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SA80T7 - Y a-t-il une chose sacrée dans la vie?
7e causerie
Saanen, Suisse
20 juillet 1980



0:19 Voici la dernière causerie. Il va y avoir des sessions de questions et réponses pendant cinq jours, de mercredi à dimanche inclus.
0:52 Nous avons parlé ensemble des complications de notre vie. Toute notre existence est si complexe avec toutes ses illusions, symboles, idées et images ainsi que nos propres ambitions personnelles nos attachements divers. Et le monde, dont nous faisons partie devient de plus en plus confus, brutal de plus en plus diviseur, destructeur dépourvu de toute moralité et notre société est très corrompue, comme le sont nos religions. Et quand on observe tout cela, comme on le doit, si l'on est sérieux que doit faire l'être humain? Que doit faire chacun de nous en ce monde fou? Allons-nous nous retirer dans quelque club religieux exclusif? Devenir une sorte de moine? Nous jeter à corps perdu dans une quelconque réforme sociale? Nous rallier au parti communiste ou à d'autres activistes politiques? Ou existe-t-il une manière totalement détachée de tout ceci totalement dissociée de tout ceci une façon de vivre totalement, complètement différente en ce monde? Voilà une vaste question qui demande une réponse sérieuse.
3:57 Chacun de nous - nous qui sommes des êtres humains vivant en ce monde qui sommes en fait l'humanité entière, globale - pouvons-nous ne pas nous engager dans un quelconque parti politique de gauche, de droite, du centre, et n'appartenir à aucune religion organisée, à aucun gourou à aucune communauté liée à un idéal à aucun système, aucune méthode, car ils sont tous devenus si corrompus. Et qu'allons-nous faire? Certains d'entre nous sont peut-être sérieux d'autres le sont à moitié, et le reste est superficiel. Si l'on est tant soit peu sérieux dans la mesure où l'on n'est engagé à rien parce que l'on a compris ce que signifie être engagé: être attaché à ses vêtements à un habit particulier que l'on porte après s'être rendu en Inde, et tout cela. N'appartenir à rien. Peut-on vivre en ce monde gagner sa vie être en relation avec d'autres êtres humains en étant si totalement libre? Alors seulement, peut-être, connaîtra-t-on l'amour. On a exercé son intellect, écrit des livres donné des conférences, converti les autres soit au communisme, soit à quelque forme de 'quakerisme' religieux. Et quand vient la désillusion on s'en écarte et les autres restent pris là dedans. C'est ce qui a lieu. Et il semble qu'il faille commencer par l'incertitude pour trouver la sécurité absolue, la certitude.
7:27 Comme nous l'avons dit l'autre jour, nous parlons ensemble. Vous n'admettez rien de ce que dit l'orateur. Vous commencez, je l'espère, à mettre en question en doute, non seulement ce que dit l'orateur mais encore vos propres activités votre propre type de drogue vous ne prenez peut-être pas de LSD - et il y a bien d'autres drogues: l'alcool, le tabac, vous savez, tout cela - mais vous pourriez aussi être drogué par la croyance par des idéaux par l'autorité de quelqu'un qui dit 'je sais, vous pas, je vais vous aider' ou, 'je vais vous indiquer la voie'. Ce sont là diverses formes de drogues parce qu'elles empêchent la clarté de notre propre perception.
8:58 Nous demandons donc ensemble ceci: est-il possible de vivre en ce monde sans aucun motif? Car l'amour n'a pas de motif. Si j'ai un motif pour vous aimer parce que vous avez bien voulu venir dans cette tente ou parce que je tire quelque avantage psychologique à m'adresser à vous je suis alors déjà corrompu, je suis déjà perdu. Et, à partir de cette corruption, on peut créer toutes sortes d'illusions toutes sortes d'idées, d'idéaux. Alors, peut-on être délivré de tout cela? Car nous allons bientôt discuter de ce qu'est la méditation de ce qu'est la religion, s'il existe quelque chose de sacré dans la vie que l'homme a recherché au cours des âges quelque chose d'au-delà de la pensée, du temps d'au-delà de tout le mal qu'a engendré l'intellect. Existe-t-il quelque chose d'incorruptible, d'intemporel d'au-delà de toute pensée? Cela, l'homme l'a recherché depuis des temps immémoriaux.
11:07 Et, pour autant que l'on soit un peu sérieux dans sa vie on voit combien celle-ci est vide. On pourrait revêtir toute sorte d'habits se laisser séduire par la rêverie par les fruits de l'imagination, les images et il importe d'autant plus de découvrir pourquoi les esprits humains ont créé des images, pas seulement là-bas dans les temples, les églises et tout le reste. Dans le monde islamique les mosquées ne sont pas emplies d'images mais elles ont leur propre imagerie les écritures qui se lisent de gauche à droite: une belle écriture, mais qui devient l'image, le symbole, l'idée. Donc, avant d'aborder cette question de la méditation, il faut se demander pourquoi nous créons des images... - vous comprenez? - des images d'après des idées des symboles, des concepts et nous vivons d'après des symboles, des images, des concepts. Pourquoi les êtres humains font-ils cela depuis des temps immémoriaux?
13:07 Je ne sais si vous avez observé que quand on est en relation avec quelqu'un, intimement ou pas l'esprit - la pensée a déjà créé une image. Evidemment, vous qui avez eu l'obligeance de venir ici vous avez déjà créé une image de l'orateur vous ne pouvez vous en empêcher. Vous l'avez comme vous avez une image de votre femme, de votre mari, etc. Pourquoi l'esprit - la pensée - le cerveau, crée-t-il ces images? Il est en effet très important de le comprendre parce que là pourrait se trouver la raison la cause de ce que les êtres humains n'aiment pas.
14:22 Le rhume des foins - je ne suis pas en train de pleurer.
14:35 Si vous vous êtes observé... - l'activité de votre propre pensée, esprit, cœur et cerveau... - votre relation comporte une image d'elle ou de lui - pourquoi? Comme nous l'avons dit, posez-vous cette question, je vous prie. Ce n'est pas moi qui vous la pose. Vous qui vivez en ce monde avec toutes ses divisions, gâchis, malheur absolu, dépression dégénérescence, pourquoi avez-vous une image? Le fait d'avoir une image de quoi que ce soit donne-t-il la sécurité? Vous comprenez ma question? On se sent en sécurité quand on a une image de l'autre, on se sent sûr. Car l'autre, bouge, vit, se débat, pousse et, si vous n'avez pas d'image de cette personne il faut alors que votre esprit et votre cœur que tout soit extrêmement actif. Et nos esprits sont généralement paresseux embrumés, dans les nuages sans aucune subtilité, sans mouvement, sans rapidité. Donc, le fait d'avoir une image d'un autre donne une grande sécurité.
16:51 Vous, qui avez l'amabilité d'écouter l'orateur vous avez une image de lui - inévitablement sinon vous ne seriez pas ici: la notoriété, et toutes ces absurdités. Ainsi, ayant une image, on a le sentiment de connaître. Vous ne me connaissez pas, moi l'orateur ni votre femme, ni votre mari, ni votre ami mais l'image que vous avez fait que vous pensez connaître. Ainsi, par l'image, le savoir devient un sentiment de bien- être, de sécurité d'où une dégénérescence progressive du cerveau, de l'esprit parce que, devenant alors paresseux, vous l'acceptez vous ne mettez jamais en question, en doute l'image. L'image que le christianisme a imposée aux gens l'image des Hindous, des Bouddhistes, etc... - ces images donnent un sentiment de sécurité un sentiment de bien-être. Et donc, progressivement, l'énorme vitalité du cerveau dépérit peu à peu et dans ce dépérissement, qui est inconscient on se sent en sécurité, en sûreté, dans la tradition, statique.
19:10 Observez cela en vous-même, je vous prie, pas ce que dit l'orateur. S'il m'est permis de le suggérer, découvrez si c'est vrai ou non. Pas d'après ce que dit l'orateur mais voyez si l'image que vous avez n'est pas en train d'endormir votre esprit si cette image n'est pas en train d'empêcher l'extraordinaire floraison de l'amour. Car, sans cette qualité, cette fleur étrange il est impossible d'avoir l'ordre dans sa vie, donc l'ordre extérieur. La société est créée par chacun de nous. Elle n'est pas la création de quelques étranges individus d'un lointain passé ou de quelque dieu surhumain mais la société dans laquelle nous vivons est créée par les êtres humains par leur ambition, leur avidité par leur concurrence, leur lutte continuelle par leur vanité, leur agression, et ainsi de suite. La société est donc ce que nous sommes. Et il est important de comprendre ceci: si nous n'amenons pas en nous-mêmes une transformation radicale nous vivrons toujours dans une société corrompue. Et cette corruption engendre donc le danger le terrorisme, le communisme et tous les facteurs de division de la société. Je vous en prie, faites attention à tout ceci. Il s'agit de votre vie.
21:53 Nous demandons donc s'il est possible de vivre en cette vie sans la moindre image. Autrement dit: y a-t-il une sécurité au-delà de l'image? Vous comprenez ma question? Existe-t-il une sensation de bien-être .le sentiment de ne pas être psychologiquement vexé, blessé? Existe-t-il un tel état de complète sécurité pas la sécurité engendrée par la pensée au moyen de l'image, du symbole de conclusions diverses, d'idéaux, et ainsi de suite qui ne donnent pas de sécurité mais donnent l'illusion d'être en sécurité? Vous suivez tout ceci? Oh, grands dieux, avançons-nous ensemble? Il est très difficile de parler ou de tenir une réunion sérieuse avec tant de monde car nous pensons tous à tant de choses différentes. Chacun se préoccupe de ses propres problèmes, de ses propres désirs de ses propres recherches vous êtes lié à ce gourou-ci, ou à cette idée là alors, vous vous contentez de venir nous écouter, approuvant désapprouvant, poursuivant négligemment votre chemin. Mais si l'on est sérieux - et la vie l'exige non seulement au vu de l'état actuel du monde de ce que les gens font de nos jours et de ces gens eux mêmes - si l'on n'est pas conscient de tout cela c'est-à-dire de ce qu'il y a en soi l'on vit alors en amenant la corruption, la dégénérescence.
24:34 Est-il donc possible que l'esprit et le cœur et donc le cerveau, que toute la structure psychologique humaine dont vous faites partie que la totalité de cette conscience soit radicalement changée? Notre conscience est faite de son contenu. N'est-ce pas? Vous suivez ceci? Notre conscience se compose de nos croyances, nos désirs, nos anxiétés peurs, plaisirs, hypocrisie, vanité nos dieux, nos croyances - tout cela est notre conscience. Et nous vivons, fonctionnons au sein de cette conscience. Je ne dis rien de très étrange. Peut-être cela vous paraîtra-t-il étrange parce qu'il se peut que vous l'entendiez pour la première fois ou que vous y ayez réfléchi un peu mais sans l'avoir suffisamment approfondi. Vous pouvez douter de ce qui est dit mais ce qui est dit est ce que vous êtes. Si vous doutez de ce que vous êtes, c'est-à-dire votre conscience laquelle est son contenu, si vous doutez de cela en commençant à le mettre en question alors peut-être, l'esprit pourra-t-il aller au-delà de cette conscience. Vous comprenez ce que je dis? Vous suivez? Nous parlons l'un à l'autre. Nous ne promulgons pas de loi. Nous désignons la loi des conséquences naturelles la loi selon laquelle là où il y a une cause, il y a une fin. C'est une loi. Vous pouvez en douter autant que vous voulez mais vous pouvez l'étudier, l'approfondir, mettre cela en doute, chercher questionner et vous découvrirez que c'est un fait. Non à cause de ce qu'en dit l'orateur, mais parce que cela va de soi. Soit vous écoutez avec une telle attention que vous en captez le sens, la signification et les conséquences, soit vous voulez des explications. Et quand vous dépendez d'explications voyez ce qui se passe dans votre esprit - écoutez bien: quand vous vous contentez d'explications vous vous contentez uniquement de mots ce qui revient à accepter le mouvement intellectuel. Tandis que si vous commencez à examiner la nature de votre propre conscience qui est la conscience de l'humanité... - comprenez-le bien, je vous prie -
28:58 ce n'est pas votre conscience car si vous vous rendez à l'étranger, en Inde, en Asie chez tous les gourous du monde, les prêtres vous découvrirez que tous ont en commun ce fond de conscience: ils souffrent, ont leurs prétentions, leurs vanités ce sentiment de toujours gravir l'échelle l'échelle du paradis ou l'échelle de la réussite matérielle. Cette conscience est donc la conscience commune de toute l'humanité. Vous comprenez, Monsieur? Il en est ainsi. Vous pouvez en douter. Doutez-en, questionnez-le, creusez-le. Ne dites pas 'j'en doute', pour ensuite le rejeter. Ce serait plutôt puéril. Mais dites plutôt: 'en est-il ainsi tous les êtres humains passent-ils par les mêmes anxiétés les mêmes poursuites, les mêmes dépressions?' Cela peut varier, mais la dépression est la dépression l'anxiété est l'anxiété, qu'elle soit occidentale ou orientale mais c'est toujours la sensation d'être anxieux, incertain, désespéré qui est commune à toute l'humanité. Et quand vous réalisez qu'elle est commune à toute l'humanité prenez vraiment conscience que ce n'est pas qu'une idée un concept, une image, quand vous avez vraiment réalisé intérieurement que vous êtes comme tout autre être humain bien que vous puissiez différer par votre visage, votre éducation votre culture extérieure que vous puissiez adorer de telle ou telle façon il y a en vous comme une flamme brûlante.
32:13 Et nous demandons si ce contenu peut être entièrement vidé. S'il n'est pas vidé vous voilà alors repris par l'ancien mode d'existence avec sa peine, ses cruautés ses vanités, ses intolérables dangers. Donc, si vous voulez approfondir sérieusement cela parlons-en ensemble. C'est cela, la méditation et non de rester assis en tailleur, comme vous l'avez appris en Inde. Je ne sais vraiment pas pourquoi vous allez en Inde. C'est le pays le plus dangereux qui soit. Je l'entends vraiment ainsi. C'est le pays le plus dangereux qui soit pour les Occidentaux. Il est plein de romantisme - dans vos esprits plein de mystère plein de miracles qui s'y produisent plein de gourous qui ont - vous savez - atteint le haut de l'échelle et en leur présence vous sentez 'Oh mon dieu, j'ai accompli quelque chose'. Vous comprenez tout ceci? Romance, sentimentalité, vanité - tout cela est encouragé!
34:16 Vous savez, on raconte en Inde, l'histoire suivante: (Bruit d'avion) (Bruit de train, rires) Il n'y a plus d'endroit tranquille où l'on puisse aller. Dans le temps, c'était très tranquille ici, il y a vingt ans... - très tranquille, pas d'avions, pas de camions, la route était dure. Désormais, nous sommes devenus très civilisés et, donc, très bruyants.
35:27 Il y avait donc un jeune garçon d'environ seize ans dont la famille était très religieuse dans le sens orthodoxe qu'a ce terme en Inde. Le garçon était un Brahmane. Il dit à son père et à sa mère: 'je vous quitte parce que je veux trouver la vérité. Vous en avez discuté vous m'en avez parlé. Vos livres m'en ont instruit, mais je veux la découvrir'. Il se rend donc d'un gourou à un autre d'un maître à un autre et il parcourt toute l'Inde pendant cinquante ans. Et il ne la trouve pas. Il revêt toutes sortes de robes de couleurs différentes pas des saris, mais des vêtements de couleurs différentes et dit enfin: 'je ne l'ai pas trouvée et je ferais donc mieux de rentrer à la maison'. Il rentre donc. Et, comme il ouvre la porte, la voilà! Vous comprenez? Elle a toujours été là pas parce qu'il a parcouru toute la terre mais elle est là, seulement nous ne savons pas regarder. Parce que nous autres, êtres humains, sommes l'histoire de l'humanité vous comprenez? Nous sommes l'histoire de l'humanité il y a en nous l'histoire de l'humanité. Mais nous ne savons pas lire ce livre alors nous disons 'dites-moi tout à ce propos, s'il vous plaît' pendant ce voyage inutile, nous demandons à tout le monde comment le lire, 'comment' - dites-le moi. Comprenez-vous ce que je dis? C'est là. C'est pourquoi la connaissance de soi est très importante non d'après quelque psychothérapeute non d'après divers philosophes car dans ce cas, c'est avec leurs yeux que vous vous observez et vous n'êtes donc jamais capable de lire votre propre livre c'est-à-dire le livre de l'humanité. Vous comprenez tout ceci, Messieurs?
38:50 Il s'agit donc de connaître, sans l'ombre d'un doute, sans la moindre illusion, sans aucune dissimulation, de connaître d'observer tout ce mouvement de la conscience, c'est-à-dire soi-même. Cela peut se faire très facilement. Inutile de s'éloigner de là où l'on se trouve d'aller au Nord, à l'Est, à l'Ouest ou au Sud, la chose est là où vous êtes. Mais là où l'on se trouve n'est pas très agréable. Ce n'est pas très encourageant. C'est plutôt ennuyeux. Tandis que là-bas, de l'autre côté de la rivière, c'est plus beau plus romantique, plus coloré et l'on construit donc un pont pour s'y rendre. Et quand vous y êtes, c'est toujours vous qui y êtes - vous comprenez? C'est toujours vous qui êtes là-bas. Alors, ne traversez pas le pont si je puis me permettre.
40:30 Est-il donc possible de se lire soi-même de lire à propos de soi jusqu'au dernier chapitre, au dernier mot? Cela demande de l'attention, de l'observation, pas de l'analyse. Observer simplement ce qui se passe sans aucunement orienter votre observation. Cet éveil constant à vos réactions, vos réflexes, votre vanité votre agressivité - contentez-vous de jouer avec cela. En jouant, en s'observant avec humour, comme dans un jeu on apprend bien plus, on observe bien davantage qu'en se démenant, qu'en disant 'je dois me connaître'. Et il est nécessaire que l'esprit et par conséquent le cerveau et le cœur soient libres de toute illusion avant de commencer à méditer. N'est-ce pas? C'est évident. Si vous vous asseyez en tailleur, en essayant de vous concentrer, de focaliser votre esprit de suivre un système, jour après jour votre esprit pourrait être, ou est encore dans l'illusion et par conséquent, vos systèmes, vos respirations, votre yoga tout cela renforce les illusions dont vous êtes captif. Vous comprenez tout ceci?
42:37 Monsieur, à New Delhi, en Inde j'avais l'habitude de me promener dans le jardin public un homme passait tous les jours à bicyclette en rentrant de son bureau. Il était pauvre. Il s'asseyait sous un arbre y appuyant sa bicyclette et, très calmement répétant un certain mantra... - vous savez ce qu'est un mantra, je vous l'expliquerai dans un instant - il se mettait dans un état d'hypnose. Vous comprenez? S'étant mis dans cet état, on pouvait voir sa lassitude à l'égard du bureau de la famille, de la misère quotidienne commencer à disparaître de son visage. Vous comprenez? Et son visage devenait très paisible, parce qu'il répétait s'hypnotisant, se libérant dans cette hypnose de ses désirs, de ses propres conclusions, il était totalement heureux. Vous comprenez ce que je dis? Ceci avait lieu jour après jour. Je séjournais là plusieurs mois d'affilée et j'observais tous les jours cet homme, samedis et dimanches compris. C'était sa drogue.
44:23 Donc, quand on médite, il faut qu'il y ait liberté absolue. Je sais que vous préférez l'autre sorte de méditation bien plus facile, totalement dénuée de sens, mais très réconfortante.
44:50 Maintenant, à propos du mot 'mantra' que des personnes ont obtenu pour 50 ou 300 dollars peut-être peu importe la somme et c'est devenu un terrible racket. Le mot 'mantra' signifie - si cela vous intéresse il signifie en Sanscrit peser, réfléchir, observer, veiller à ne pas devenir. Vous comprenez? Et 'tra', tout cela - laissons les détails de côté... - signifie que, s'il existe une quelconque activité égocentrique celle-ci est destructrice. Voilà le sens complet de ce mot 'mantra'. (Bruit de train) J'allais seulement dire 'allons dans l'Himalaya' (Rires) Là aussi il y a des mendiants. (Rires) Non. Il vaut bien mieux rester ici et affronter le bruit! Pardon! (Rires)
46:53 Nous disons donc que l'esprit doit être complètement libre de toute illusion n'avoir aucune image aucun motif vous comprenez? Ni image, ni motif, ni illusion. Une illusion, un motif, une orientation s'accompagnent du désir désir de trouver le paradis, de trouver l'illumination désir d'accomplir, d'éprouver des expériences. Vous comprenez? Je me demande pourquoi les êtres humains veulent des expériences. Vous comprenez ma question? Vous avez maintenant toutes sortes d'expériences: terreur, sexe, violence, oppression, dictature... - qu'elle soit de droite, de gauche ou du centre qu'elle soit communiste fasciste ou religieuse, toutes sont pareilles. N'est-ce pas? Je sais que vous n'admettrez pas ceci. Mettez en doute ce que je dis. Elles sont toutes pareilles. Elles veulent toutes façonner votre esprit. Elles veulent toutes vous contraindre à un certain système de pensée. Et si vous refusez c'est soit le camp de concentration, soit le peloton d'exécution ou l'asile psychiatrique. C'est ainsi que cela se passe.
49:12 L'esprit doit donc être totalement, complètement libre. Et tant que cela n'a pas lieu, ne méditez pas. Vous comprenez ce que je dis? Car cela n'a pas de sens. Je me souviens - pardon, pas d'anecdotes, n'est-ce pas? Juste celle-ci. (Rires) A Bénarès, nous regardions par la fenêtre un mendiant, vêtu d'une robe safran. C'est la robe du sannyasi, en Inde - Je ne sais si vous comprenez le sens du mot 'sannyasi'. Je vais vous le dire dans un instant. Il était ainsi habillé, et c'était un homme ordinaire, pauvre pas très cultivé, à en juger par son apparence et son parler. Il s'assit sous un arbre et se mit à chanter, à crier. Les passants le regardaient et continuaient leur chemin. Au bout d'une semaine - et je vous assure que je n'exagère pas - au bout d'une semaine, il portait des guirlandes autour de la tête les gens l'entouraient le saluant lui donnant de la nourriture s'agenouillant presque, et disant 'quel grand homme vous êtes'. Vous comprenez? Tout cela arriva en une semaine. Nous sommes si crédules. N'est-ce pas?
51:24 Ainsi, nous disons qu'un esprit libéré de tout ceci en vient alors à la méditation. Qu'est-ce donc que la méditation? Malheureusement, les Orientaux ou les prétendus gourous orientaux ont introduit ce mot dans le monde occidental avec leur cortège d'absurdités avec leurs systèmes: la forme tibétaine de méditation la forme zen de méditation la forme bouddhiste de méditation, la forme hindoue de méditation. N'est-ce pas? Vous suivez tout ceci? Bien? Et nous, qui sommes plutôt crédules, et voulons arriver quelque part parce que nous trouvons nos vies ennuyeuses nous disons alors: 'très bien, dites-moi comment méditer'. Et ils sont trop heureux de vous le dire pour un certain prix, ou sans prix. Alors, il s'agit d'éviter tout cela tous les systèmes - systèmes voulant dire s'exercer jour après jour, de sorte que votre esprit devient mécanique. Quand vous êtes engagé dans un système, votre esprit est déjà corrompu. Là encore, mettez cela en doute, en question, découvrez-en la vérité.
53:37 Il faut donc qu'il y ait liberté à l'égard de tout ceci. Dès lors, quand il y a liberté qu'est-ce qui se passe? Vous suivez tout ceci? Quand il y a liberté à l'égard de tout engagement de toute autorité, de toutes illusions, images, conclusions dans quel état se trouve votre esprit? Vous comprenez ce que je dis? Découvrez-le, Monsieur, ne me regardez pas! Découvrez-le! Il s'agit de votre vie quotidienne. Voyez-vous, nous avons si peur de n'être rien. Notre culture, notre éducation, tout nous dit: 'sois quelque chose' qu'il s'agisse du monde des affaires ou du monde religieux ou de celui du divertissement ou sur le terrain de football - 'sois quelque chose'. Et quand la conscience avec tout son contenu est vide... - si c'est possible - mettez cela en doute, c'est-à-dire vous-même mettez en doute votre vanité pourquoi vous êtes vaniteux, pourquoi vous êtes pris dans une croyance accroché à une quelconque expérience révolue, à des souvenirs du passé et quand l'esprit est libre, c'est-à-dire quand toute votre peine n'est plus là - vous comprenez - qu'y a-t-il alors? Vous suivez tout ceci? Oh, allons, Messieurs! Vous comprenez, Monsieur? Quand vous renoncez au tabac sans vous laisser aller à une autre forme de fumée quand vous cessez de fumer ou mettez fin à une certaine habitude agréable quand vous mettez fin à l'attachement, qu'y a-t-il alors? Vous comprenez ma question? Est-ce de cela que nous avons peur? Je vous suis attaché. Si j'y mets fin, que me reste-t-il? vous savez - mes aspirations, aspirations, aspirations si je mets un terme à tout cela, que se passe-t-il? Vous suivez tout ceci? Faites-le, je vous prie. Mettez fin à votre propre attachement, maintenant ne vous préoccupez pas de votre femme, de votre mari, de votre petite amie. Dites 'très bien, au moins pour l'instant je vais être délivré de l'attachement' que se passe-t-il alors, dans l'esprit? Il y a une certaine liberté, n'est-ce pas? Et un sentiment d'anéantissement [nothingness en anglais]. N'est-ce pas?
58:00 Aucune chose. 'No-thing-ness' signifie 'aucune chose'. Le mot 'thing' vient de je ne vais pas entrer dans tout cela - c'est la pensée... Vous comprenez? La chose [thing] est le mouvement de la pensée. La pensée est un processus matériel - nous avons déjà vu tout cela. Un processus matériel parce que la pensée est la réponse de la mémoire mémoire, c'est-à-dire expérience, savoir. Cette expérience, ce savoir, la mémoire est stockée dans les cellules cérébrales. C'est donc de la matière. C'est un processus matériel. Ne nous attardons pas sur la matière, pour l'instant. J'en ai discuté avec des scientifiques donc je ne l'aborderai pas pour le moment. Alors, quand il n'y a rien - vous comprenez? cela signifie que le mouvement de la pensée a pris fin. C'est-à dire, Monsieur, si vous pouvez le faire maintenant, assis sous cette tente sachant que vous êtes attaché à un gourou ou à quoi que ce soit - mettez-y fin. Ne dites pas 'eh bien, pourquoi devrais-je y mettre fin?' J'ai expliqué tout cela. Vous devriez y mettre fin car les conséquences de l'attachement sont la peur l'anxiété, la jalousie, la haine, les blessures psychologiques la construction d'un mur autour de soi, d'où l'isolement de soi etc., etc., etc. C'est un fait. Inutile d'en douter. Ne perdez pas de temps à cela. Cela n'en vaut pas la peine. C'est là. Et si vous y mettez fin cela veut dire que la pensée n'a d'autre mouvement que celui de mettre fin à elle-même.
1:00:40 Dès lors: la fin de la pensée est la fin du temps. N'est-ce pas? Car la pensée est un mouvement. Le temps est un mouvement d'ici à là, physiquement, n'est-ce pas? Il faut du temps pour se rendre d'ici à votre maison, ou à votre chalet à votre tente ou où que ce soit. Il faut du temps pour couvrir cette distance. Et la pensée est un mouvement. Tout mouvement peut être mesuré. N'est-ce pas? Allons Messieurs! N'est-ce pas? Alors, ce qui est mesurable ce qui peut être mesuré est la chose créée par la pensée et par le temps. Alors, regardez: se rendre d'ici à chez soi prend du temps peut-être deux heures, dix minutes, etc., ce qui peut être mesuré. N'est-ce pas? En distance, en kilomètres, en temps. Et la pensée aussi peut se mesurer. N'est-ce pas? L'avez-vous remarqué? Cela se mesure. N'est-ce pas? Dois-je l'expliquer? Oh, pour l'amour du ciel, allons Monsieur expliquez-le vous! Inutile que je l'explique! Vous paraissez tous si médusés!
1:02:36 Regardez Monsieur: vous pouvez mesurer la pensée quand vous dites 'je vais devenir'. N'est-ce pas? 'Je vais devenir' - c'est à dire je ne suis pas ce que je devrais être mais je vais le devenir. C'est une projection de la pensée. L'idéal, quel qu'il soit, est projeté par la pensée. Ainsi, parvenir à cela est le mouvement de la pensée allant de 'ce qui est' à 'ce qui devrait être'. La mesure, c'est cela. Maintenant, le mot 'méditation' signifie non seulement peser réfléchir, chercher profondément mais il signifie aussi 'mesurer', du Sanscrit vous comprenez ce que je dis? Mesurer. Et dans la méditation, la mesure doit cesser - vous comprenez? Oh, pour l'amour du ciel! Ce qui signifie: pas de mesure c'est-à-dire de comparaison vous comprenez? 'Je le faisais avant de venir chez vous' - votre gourou 'vous m'avez indiqué le système et je m'y exerce. Où en suis-je aujourd'hui, demain, après demain?' (rires) Vous suivez? Que tout cela est puéril!
1:04:33 Ainsi, la mesure signifie la comparaison se comparer intérieurement au passé ou au futur par un exemple. Donc pas de mesure, voyez-vous pas d'illusion, pas d'image et cessation absolue de la volonté. Vous voyez toute la rigueur qu'exige la méditation? Vous comprenez ce que je dis? Cela n'a rien de facile - vous prenez telle posture et vous évadez dans quelque ineptie. Ceci demande une attention considérable une profonde recherche en soi. Vous avez alors cet immense sentiment d'ordre ce qui signifie, pas le moindre conflit.
1:06:00 Alors, si vous en êtes là et j'espère que c'est le cas pour certains d'entre vous, il le faut nous pouvons alors nous pencher sur ce qu'est la méditation. Vous comprenez, Messieurs? Ainsi, lorsqu'il y a liberté, et donc absence de tout cela, il y a amour qui n'est ni plaisir, ni désir. Nous avons approfondi cela l'autre jour. Sans cet amour, sans cette compassion... - et la liberté s'accompagne de l'intelligence - sans cela, ne méditez pas. Autrement, vous jouez avec une chose dangereuse qui n'en vaut pas la peine. Vous comprenez tout ceci?
1:07:19 Je connaissais un homme... - ceci n'est pas une anecdote - je connaissais un homme... - j'étais plus jeune alors - il avait soixante-quinze ans une barbe blanche, de longs cheveux, c'était un véritable sannyasi. Je vais expliquer ce mot. Après avoir écouté quelques causeries il vint trouver l'orateur et dit: 'j'ai quitté ma maison il y a cinquante ans'. 'J'étais un juge' Un matin, je me rendis compte que je jugeais des gens des voleurs, des meurtriers, des criminels, des hommes d'affaires vous savez, tout cela'. Il s'éveilla donc un matin et se dit... 'Sur quoi est-ce que je fonde mes jugements? Ignorant ce qu'est la vérité, je ne puis émettre des jugements.' Il fit donc venir sa famille et dit: 'je prends ma retraite vous pouvez avoir tout mon argent et tout le reste. Je m'en vais tout seul, vers quelque région de la terre pour méditer et découvrir la vérité'. Au bout de vingt-cinq ans ou plus, il me dit: 'ma recherche m'a conduit à vous, et je me rends compte que je me suis auto-hypnotisé' - vous comprenez, Monsieur? Pour pouvoir dire, à soixante-quinze ans, qu'il s'est hypnotisé pendant cinquante ans - vous comprenez, il en faut de la force! Et nous en avons discuté.
1:09:26 Et je dis la même chose nous disons la même chose: n'ayez aucune forme de désir, de volonté d'idéaux, d'illusions ou d'images, etc. L'esprit doit être totalement libre. Alors vient l'amour impérissable, incorruptible. Car l'amour n'est pas l'attachement - vous comprenez? Vous pouvez alors commencer à méditer. Dès lors, la méditation est la forme la plus simple de l'observation. L'observation pure, inaltérée, c'est-à-dire l'esprit ne peut observer que quand il est totalement immobile. N'est-ce pas? (Bruit de train) Si vous écoutez ce bruit du train qui passe, dans un silence total ne pénètre pas cette qualité de silence. Je me demande si vous saisissez. Messieurs, vous n'avez rien fait de ces choses là ce ne sont donc que des mots, des théories.
1:11:24 Alors, pour pouvoir observer de façon si pure, l'esprit, le corps toute la structure sensible de l'organisme et la structure du psychisme doivent être totalement immobiles, pas sous contrôle: dès l'instant où l'on contrôle, il y a conflit. N'est-ce pas? Tout cela est tellement évident! Le conflit doit donc cesser. Ce qui signifie, par conséquent... - attention, c'est là une affirmation dangereuse, mais je vais la faire comprenez-en bien la nature: aucune maîtrise quelle qu'elle soit. Personnellement, s'il m'est permis de parler un instant de l'orateur celui-ci n'a jamais maîtrisé. Ne me regardez pas les yeux écarquillés. Vous pensez peut-être que je suis fou. Je le suis probablement. Mais, voyez-en l'importance: quand il y a maîtrise, il y a deux entités celle qui maîtrise contrôlant celle qu'elle a elle-même créée. Vous avez compris, Monsieur? Vous avez compris? C'est-à-dire, je maîtrise mon désir: maîtriser le désir signifie celui qui maîtrise la chose appelée désir et il y a donc une division entre celui qui maîtrise et l'objet contrôlé. N'est-ce pas? Donc, là où il y a division, il y a nécessairement conflit. Vous dites 'aujourd'hui, je n'étais plus maître de moi mais cela ira mieux demain' vous y veillerez. 'Je ferai preuve de volonté, je réprimerai, etc.'
1:13:53 Il s'agit donc de vivre sans aucun sentiment de conflit. D'où aucun sentiment de maîtrise. Voyez-en seulement la beauté, pour l'amour du ciel! Faites-le, Messieurs. L'esprit est alors absolument tranquille. Il y a diverses variétés de tranquillité. Quand le train est passé, il y a un certain silence. Il y a silence quand la pensée dit 'je dois être tranquille'. C'est une autre forme de silence. Il y a le silence entre deux bruits. Après tout, la musique est le silence entre deux notes. N'est-ce pas? Et il y a le silence de la forêt: dans la forêt, quand un animal dangereux se déplace un tigre, etc., la forêt entière est paralysée et silencieuse. Vous êtes vous jamais trouvés dans une telle forêt? Non, vous ne connaissez pas cela, vous autres. Je poursuivais une fois un tigre littéralement. Je ne vais pas m'étendre là-dessus, oubliez ce que j'ai dit! (Rires)
1:15:45 Ce silence là n'est donc pas engendré par la pensée. N'est-ce pas? C'est le silence absolu, non relatif. Et si l'esprit en est là y a-t-il alors quelque chose de sacré dans la vie? Je pose la question. Je ne parle pas du silence. Je demande ceci: y a-t-il dans notre vie quelque chose de sacré qui ne soit pas créé par la pensée, vous comprenez? La Bible et tout ce qu'elle comporte les images, les croix, l'encens, l'autel, l'hostie tout cela est assemblé par la pensée. J'espère qu'il n'y a pas de prêtres ici! Et est-ce sacré? Mettez cela en question, doutez-en, découvrez car l'homme a toujours essayé de trouver quelque chose d'au- delà du temps et de la pensée. Et en il s'y penchant, il se fait prendre - vous comprenez? Il y a trop de pièges et de tentations. On sort de chez soi, voulant découvrir la beauté de la vie ou le sens sacré de la vie, pour autant qu'existe un tel absolu un amour incorruptible, on s'enquiert. Et voilà que quelqu'un passe par là et dit... 'suivez ceci. Vous trouverez', et je m'y laisse prendre. Puis je me désillusionne, j'écris à ce sujet, je déchire l'image vous suivez? - et pars à la recherche d'autre chose.
1:18:27 Je vous demande donc ceci: y a-t-il quelque chose de sacré, de saint? - pas dans les temples, les églises: ces choses là ne sont pas sacrées tout cela est construit par la pensée, c'est évident. Et la pensée n'est pas sacrée. Grand dieu, si ce l'était, nous nous comporterions alors religieusement.
1:18:58 Nous demandons donc si, pour l'esprit libéré de tout ceci et possédant donc cette immense qualité de compassion qui va de pair avec l'intelligence, s'il existe quelque chose de sacré? Si l'orateur vous dit que cela existe, c'est que cela n'existe pas. Avez-vous compris ceci? Vous le voyez? Bien, je me réjouis qu'au moins certains d'entre-vous le voient. Quand l'orateur dit que cela existe alors ce mot lui-même l'essence même de ce grand amour de cette beauté et de cette vérité n'est pas. Donc, la méditation... - qui est le silence absolu de l'esprit, du cœur, et tout cela - étant totalement libre vous découvrirez par vous-même... - une telle liberté révélera à travers votre observation pure si ce qui est immortel ce qui est au-delà du temps et de l'espace existe. Vous trouverez. C'est là pour un esprit capable d'y venir. Terminé.