et de la pensée, et tout le reste alors peut-être cet esprit, qui n'est pas le cerveau, peut-il communiquer avec ce dernier. Alors que le cerveau ne peut communiquer avec 'cela', c'est évident. Et nous faisons de notre mieux pour. communiquer avec 'cela', nous livrant à toutes sortes de stratagèmes, à toutes sortes de maîtrise de sacrifices, prononçant des voeux, n'est-ce pas? Et cette chose, on ne peut jamais y toucher. Et l'esprit religieux, ou plutôt le cerveau religieux a toujours ce fond de grand silence et de solitude.
1:08:55 Nous en avons fini. Voulez-vous bien vous lever, de sorte que je puisse me lever aussi?