Krishnamurti Subtitles home


MA7879T6 - Le mouvement de méditation
6e causerie
Madras (Chennai), Inde
14 janvier 1979



0:38 J'ai oublié.
1:21 Si vous le permettez, j'aimerais bien parler cet après-midi, d'un grand nombre de sujets, et nous pourrions ensemble aborder une chose très simple et très complexe. Pour commencer, nous allons, ensemble, - toujours ensemble, s'il vous plaît, je ne vais pas m'en aller galoper tout seul - nous allons aborder la question de savoir s'il est possible de garder le cerveau très jeune. Ceci n'a probablement jamais été abordé ni par les scientifiques, ni par les gourous ni les religieux. Je n'en sais rien, s'ils l'ont fait, je l'ignore. J'aimerais aussi aborder la question de la continuité, de la progression, et de la mort. Et voir s'il nous est possible à nous, êtres humains, dans notre vie courante, quotidienne, d'avoir le coeur comblé, de connaître, d'être éveillé, d'avoir la conscience habitée par la qualité d'amour. Et aussi, si nous avons le temps de la partager, aborder la question de la méditation, un esprit en état de méditation, pas ce qu'est la méditation, ni comment méditer, mais la nature d'un esprit totalement engagé dans la méditation. La méditation, quand elle est pratiquée consciemment, délibérément, n'est pas du tout la méditation. Nous allons, si possible, aborder toutes ces choses cet après-midi.
4:20 Nous allons donc d'abord discuter ensemble pour voir si le cerveau, qui fait partie de la totalité de l'esprit, avec son aptitude à penser, à emmagasiner énormément d'informations, de savoir, d'expérience, de génération en génération depuis des millénaires, si ce cerveau, qui est si lourdement conditionné, qui s'use donc continuellement, si le cerveau peut s'auto régénérer. C'est très complexe, vous savez, déjà la question en elle-même : on est certain que cette question a dû être posée, de diverses façons, mais n'a jamais été approfondie. Si nous pouvions être sérieux pendant au moins 10 minutes et prêter une attention profonde non à ce que je dis, non à ce que décrit ou étudie l'orateur, mais en entreprenant ensemble un voyage dans tout le contexte de ce cerveau, si ancien, si extraordinairement capable, aux aptitudes infinies, qui a évolué dans le temps, acquérant énormément d'expérience, de savoir, afin de découvrir si un tel cerveau - le vôtre, pas le mien, le vôtre - peut se libérer du poids de la continuité, effacer la continuité pour recommencer à zéro. Je ne sais si vous suivez tout ceci.
7:22 Les chercheurs avec qui l'orateur s'est beaucoup entretenu soutiennent que le cerveau comporte deux parties, la droite et la gauche. La gauche détenant l'information, le savoir, la technique, tout le savoir et le processus actif; et l'autre, la droite, est nouvelle, pas trop conditionnée, et ce cerveau-là, pas trop conditionné, va de l'avant, modelant, contrôlant ou dirigeant la partie gauche. Vous comprenez tout ceci? Je ne suis pas un spécialiste du cerveau et je n'ai pas lu tous ces livres, mais on peut observer quelque chose de tout à fait différent, et c'est la totalité du cerveau, pas le gauche ou le droit, mais la qualité du cerveau qui a évolué à travers diverses expériences, diverses cultures, diverses frontières raciales, diverses pressions sociales et économiques. Ce cerveau est un instrument extraordinaire. Et ce cerveau qui contrôle toute notre pensée, toutes nos activités, tous nos fonctionnements sensoriels, etc., ce cerveau peut-il devenir totalement innocent. Je me sers du mot 'innocent' - attention je vous prie - pas l'innocence dans le sens chrétien - l'agneau et tout ça - nous nous servons du mot 'innocence' tel qu'il nous vient du latin, qui veut dire 'ne pas blesser'. Ne pas blesser, c'est-à-dire un cerveau non seulement incapable de blesser autrui mais encore incapable d'être blessé. Vous comprenez?
10:29 Je vous en prie, ne vous contentez pas d'être en accord avec des mots. Mais observez votre propre esprit, votre propre cerveau, car nous abordons quelque chose de très, très subtil, de très difficile, et, faute de l'observer vous-même, vous passerez à côté de tout cela. Vous devez l'entreprendre, vous devez travailler avec l'orateur, et non vous contenter d'écouter et passer à autre chose. Nous posons une question très, très sérieuse. Nous lançons un défi au cerveau lui-même pour qu'il découvre s'il a l'aptitude, l'énergie, l'ardeur, l'intensité de briser cette continuité du passé, avec toute son expérience accumulée, et dans l'acte même d'y mettre fin, les cellules cérébrales elles-mêmes subissent une transformation. Comprenez-vous ma question? Comprenez la question d'abord, s'il vous plaît, avant de vous dire d'accord ou pas d'accord. S'il se trouvait au moins quelques personnes avec qui discuter !
12:12 La pensée est un processus matériel car la pensée est issue de la mémoire, de l'expérience, du savoir accumulé dans le cerveau, dans les cellules cérébrales elles-mêmes - nous nous en tiendrons au cerveau, c'est bien assez. Et il a fonctionné dans une certaine direction, évoluant continuellement, et la pensée est un processus matériel - il n'y a aucun doute là-dessus, la mémoire faisant partie du cerveau, et le cerveau est matériel - Ce cerveau contient la mémoire, l'expérience, le savoir d'où émerge la pensée, la pensée est donc un processus matériel. Et la pensée a sa propre continuité car elle est fondée sur le savoir, c'est-à-dire le passé. Le passé est tout le temps en opération, se modifiant dans le présent et continuant, il y a donc un mouvement continu qui est le mouvement du cerveau. Vous suivez tout ceci? Je vais poursuivre. Et, dans cette continuité, le cerveau a trouvé la sécurité. Observez-le vous-même. Une tradition ininterrompue - valeurs, opinions, jugements, évaluations conclusions, et ainsi de suite - une tradition ininterrompue qui conditionne le cerveau et cette continuité relève du temps, c'est une durée, et ainsi dans cette durée, cette continuité, le cerveau a trouvé une sécurité. Vous suivez tout ceci? Observez-le vous-même, Monsieur, il s'agit de votre vie, pas de la mienne, pour l'amour du ciel ! Observez-le vous-même. Donc, en cette continuité, il se sent intensément en sécurité, parce qu'il ne peut fonctionner qu'en étant totalement en sécurité, sécurité dans une croyance, sécurité dans une illusion, sécurité dans certaines formes de savoir. Voilà ce qui se passe en nous. Donc, le cerveau a besoin de sécurité. C'est clair. Vous pouvez l'observer vous-même, le fonctionnement de votre propre pensée, du mouvement de la pensée. Toute perturbation dans cette continuité, ou bien rend le cerveau névrosé - quand il est profondément secoué, on appelle cela un trauma - ou, face à un grand défi, il ne peut l'affronter adéquatement, et, ne pouvant y faire face, il découvre que cette sécurité qu'il a recherchée dans la continuité est ébranlée. Vous suivez tout ceci? Observez-le. C'est tellement évident. Quand vous l'approfondissez avec grand soin, tout devient très simple.
16:55 Nous demandons donc ceci : le cerveau - votre cerveau, le cerveau de tous les êtres humains - qui a évolué pendant des temps immémoriaux, conditionné par les cultures, les religions, les pressions économiques et sociales, ce cerveau a eu une continuité illimitée jusqu'à ce jour et il a trouvé un sentiment de sécurité dans cette durée. Voilà pourquoi vous acceptez la tradition. Sécurité dans la tradition, sécurité dans l'imitation, sécurité dans la conformité, et il y en a aussi dans l'illusion. Evidemment. Tous vos dieux sont évidemment des illusions, érigées par la pensée. Il y a donc non seulement la continuité évidente dans laquelle le cerveau cherche la sécurité, mais il la trouve aussi dans toutes sortes d'activités illusoires de notre vie quotidienne. Une croyance, ou une foi, sont des illusions. Il n'y a aucun besoin de croyance ou de foi, mais quand on a foi en Dieu, en Jésus, en Krishna, en qui vous voudrez, cette foi, cette croyance, cette dévotion renferment un sentiment d'être protégé, d'être dans le giron de Dieu, ce qui est une illusion. A présent, nous demandons si le cerveau peut découvrir la fin de cette continuité de temps, car la continuité de temps est considérée comme une avancée, un progrès, une évolution, une évolution basée sur la continuité du savoir. Et nous remettons cela en question !
20:40 Il nous faut donc prendre en compte ce qu'est la mort. Vous comprenez? Je vous en prie, ne vous laissez pas stimuler par l'orateur, car, si vous êtes stimulés, par l'orateur, cette stimulation disparaît quand vous quittez ce lieu. Mais si vous prenez part effectivement à ce défi, à ce mouvement, alors celui-ci vous appartient, il sera durable, il va se maintenir. Mais si vous êtes stimulés, c'est comme prendre une drogue, du whisky ou autre chose, cela vous stimule momentanément, mais disparaît. Alors je vous prie, ne soyez pas stimulés par l'orateur. Si vous êtes stimulés par l'orateur, vous dépendrez de lui, il devient alors l'autorité, et votre sale petit gourou, et je ne suis pas votre gourou, car tout ceci demande que vous soyez votre propre lumière, et non la lumière d'un autre.
22:22 Nous devons donc aborder cette question car elle fait partie du cerveau, vous comprenez? La mort. La mort signifie la fin totale et la destruction du cerveau. N'est-ce pas? Parce que l'oxygène ne peut plus irriguer le cerveau, et tout le reste. La mort implique une fin, la fin d'une continuité de vie, de la vie que vous menez à présent - vous suivez tout ceci? - votre vie, et, à l'opposé de la vie, la fin. N'est-ce pas?
23:23 Il faut donc commencer par examiner la continuité de ce que l'on appelle vivre, et sa fin, que l'on appelle la mort. Et pour examiner ceci, toute forme de peur, d'opinion, de jugement, d'évaluation, n'est d'aucun secours. Il nous faut examiner 'ce qui est', le 'ce qui est' de votre vie, de votre vie quotidienne. C'est un fait. Et à travers les âges, l'homme s'est cramponné à cette continuité, la continuité de la vie, la vie qu'il mène, espérant que la prochaine vie connaîtra de meilleures conditions, comme naître dans un palais, ou avoir davantage d'argent, être plus beau, avoir de meilleures opportunités et tout cela. Nous demandons donc quelque chose de très clair, c'est d'observer, d'examiner ce que l'on appelle vivre, c'est-à-dire notre relation, nos ambitions, notre avidité, notre désir de pouvoir, de statut social, notre anxiété, peur, plaisir, souffrance, attachement et détachement, la lutte entre les opposés, les contradictions. Telle est notre vie, avec tous les dieux, les superstitions, les idéaux, l'espoir que nous serons un jour tous frères - tout cela. Voilà ce qu'est notre vie quotidienne. Et cela s'est perpétué de génération en génération. Observez le, je vous prie, c'est incroyable, ce que nous faisons.
25:55 Et nous demandons : quel est le sens de la mort et quel est le sens de la vie? Nous avons placé la mort à l'opposé de la vie. Il y a donc la peur de ce que nous appelons vivre, évitant ou retardant autant que possible ce que nous appelons la mort. Donc, continuité dans le temps, continuité dans notre souffrance, continuité dans notre peur, continuité dans nos attachements, - suivez tout cela attentivement, je vous prie - et quand cet attachement est contrarié, rompu, encore une fois une nouvelle continuité, un nouvel attachement. La continuité suppose le temps. N'est-ce pas? Le temps est le mouvement de la pensée. Temps signifie mouvement. Aller d'ici à là, cela prend du temps, comme psychologiquement pour passer de ce qui n'est pas beau à ce qui est beau. Donc le mouvement de la continuité est le temps, et ce mouvement est la pensée. N'est-ce pas? Et voilà ce qu'est notre vie. Votre vie, pas la vie idéaliste, pas la vie dans les cieux ou moksha, ou la libération, ou l'idéal d'une vie non-violente et toutes les inventions crées par la pensée en vue d'échapper à la réalité de la vie quotidienne.
28:31 Nous demandons donc si cette vie, avec toute sa confusion, tout cela, peut-il cesser, pour découvrir ce qu'est la mort. Vous avez compris? Bien, Monsieur? Je vais vous le montrer. Allez doucement.
29:07 Nous sommes attachés à une maison, à une personne, à une croyance, une conclusion, un concept, un idéal, etc. Nous sommes attachés. En analysant, vous êtes attaché, car intérieurement vous êtes désespérément seul, et étant seul vous cherchez un moyen d'échapper à ce sentiment d'isolement total. Vous suivez? C'est ce qu'on appelle la solitude. Vous avez certainement éprouvé, vous avez dû connaître cela si vous avez tant soit peu observé. Et ainsi vous vous attachez à quelque chose, en général à une personne, un idéal ou à une expérience vécue.
30:09 Maintenant, l'attachement implique la continuité, n'est-ce pas? Le mot lui-même suppose la durée. Quand vous utilisez le mot 'relation', avoir une relation avec ma femme - pas la mienne - avec la femme ou avec le mari, la dépendance elle-même, l'attachement implique le temps, une durée. Suivez-vous tout ceci? Cela devient-il un peu difficile? Dieu merci. Un instant, Monsieur, peut-être suivez-vous verbalement, mais le mot n'est pas la chose. La description n'est pas la chose décrite. Veuillez ne pas perdre de vue que le mot n'est pas la chose et, si vous êtes captif du mot, vous manquerez la réalité de la chose. C'est ce que vous avez fait. C'est le rôle de l'intellect qui apprécie la stimulation des mots et se fixe sur cette stimulation, et c'est par ce fonctionnement intellectuel que vous avez créé un tel chaos dans le monde. Car l'intellect ne représente qu'une partie, il n'est pas le tout. Quand la partie domine, il y a inévitablement division, cruauté, violence, et voilà ce que l'intellect a fait dans le monde. L'intellect a inventé l'hindou, le bouddhiste, le chrétien le musulman, le juif, l'arabe, et ils se prennent tous à la gorge. Et avoir accordé tant d'importance à l'intellect a produit beaucoup de malheur en ce monde. Ce qui ne signifie pas pour autant que nous devions tous devenir des abrutis. Au contraire, nous indiquons que lorsque l'intellect - qui n'est qu'une partie - lorsque cette partie domine, il y a inévitablement décadence, dégénérescence, et c'est bien ce qui a lieu dans le monde.
32:59 Maintenant, nous disons que l'attachement, ce mot même implique un sentiment de permanence, un sentiment de continuité, une qualité de durée, et grâce au temps, à la durée, nous escomptons une relation permanente, solide, sûre. N'est-ce pas? La mort vous dit : 'mets-y un terme'. Voilà ce que signifie la mort : 'mets un terme à ton attachement, complètement'. C'est ce qui va se passer quand vous cesserez de respirer. Vous allez devoir tout laisser derrière vous. C'est comme le riche qui disait : 'au moins je peux l'avoir jusqu'au dernier moment'. D'accord? Alors observez bien, je vous prie.
34:20 Pouvez-vous connaître les implications et les conséquences de l'attachement à une maison, à des biens, à votre femme, à une croyance, à un concept, à une opinion, à un dieu - l'attachement? Pouvez-vous en voir les implications qui sont la peur, la jalousie, l'anxiété, vous pourriez être perdu, etc.? Pouvez-vous, tout en écoutant en ce moment, mettre complètement fin à votre attachement? Maintenant, vous ne hochez plus la tête ! C'est cela le test, et vous refusez d'en faire l'essai.
35:21 Nous disons donc que lorsque le cerveau a une continuité, il devient mécanique. Et toute pensée est alors mécanique. Il n'y a pas de nouvelle pensée, car toute pensée repose sur la mémoire, laquelle est la réponse du savoir, etc. Il n'y a donc pas de nouvelle pensée.
35:58 Donc la mort implique la fin de l'attachement. Ce n'est que dans la fin qu'il y a un commencement. Vous comprenez? C'est une chose sérieuse, ne jouez pas avec les mots. Dès l'instant où il y a cessation, quelque chose de nouveau a lieu. Mais s'il y a continuité il n'y a rien, il n'y rien de nouveau sous le soleil. Et cette cessation est très importante car ce n'est qu'à ce moment là que le cerveau peut découvrir par lui-même une qualité de mouvement qui ne se situe pas dans le passé. Je me demande si j'explicite tout ceci. D'accord? Suivez-vous, Monsieur? Sommes-nous un peu en communication?
37:28 La mort implique donc la fin, non seulement celle de l'organisme physique, mais encore de tout ce que l'homme a accumulé. Si cette fin n'intervient pas, se pose toute la question de ce qu'il advient de l'esprit, du mouvement de la conscience - pas de la vôtre ou de la mienne - la conscience de l'homme, qu'advient-il d'elle? Vous comprenez ma question? Non, vous ne la comprenez pas. Voyez-vous, il nous faut expliquer chaque petit détail et vous ne saisissez pas rapidement. Monsieur, notre vie quotidienne est comme un grand fleuve - observez bien - comme un grand fleuve, la vie de tous les humains est ainsi, avec toutes ces complexités, ces problèmes, ces douleurs, ces souffrances, ces angoisses - tout cela c'est le fleuve dont nous faisons partie. Quand la partie meurt, le courant continue. La manifestation de ce flot, c'est vous, avec votre nom, vos caractéristiques, mais vous faites néanmoins partie de ce courant. Saisissez-vous, suivez-vous, Monsieur? Partie du courant. Et nous parlons de la cessation de ce courant - vous suivez? - de sortir complètement de ce courant, de ne jamais lui appartenir, car ce courant est conflit, confusion, douleur, attachement, détachement, le vrai, le faux - vous suivez? - cette lutte sans fin en soi-même. Nous disons donc, pendant que vous vivez, conscients, éveillés, plein de vos histoires, de vos activités, tout cela, voir que mettre volontairement fin à quelque chose, sans motif, mettre volontairement fin à l'attachement est le commencement de quelque chose de totalement neuf. Vous avez saisi? Car le 'je', le 'moi', est une continuité. Le 'je' a été génétiquement transmis au cours des millénaires, de génération en génération, c'est une continuité. Ce qui est continu est mécanique, il n'y a rien de neuf là-dedans. N'est-ce pas? Ce serait merveilleux si vous pouviez appréhender ceci.
41:28 Maintenant il y a autre chose. Il y a continuité tant que le cerveau - veuillez écouter calmement ne soyez pas d'accord, écoutez seulement - tant que le cerveau enregistre. N'est-ce pas? Vous suivez ceci? Tant que j'enregistre les blessures, la douleur, le cerveau enregistre tout cela et cela lui donne une continuité. Cela donne l'idée que 'je continue', et cette continuité est considérée comme une diminution progressive, une fin graduelle du 'je'. Vous suivez? Tant que le cerveau enregistre comme un ordinateur, il est mécanique. Qu'on vous insulte ou qu'on vous loue, il enregistre. Et cela fait des millénaires qu'il enregistre. Vous suivez? C'est notre conditionnement, c'est tout notre mouvement progressif. Maintenant, nous demandons s'il est possible - écoutez d'abord la question - s'il est possible de ne pas enregistrer? Sauf ce qui est pertinent, et rien d'autre? Vous comprenez? Non, c'est assez difficile. Pourquoi devrait-on enregistrer quand on est blessé? Pourquoi enregistrer quand quelqu'un vous insulte ou vous flatte? N'est-ce pas? Je demande pourquoi? Et quand vous enregistrez, quand le cerveau enregistre, cet enregistrement empêche l'observation de l'autre qui a émis l'insulte. Ainsi, vous observez la personne qui vous a insulté ou qui vous a loué avec l'esprit, le cerveau qui enregistre, donc vous ne la voyez jamais réellement. Vous suivez ce que je dis? Allons, Messieurs! Votre cerveau enregistre, cet enregistrement est une continuité et il y a une sécurité dans cette continuité. Il dit : 'j'ai été blessé une fois, par conséquent je vais enregistrer cela, le conserver et ainsi éviter d'être blessé, tant physiquement que psychologiquement'. N'est-ce pas? Physiquement, c'est pertinent, mais l'est-ce psychologiquement? Vous avez compris ma question? On a été blessé. On a été blessé, la blessure est le mouvement du temps, la construction de l'image que vous avez de vous-même, quand l'image est égratignée, vous êtes blessé. Et vous serez toujours blessé tant que vous avez cette image. Alors est-il possible de ne pas avoir l'image et par conséqunet aucun enregistrement? Vous suivez tout ceci?
46:20 Car nous - écoutez attentivement s'il vous plaît - nous posons les fondements afin de découvrir ce qu'est la méditation. Car, si vous avez peur, vous aurez beau faire, il n'y a pas de méditation. Si vous êtes nationaliste, ambitieux, avide, si vous êtes ceci ou cela, vous aurez beau vous tenir sur la pointe des pieds pour le restant de votre vie, vous ne connaîtrez jamais la méditation. C'est pour cela que nous avons pris la peine de dire dès le début de ces causeries que la compréhension de soi fait partie de cette méditation, la compréhension de la souffrance, de la douleur, de la peur, de l'anxiété, pour que l'esprit, pour que votre conscience avec tout son contenu soit lavée. Nous demandons donc s'il est possible de ne pas enregistrer psychologiquement mais de n'enregistrer que le nécessaire et le pertinent? Car lorsque vous avez établi quand l'ordre règne dans notre vie - ce que nous avons très soigneusement approfondi l'autre jour- quand il y a ordre, il y a liberté. C'est l'esprit désordonné qui recherche la liberté. Quand il y a ordre total, cet ordre lui-même est liberté. Et nous disons : est-il possible de n'enregistrer que le savoir fonctionnel. Ecoutez ceci je vous prie. Détaillez-le avec moi. Enregistrer le savoir nécessaire, pertinent, pour mener une vie ordonnée dans le sens ordinaire du terme : se rendre au bureau, conduire une voiture, reconnaître sa femme ou son mari, reconnaître son nom, etc., un savoir pertinent, nécessaire. A présent, nous disons que, psychologiquement, intérieurement, il n'est ni nécessaire ni pertinent d'enregistrer. Mais est-ce possible? Vous comprenez, Monsieur? Vous pouvez voir cela intellectuellement, logiquement, ou verbalement, mais tomber sur cette chose et la voir se produire dans notre vie est une toute autre affaire. Je vais maintenant approfondir, si vous permettez, car j'ai tant de choses dont j'aimerais vous parler. Je souhaiterais pouvoir vous parler tous les jours, mais je ne peux pas. Et probablement ne souhaiteriez-vous pas que je puisse le faire !
50:39 Tout d'abord, pour pénétrer cela très profondément, il faut comprendre la nature de votre conscience. Je regrette de rendre la chose si difficile - elle ne l'est pas. Qu'est-ce que votre conscience? Vous êtes-vous jamais posé cette question? Votre conscience est son contenu. Nest-ce pas? Sans son contenu elle n'existe pas. N'est-ce pas? Vous le voyez? Allons, Monsieur. Aidez-moi ! N'est-ce pas? Donc le contenu constitue notre conscience. Le contenu est fait de notre tradition, de notre anxiété, de notre nom, de notre situation. Vous suivez? Le contenu c'est cela, et c'est notre conscience. Et la pensée n'étant pas satisfaite de cette conscience dit qu'il doit exister une supra-conscience, au-dessus de tout. Mais ce mouvement du bas vers le haut est encore le mouvement de la pensée. La pensée est un processus matériel. Par conséquent elle fait toujours partie de cette conscience. Je me demande si vous saisissez ceci. Vous comprenez? Vous l'avez compris? La pensée fait partie de cette conscience, bien qu'elle prétende qu'il existe une conscience infinie, une conscience cosmique, le suprême. Cela se situe encore dans le champ de cette conscience qui a sa continuité, et sa continuité est son contenu. N'est-ce pas? Voyez ceci, même verbalement, intellectuellement, c'est mieux que rien. Et cette conscience a sa continuité - l'attachement, et tout le reste.
53:05 Nous disons donc: cette conscience avec tout son contenu, qui fait partie du cerveau, qui fait partie de l'esprit, - l'esprit étant le cerveau, l'émotion, tout cela - l'esprit qui fait partie de cette conscience, toute cette conscience peut-elle prendre la mesure de son contenu, de sa durée, et prendre une fraction de cette conscience, l'attachement, et y mettre fin - vous comprenez? - volontairement. C'est-à-dire que vous cassez la continuité. Je me demande si vous suivez tout ceci? Ainsi, nous demandons s'il est possible de n'enregistrer que ce qui est nécessaire, pertinent - rien d'autre? Comprenez la beauté de cette question, ses implications, la profondeur de cette question. Nous disons que c'est possible. Je vais m'expliquer, mais l'explication n'est pas le fait. Ne vous laissez pas prendre par les explications. Par le biais de l'explication, venez au fait. Alors, l'explication est sans importance. Les commentateurs donnent des explications mais ils n'en viennent jamais au fait. N'est-ce pas? Nous disons donc que ce qui a une continuité est le mouvement du temps, le mouvement de la pensée, le mouvement du savoir provenant du passé, se modifiant dans le présent et continuant. C'est là tout le processus de l'enregistrement. N'est-ce pas? Suivez cela. C'est tout le mouvement de l'enregistrement par le cerveau, autrement, nous ne pourrions pas accéder au savoir. Tel est donc tout le mouvement, et nous disons que ce mouvement a débordé sur le champ psychologique. N'est-ce pas? On voit que le savoir est nécessaire, autrement, vous ne pourriez fonctionner, je ne pourrais parler - n'introduisons pas ici mon propre discours, c'est un autre sujet, follement intéressant si l'on veut s'y pencher, je ne vais pas l'aborder maintenant. Que disais-je?

Q:Le savoir est nécessaire pour fonctionner.
56:32 K:Nous avons dit que le savoir
56:37 est la continuité, et en cette continuité le cerveau a trouvé la sécurité et par conséquent il doit enregistrer. N'est-ce pas? Mais le savoir est toujours limité. Il n'y a pas de savoir omnipotent. Ainsi, ayant trouvé la sécurité dans le mouvement du savoir, le cerveau s'y agrippe et traduit chaque incident, chaque accident d'après le passé. Dés lors, le passé revêt une énorme importance pour le cerveau car le cerveau lui-même est le passé. Et votre propre intellect dit, comme nous l'avons expliqué logiquement, l'intellect dit - c'est une explication verbale - l'intellect dit : je vois très clairement que ce qui est continu n'a rien de neuf, n'y a pas de nouveau parfum, pas de nouveau paradis, pas de nouvelle terre, et l'intellect demande s'il existe une fin à la continuité qui ne mette pas le cerveau en danger - vous suivez? - car à défaut de continuité il est perdu. Donc l'intellect se dit à lui-même : si je mets fin à cette continuité, qu'y a-t-il alors? Le cerveau exige d'être en sécurité, que se passe-t-il alors? S'il peut trouver quelque chose dans la fin et le commencement il dit alors: très bien, je l'ai, me voilà en sécurité. Vous comprenez? Ainsi, le cerveau a dit : 'je ne puis fonctionner que dans la sécurité' vraie ou fausse, une sécurité, et la continuité m'a fourni la sécurité par le processus d'enregistrement'. Vous suivez? Le fait d'enregistrer lui a donné la sécurité. Et vous venez dire au cerveau de n'enregistrer que ce qui est nécessaire, pertinent, et rien d'autre. Vous comprenez ma question? Le voilà tout à coup perdu. Il dit : 'que voulez-vous dire par là?' Car il fonctionne à partir de la sécurité, et il dit :'donnez-moi une sécurité et j'y vais'. Vous comprenez ceci?
59:58 Je réponds qu'il existe une sécurité, mais pas de ce type-là. Elle consiste à mettre le savoir, la pensée à leur juste place. N'est-ce pas? La mise en ordre de la vie n'est possible que quand le cerveau a compris qu'il vit dans un désordre qu'il nomme sécurité. Et quand il se rend compte que la sécurité implique la mise en ordre de toute chose c'est-à-dire, tout ce qui est pertinent et rien d'inapproprié - vous suivez tout ceci? - alors le cerveau dit : 'j'ai compris, j'ai saisi'. Autrement dit, il a un insight dans le mouvement de continuité tout entier D'accord? Vous suivez? Il a un insight. Cet insight est l'émanation de l'ordre total, le cerveau a mis chaque chose a sa juste place. Se produit alors un insight total de tout le mouvement de la conscience. A partir de là, le cerveau n'enregistrera que ce qui est nécessaire et rien d'autre. Avez-vous saisi? Vous avez capté quelque chose? Cela entraîne une transformation de l'activité du cerveau, la structure même du cerveau se métamorphose, car voir une chose nouvelle pour la première fois met en marche un nouveau mode de fonctionnement. Vous comprenez tout ceci? Monsieur, votre bras : c'est la fonction qui a développé votre bras. N'est-ce pas? Donc quand le cerveau découvre, voit quelque chose de nouveau, une nouvelle fonction naît, un nouvel organe se met en place. Je me demande... Peu importe. Nous disons donc que, pour qu'un esprit, pour qu'un cerveau devienne très jeune, frais, innocent, vivant, juvénile, il est indispensable qu'il n'y ait pas la moindre mémorisation psychologique. Et nous devons aussi examiner ceci :
1:03:24 l'amour est-il situé dans cette conscience? Vous comprenez ma question? L'amour a-t-il une continuité? Commencez par écouter la question je vous prie. Ne soyez ni d'accord, ni... Ecoutez simplement. Nous avons dit que la conscience est une continuité, la tradition, tout cela. L'amour est-il dans ce champ, ou lui est-il totalement extérieur? Je pose la question, c'est un défi. Je ne dis pas qu'il l'est, ou qu'il ne l'est pas. Nous examinons la chose. Car, s'il se situe dans le champ de notre conscience, il fait toujours partie de la pensée, n'est-ce pas? Le contenu de notre conscience est échafaudé par la pensée : croyances, dieux, superstitions, traditions, et la peur, qui fait partie de la pensée. L'amour fait-il partie de la pensée - vous comprenez? - fait-il partie de cette conscience? En ce cas, l'amour serait désir, plaisir, sexualité et tout le reste? L'amour fait-il partie de ce processus de pensée? C'est-à-dire, l'amour est-il un souvenir? Vous suivez tout ceci? L'amour ne peut en aucun cas exister - ni naître comme la rosée du matin - si l'intellect est roi. N'est-ce pas? Et notre civilisation a rendu un culte à l'intellect. Elle l'a adoré parce qu'il a créé des théories : Brahman existe, Brahman n'existe pas, Dieu existe, Dieu n'existe pas, vous suivez? Il a créé les principes, les idéaux, l'unique suprême, ou le double suprême, ou le triple suprême. Nous vous demandons donc : l'amour fait-il partie de ce courant, de cette conscience? L'amour peut-il coexister avec la jalousie? L'amour peut-il coexister avec l'attachement à ma femme, à mon mari, à mes enfants? L'amour peut-il coexister avec l'évocation de l'acte sexuel, le souvenir, l'image, tout cela? L'amour a-t-il une continuité? Penchez-vous là-dessus, je vous prie. Découvrez-le, pour l'amour du ciel, car cette chose est absente de votre coeur, c'est pourquoi le monde est dans un tel désordre.
1:07:37 Pour trouver cet amour, le flot entier de la conscience doit se tarir, la conscience étant votre jalousie, vos antagonismes, vos ambitions, votre désir de situation, votre désir de grandir, de vous anoblir, et tout ça, votre quête de pouvoir - vous comprenez? Le pouvoir, qu'il s'agisse de 'siddhis', vous connaissez, la lévitation et de toutes ces choses là, ou le pouvoir, la situation, politique ou religieuse, ou le pouvoir sur votre femme, sur votre mari, vos enfants - tout cela. S'il y a la moindre trace d'égo, l'amour n'est pas ! Et l'essence de l'égo est le processus d'enregistrement. Et nous avons dit l'autre jour, hier, que la fin de la souffrance est le commencement de la compassion. Mais nous avons utilisé la souffrance comme un moyen de faire des progrès, pour devenir meilleur, toujours meilleur. Au contraire, sa cessation permet l'émergence de quelque chose d'infiniment nouveau. Maintenant.
1:09:27 Maintenant nous pouvons parler de la méditation. Ne prenez pas de posture. Ne vous redressez pas soudain en vous disant : 'je vais méditer'. Soyez confortable, c'est tout. La méditation implique plusieurs choses. Il faut d'abord qu'il y ait de l'espace, non seulement de l'espace physique mais de l'espace dans l'esprit, ce qui veut dire : pas d'occupation. Vous comprenez? Est-ce que vous comprenez ceci? Parce que nos esprits sont tous occupés : 'comment pourrais-je cesser de bavarder', 'je dois m'occuper de trouver de l'espace', 'je dois être silencieux' - vous suivez? - occupé, comme la ménagère dans sa cuisine, ou avec ses enfants, comme le dévot avec son dieu, l'homme avec son occupation, sa sexualité, son emploi, son ambition, sa situation. L'esprit est pleinement occupé, donc il n'y a en lui aucun espace. Vous suivez? Nous avons établi l'ordre dans notre vie, pas l'ordre de la discipline, de la maîtrise - c'est exclu. Mais nous avons établi l'ordre car nous avons vu intelligemment que l'ordre ne peut provenir que de la compréhension du désordre. Nous avons vu cela, je ne vais pas y revenir.
1:11:57 Nous avons donc établi l'ordre dans notre vie, l'ordre dans notre relation, ce qui est très important car la vie est relation, c'est un mouvement, un acte de relation. S'il n'y a pas d'ordre dans votre relation avec votre femme, votre mari, vos enfants, votre voisin, proche ou lointain, ce n'est pas la peine de méditer. Car si vous essayez de méditer avec le désordre dans votre vie, vous tomberez dans le piège des illusions. Voilà donc pourquoi, tout au long de ces causeries, si vous avez été sérieux, si vous avez suivi, nous avons établi l'ordre, l'ordre absolu, pas un ordre temporaire, l'ordre absolu. Cet ordre-là peut se tourner vers l'ordre cosmique. Vous comprenez? Il a un lien... - il ne faut pas aborder cela - permettez-moi d'en parler un peu. Cet ordre-là à un lien avec l'ordre cosmique. L'ordre cosmique, c'est le coucher du soleil, le lever de la lune, le merveilleux ciel du soir avec toute sa beauté. Se contenter d'examiner l'univers avec un télescope n'est pas l'ordre. L'ordre est ici, dans notre vie. Un lien extraordinaire existe alors entre cet ordre et l'univers. Vous comprenez tout ceci? Cela ne fait rien.
1:13:52 Donc,quand un esprit est occupé, il n'y a ni ordre, ni espace. Quand l'esprit déborde de problèmes, comment peut-il y avoir de l'espace? Chaque problème qui surgit doit être résolu immédiatement pour qu'il y ait de l'espace. C'est une partie de la méditation : ne pas véhiculer ses problèmes, jour après jour, après jour. L'autre jour j'ai rencontré une dame qui m'a dit : 'quand vous étiez un petit garçon vous m'avez blessée psychologiquement et je porte encore cette blessure'. Une blessure de 60 ans ! Oh, vous ne voyez pas ceci. Alors, est-il possible de ne pas être occupé, ce qui ne veut pas dire irresponsabilité, vous comprenez? Au contraire, quand vous n'êtes pas occupé, vous portez votre attention sur la responsabilité. Car l'esprit occupé est confus, du coup la responsabilité devient une chose laide, il peut s'y mêler de la culpabilité et tout cela. Alors, s'il vous plaît, ne demandez pas comment ne pas être occupé. Si vous me priez de vous donner un système, une méthode, et toutes ces choses, vous allez vous occuper du système, de la méthode, des slogans et du reste. Mais si vous voyez, si vous avez un insight, si vous voyez qu'un esprit occupé est un esprit destructeur, il n'est pas un esprit libre, il n'a pas d'espace, si vous le voyez, cela a lieu.
1:16:11 La question suivante concerne l'attention, l'inattention et la distraction. Vous suivez? Attention, inattention, concentration et distraction. Etes-vous fatigués? Nous disons qu'il n'y a pas de distraction du tout. Examinez ce point très attentivement, je vous prie. C'est une chose qui n'existe pas. Je vais m'expliquer, je vais approfondir. C'est quand vous essayez de vous concentrer, et seulement là, qu'il y a distraction. N'est-ce pas? La pensée dit - écoutez attentivement, je vous prie - la pensée se dit : je vais me concentrer sur une image, une idée, le mot OM ou quoi que ce soit, je vais me concentrer là-dessus, et elle y focalise son énergie. Mais la pensée se met à vagabonder, et se dit alors : c'est de la distraction, je dois revenir à cela. Tous deux sont le mouvement de la pensée. Suivez-vous tout ceci? Il n'y a donc pas de distraction, ce n'est qu'un mouvement de la pensée. N'est-ce pas? Et la concentration implique un enfermement, une résistance. N'est-ce pas? Donc, là où il y a concentration - la pensée qui focalise son énergie sur une chose particulière, une image ou un autre sujet qu'elle a choisi - au sein de cette concentration, la pensée se met à dériver et c'est ce que vous appelez la distraction, pourtant la concentration comme la dérive font partie de la pensée, sont la pensée. Alors ne dites jamais : 'j'ai une distraction', vous éliminerez ainsi le conflit entre la concentration et la distraction. Vous saisissez? Allons, Messieurs. Et, si vous avez compris cela, venons-en alors à l'attention.
1:19:26 Prêter attention - le faites-vous en ce moment? Prêter attention, ce qui signifie quoi? Si vous prêtez réellement une profonde attention, il n'y a pas de centre à partir duquel vous êtes attentif. N'est-ce pas? Vous comprenez? Et cette attention n'est pas continue - comme vous le voudriez. N'est-ce pas? Vous suivez? La continuité est inattention. Avez-vous compris cela? Je vais l'expliquer. Quand vous faites attention, c'est-à-dire que vous écoutez - je vais expliquer ce que signifie écouter, l'art d'écouter, l'art de voir, l'art d'apprendre. C'est le mouvement complet de l'attention. Dans cette attention, aucun centre pour dire j'apprends, j'écoute, je vois. Il n'y a que cet immense sentiment de plénitude qui observe, qui écoute, qui apprend. Dans cette attention, aucun mouvement de pensée. - je ne sais si vous l'avez remarqué, il n'y a aucun mouvement de pensée. Cette attention ne pouvant être soutenue, la pensée dit alors : je dois découvrir comment revenir à cette attention. Cette digression, ce mouvement qui veut recapturer l'attention est de l'inattention, un manque d'attention. Vous avez compris ceci? Alors, prendre conscience de ce mouvement qui s'écarte de l'attention, c'est être attentif. Avez-vous capté cela? L'avez-vous compris? Donc, nous disions que l'esprit doit avoir beaucoup d'espace,
1:22:18 un espace sans limite, et cela ne peut être que si l'esprit ne bavarde plus, plus de problèmes, ils ont été résolus, et l'esprit est également paisible dans son sommeil, il ne rêve plus sans cesse, parce que vous résolvez les problèmes au fur et à mesure qu'ils surgissent. Je ne vais pas m'étendre là-dessus, ce serait trop long. Donc, avoir un grand espace, et cet espace n'est possible qu'en l'absence de centre. Dès l'instant où vous avez un centre, il y a forcément une circonférence, un diamètre, un mouvement de ce centre vers la périphérie. L'espace implique donc l'absence de centre. Par conséquent, il est absolument sans limite. Et nous disons que la concentration est une distraction de la pensée. La pensée elle-même est une distraction. Et l'attention implique que l'on consacre toute son énergie à écouter, à voir - n'est-ce pas? - et en cela il n'y a aucun centre. Voici donc un esprit qui a compris l'ordre, qui est délivré de la peur, qui a mis fin à la souffrance, qui a compris la nature du plaisir et l'a mis à sa juste place, etc. La question est alors : quelle est la qualité d'un esprit totalement silencieux? Pas : comment trouver le silence, la paix de l'esprit. C'est ce que vous voulez tous, la paix de l'esprit, et vous n'en obtenez qu'un petit bout. Nous parlons de la qualité d'un esprit absolument, intemporellement silencieux.
1:25:02 Il y a le silence entre deux notes, il y a le silence entre deux pensées, il y a le silence entre deux mouvements, il y a le silence entre deux guerres, il y a le silence entre mari et femme avant qu'ils ne commencent à se disputer, qu'il se passe plein de choses entre eux. Nous ne parlons pas de ces qualités de silence, ils sont éphémères et s'évanouissent. Nous parlons d'un silence non produit par la pensée, qui n'est pas cultivable. Il survient quand on a compris tout le mouvement de l'existence. Vous comprenez, Monsieur? Et alors, dans ce silence, il n'y a pas de questions/réponses, il n'y a pas de défi, il n'y a pas de recherche, tout a pris fin. Ce silence, si vous l'avez touché, porte un grand sentiment d'espace, de beauté, une sensation d'énergie extraordinaire; alors vient ce qui est éternellement, intemporellement sacré, qui n'est, ni le produit de la civilisation ni celui de la pensée. C'est tout le mouvement de la méditation.