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SD74CA14 - Mort, vie et amour sont indivisibles
14e entretien avec le Dr. Allan W. Anderson
San Diego, USA
26 février 1974



0:38 Krishnamurti in Dialogue with Dr. Allan W. Anderson Dialogue entre Krishnamurti et le Dr. Allan W. Anderson.
0:43 J. Krishnamurti was born in South India and educated in England. For the past 40 years he has been speaking in the United States, Europe, India, Australia, and other parts of the world. From the outset of his life's work he repudiated all connections with organised religions and ideologies and said that his only concern was to set man absolutely unconditionally free. He is the author of many books, among them The Awakening of Intelligence, The Urgency of Change, Freedom From the Known, and The Flight of the Eagle. This is one of a series of dialogues between Krishnamurti and Dr. Allan W. Anderson, who is professor of religious studies at San Diego State University where he teaches Indian and Chinese scriptures and the oracular tradition. Dr. Anderson, a published poet, received his degree from Columbia University and the Union Theological Seminary. He has been honoured with the distinguished Teaching Award from the California State University. J. Krishnamurti naquit en Inde du sud et fut éduqué en Angleterre. Il donna pendant des décennies des conférences aux États-Unis, en Europe, en Inde, Australie et ailleurs dans le monde. Le travail qu'il effectua durant sa vie le conduisit à répudier toutes attaches avec les religions organisées et idéologies, son unique souci étant de libérer l'homme absolument et inconditionnellement. Il est l'auteur de nombreux ouvrages, dont l'Eveil de l'Intelligence, le Changement Créateur, Se Libérer du Connu et le Vol de l'Aigle. Voici un des dialogues ayant eu lieu entre Krishnamurti et le Dr. Anderson, professeur de théologie à l'Université de San Diego où il enseigne les Ecritures indiennes et chinoises et la tradition des oracles. Le Dr. Anderson, poète reconnu, est diplômé de l'Université de Columbia et du Séminaire Théologique de l'Union. L'Université de Californie l'a honoré en lui décernant le Prix de l'Enseignement.
1:49 A: Mr. Krishnamurti, in our last conversation we were beginning to talk about consciousness and its relation to death in the context of living as a total movement.

K: Yes.
A: M. Krishnamuti, lors de notre dernier entretien, nous commencions à parler de la conscience et ce qui la relie à la mort dans le contexte d'une vie formant un mouvement total.

K: Oui.
2:06 A: And we even touched on the word 'reincarnation' toward the end, when we had to draw our conversation to its conclusion. I do hope that we can begin to continue there. A: Et nous avions même effleuré le sujet de la 'réincarnation' au moment de conclure notre entretien. J'espère que nous pourons reprendre à cet endroit même.
2:21 K: You see, one of the factors in death is the mind is so frightened. We are so frightened of that very word and nobody talks about it. I mean it isn't a daily conversation. It is something to be avoided, something that is inevitable, for God's sake, keep it as far away as possible. K: Voyez-vous, l'un des facteurs de la mort est que l'esprit en a tellement peur. Nous avons tellement peur du mot lui-même que personne n'en parle. Ce n'est pas un sujet de conversation courante. C'est une chose à éviter, bien qu'elle soit inévitable. Eloignons-la le plus possible.
2:54 A: We even paint corpses to make them look as if they are not dead.

K: That's the most absurd thing. Now, what we are discussing, sir, is, isn't it, the understanding of death, its relation to living, and this thing called love. One cannot possibly understand the immensity - and it is immense, this thing called death - unless there is a real freedom from fear. That's why we talked sometime ago about the problem of fear. Unless the mind frees itself from fear, there is no possibility of understanding the extraordinary beauty, strength, and the vitality of death.
A: Nous maquillons même les cadavres comme s'ils n'étaient pas morts.

K: C'est absurde. Ce dont nous parlons maintenant - n'est-ce pas, M.? - c'est de la compréhension de la mort, de son lien à la vie, et à cette chose qu'on appelle l'amour. Il est impossible de comprendre l'immensité - et quelle immensité - de ce qu'on appelle la mort, s'il n'y a pas une réelle liberté à l'égard de la peur. C'est pour cela que nous avons déjà soulevé le problème de la peur. Si l'esprit ne se libère pas vraiment de la peur, il est impossible de comprendre la beauté, la force et la vitalité extraordinaires de la mort.
4:02 A: That's a very, very remarkable way to put it: the vitality of death. And yet, normally, we regard it as the total negation of life.

K: The negation of life. That's right. So, if we are enquiring into this question of death, fear must be completely non-existent in us. Then I can proceed. Then I can find out what death means. We have touched a little bit on reincarnation, the belief that is maintained throughout the East, which has no reality in daily life. It is like going to church every Sunday and being mischievous for the rest of the six days. So - you follow? - a person who is really serious, really attentive, goes into this question of death, he must understand what it means, the quality of it, not the ending of it. That's what we are going to a little bit discuss. The ancient Egyptians, the pharaohs, and all the first dynasty till the 18th, and so on, they prepared for death. They said, we will cross that river with all our goods, with all our chariots, with all our belongings, with all our property, and therefore their caves, their tombs were filled with all the things of their daily life - corn, you know all that. So, living was only a means to an ending, dying. That's one way of looking at it. The other is reincarnation, which is the Indian, Asiatic outlook. And there is this whole idea of resurrection, of the Christians. Reborn, carried by Gabriel Angel,etc., to heaven, and you will be rewarded. Now, what is the fact? These are all theories, suppositions, beliefs, and non-facts. I mean, supposed to be born, Jesus comes out of the grave, resurrected physically. That is just a belief. There were no cameras then, there were no ten people to say, yes, I saw it. It is only somebody imagined. We will go into that a little bit later. So, there is this living and preparing for death as the ancient Egyptians did. Then there is the reincarnation. Then there is resurrection. Now, if one isn't frightened - you follow, sir? - deeply, then what is death? What is it that dies, apart from the organism? The organism may continue, if you look after it very carefully, for eighty, or ninety, or one hundred years. If you have no disease, if you have no accidents, if there is a way of living sanely, healthily, perhaps you will last one hundred years or 110 years. And then what? You follow, sir? You will live one hundred years, for what? For this kind of life? Fighting, quarrelling, bickering, bitterness, anger, jealousy, futility, a meaningless existence. It is a meaningless existence as we are living now.
A: La vitalité de la mort, que voilà une belle expression ! Et pourtant, nous la considérons comme la négation même de la vie.

K: La négation de la vie. C'est exact. Donc, si nous voulons étudier la question de la mort, la peur doit être complètement inexistante en nous. Je puis alors avancer. Je puis alors découvrir ce que la mort signifie. Nous avons un peu effleuré la réincarnation, cette croyance toujours en vigueur en Orient, qui n'a aucune réalité dans la vie quotidienne. C'est comme aller à l'église tous les dimanches et mal se comporter les six autres jours de la semaine. Alors, si quelqu'un de vraiment sérieux, vraiment attentif, pénètre ce sujet de la mort, il doit en comprendre la signification, la qualité sans la repousser. C'est de cela que nous allons un peu parler. Les anciens Egyptiens, les pharaons et toutes les dynasties, de la 1ère à la 18ème, etc., se préparaient à la mort. Ils disaient : nous allons franchir ce fleuve avec tous nos biens, tous nos chariots, toutes nos possessions, avec tout notre patrimoine. De ce fait, leurs tombes étaient pleines de tous les objets de leur vie quotidienne - du grain, vous savez tout cela. Donc, pour eux, la vie n'était qu'un moyen en vue d'une fin, mourir. C'est là une des manières de le voir. L'autre est la réincarnation, le point de vue indien, asiatique. Il y a aussi cette idée de la résurrection, chez les chrétiens. Renaître, être transporté au ciel par l'ange Gabriel pour y être récompensé. Alors, où sont les faits? Ce sont là des théories, des suppositions, des croyances, et non des faits. Ainsi Jésus, dont on suppose l'existence, a quitté sa tombe, physiquement ressuscité. Ce n'est là qu'une croyance. En l'absence de caméras, de témoins pour dire : 'oui, je l'ai vu'. Un pur produit de l'imagination de quelqu'un. Nous développerons cela un peu plus tard. Il y a donc cette façon de vivre et de se préparer à mourir, comme le faisaient les anciens Egyptiens. Ou encore, la réincarnation. Ou encore, la résurrection. Maintenant, si l'on n'a pas peur - vous suivez? - profondément, qu'est-ce alors que la mort? Qu'est-ce qui meurt, mis à part l'oganisme? L'organisme peut continuer, si l'on en prend bien soin, vivre 80, 90 ou même 100 ans. Si l'on n'a pas de maladie, pas d'accident, si l'on vit sainement, peut-être vivra-t-on 100 ou 110 ans? Et alors? Vous suivez, M.? Vous allez vivre 100 ans, à quelle fin? Pour cette sorte de vie-ci? Luttes, querelles, chamailleries, amertume, colère, jalousie, futilité - une existence dénuée de sens. Car c'est bien ce que nous vivons aujourd'hui.
8:36 A: And in terms of our previous remarks, this is all the content of our consciousness.

K: Our consciousness. That's right. So, what is it that dies? And what is it one is frightened of? You follow? What is it, one is frightened of in death? Losing the known? Losing my wife? Losing my house? Losing all the things I have acquired? Losing this content of consciousness? You follow? So, can the content of consciousness be totally emptied? You follow, sir?
A: Et, comme nous l'avons déjà dit, tout ceci est le contenu de notre conscience.

K: C'est exact. Alors, qu'est-ce qui meurt? Et de quoi a-t-on peur? Vous suivez? Qu'est-ce qui fait peur dans la mort? Perdre le connu? Perdre ma femme? Perdre ma maison? Perdre tout ce que j'ai acquis? Perdre le contenu de la conscience? Vous suivez? Le contenu de la conscience peut-il être totalement vidé? Vous suivez, M.?
9:28 A: Yes, I do.

K: Which is the living. The dying is the living, when the content is totally emptied. That means no attachment. It isn't a brutal cutting off, but the understanding of attachment, the understanding of dependency, the understanding of acquisition, power, position, anxiety - all that. The emptying of that is the real death. And therefore the emptying of consciousness means the consciousness, which has created its own limitation by its content, comes to an end. I wonder if I have...

A: Yes, you have. I was following you very carefully, and it occurred to me that there is a radical relation between birth and death, that the two, when they are looked upon as moments in a total cycle, are not grasped at the depth level that you are beginning to speak about.
A: Oui.

K: Ce qui est vivre. Mourir, c'est vivre, quand le contenu est totalement vidé. Cela signifie aucun attachement. Ce n'est pas une coupure brutale, mais la compréhension de l'attachement, de la dépendance, de l'acquisition, du pouvoir, de la situation, de l'anxiété - tout cela. La vraie mort est le fait de vider tout cela. Par conséquent, le fait de vider la conscience signifie que cette conscience, qui a créé sa propre limite par son contenu, prend fin. Je me demande si j'ai...

A: Oui, oui. Je vous ai écouté très attentivement et il m'est venu à l'esprit qu'il existe un rapport radical entre la naissance et la mort : quand on considère les deux comme des moments distincts d'un cycle global, ils ne peuvent être saisis au niveau profond dont vous parlez.

A: Est-ce ainsi?
11:09 K: Yes, sir.

A: Am I correct?
K: Oui M., c'est exact.
11:10 K: Correct.

A: Good, please do go on.
A: Bien, poursuivez, je vous prie.
11:13 K: So, death becomes a living when the content of consciousness, which makes its own frontier, its own limitation, comes to an end. And this is not a theory, not a speculative intellectual grasp, but the actual perception of attachment. I am taking that as an example. Being attached to something - property, man, woman, the book I have written, or the knowledge I have acquired. The attachment. And the battle to be detached. Because attachment brings pain. Therefore I say to myself, I must be detached. And the battle begins. And the whole content of my consciousness is this - the battle which we described previously. Now, can that content be emptied - empty itself? Not emptied by an act of perception, you understand? - empty itself. Which means: can this whole content be observed with its unconscious content? You follow, sir?

A: Yes, I do. I'm thinking...
K: Ainsi, la mort devient partie de la vie quand le contenu de la conscience, lequel établit ses propres limites, prend fin. Et ceci n'est pas une théorie ni une appréhension spéculative, intellectuelle, mais la vraie perception de l'attachement. Prenons un exemple. Etre attaché à quelque chose - un bien, un homme, une femme, le livre que j'ai écrit, ou le savoir acquis. L'attachement. D'où la lutte pour se détacher, parce que l'attachement engendre la souffrance. Donc, je me dis : je dois être détaché. Et la lutte commence. Et tout le contenu de ma conscience est ainsi, la bataille décrite auparavant. Alors, ce contenu peut-il se vider de lui-même? Non pas être vidé par un acte de perception, mais se vider. Vous comprenez? Ce qui signifie : ce contenu tout entier peut-il être observé, y compris le contenu inconscient? Vous suivez, M.?

A: Oui. Je réfléchis.
13:00 K: I can be consciously aware of the content of my consciousness - my house, my property, my wife, my children, my job, the things I have acquired, the things I have learned. I can be consciously aware of all that. But also there is a deeper content in the very recesses of my mind, which is racial, collective, acquired, the things that unconsciously I have gathered, the influences, the pressures, the strains of living in a world that is corrupt. All that has seeped in, all that has gathered in there. K: Je peux être consciemment sensible au contenu de ma conscience : ma maison, mes biens, ma femme, mes enfants, mon travail, ce que j'ai acquis ou appris. Je puis être conscient de tout cela. Mais il existe aussi un contenu plus profond, situé dans les recoins de mon esprit, le contenu racial, collectif, acquis, les choses inconsciemment rassemblées, les influences, les pressions, les tensions dues au fait de vivre dans un monde corrompu. Tout cela s'y est infiltré, s'y est rassemblé.
13:50 A: Both personal and impersonal. A: Sur le plan personnel
13:52 K: Impersonal, yes, that's right. et impersonnel.

K: Oui, en effet.
13:54 A: This includes then what the depth psychologists are calling 'collective unconscious'.

K: I don't know what they call it.
A: Cela inclut alors ce que les psychologues appellent l'inconscient collectif.

K: J'ignore leur appellation.
14:00 A: As well as the personal consciousness. A: Ainsi que la conscience personnelle.
14:03 K: Collective as well as... So there is that. Now, can all that be exposed? Because this is very important. If the mind really wants to understand, grasp the full meaning of death, the vastness of it, the great quality of a mind that says, yes, that's empty! - you follow? It gives a tremendous vitality, energy. So, my question is: can the mind be aware totally of all the content, hidden as well as the open, the collective, the personal, the racial, the transitory? You follow? The whole of that. Now, we say it is possible through analysis. K: La conscience collective aussi. Dès lors, tout cela peut-il être exposé? Car c'est très important. Parce que si l'esprit veut vraiment comprendre et saisir toute la signification de la mort, son ampleur, l'immense qualité d'un esprit qui dit : 'oui, c'est vide', - vous suivez? - cela donne une vitalité, une énergie fantastique. Ma question est donc celle-ci : l'esprit peut-il être totalement conscient de tout le contenu, tant le caché que l'apparent, le collectif, le personnel, le racial, le transitoire? Vous suivez? Tout cet ensemble. Actuellement, on dit que c'est possible par l'analyse.
15:07 A: Yes, we do. A: En effet.
15:08 K: I said analysis is paralysis. Because every analysis must be perfect, complete. And you are frightened that it might not be complete. And if you have not completed it, you carry it over as a memory, which will then analyse the next incident. So each analysis brings its own incompleteness. K: J'ai dit qu'analyse égale paralysie. Car toute analyse doit être parfaite, complète. Et l'on a peur qu'elle ne le soit pas. Et faute de l'avoir achevée, elle se poursuit en tant que mémoire qui analysera l'incident suivant. Chaque analyse génère donc son propre inachèvement.
15:41 A: Oh, certainly, yes.

K: Therefore it is a total paralysis.
A: Oh oui, certainement.

K: D'où une paralysie totale.
15:48 A: In following what you are saying I'm very taken with what we usually regard as death, which has a very clear relationship to what you've said about the endless series of analytical acts.

K: Acts. Yes, sir.
A: En suivant ce que vous dites je suis frappé de ce que l'on a l'habitude de considérer comme étant la mort, qui se relie très clairement à votre position sur la série sans fin des actes analytiques.

K: Des actes. Oui, M.
16:07 A: We regard death as terminus in terms of a line. A: Nous voyons la mort comme étant la fin d'une ligne.
16:12 K: Quite, because we think laterally. K: Oui, car nous pensons latéralement.
16:15 A: We think laterally, exactly. But what you're saying is: on the contrary, we must regard this vertically.

K: Yes.
A: En effet, mais vous dites au contraire qu'il faut voir ceci verticalement.

K: Oui.
16:25 A: And in the regarding of it vertically we no longer see - please check me if I am off here - we no longer see death as simply a moment of termination to a certain trajectory of repetition. But there is a total qualitative change here, which is not the cessation of something that we have to regret as though we had lost something valuable. A: Et, par ce regard vertical, nous ne voyons plus - corrigez-moi si je me trompe - nous ne voyons plus la mort simplement comme la terminaison d'une certaine trajectoire répétitive. Il y a ici un changement qualitatif complet qui n'est pas la cessation de quelque chose à regretter, comme si nous avions perdu une chose de valeur.
17:08 K: Yes, I am leaving my wife and children.

A: Right.
K: Oui, je quitte femme et enfants.
17:11 K: And my property, my blasted bank account. Et mes biens, et mon fichu compte en banque.
17:18 A: Yes, yes.

K: You see, sir, if one can go very deeply into this: there is this content, which is my consciousness, acquired, inherited, imposed, influenced, propaganda, attachment, detachment, anxiety, fear, pleasure - all that, and also the hidden things. I'm asking myself, since analysis is really paralysis, - not an intellectual supposition but, actually, it is not a complete act, analysis can never produce a complete act. The very word 'analysis' means to break up, you know, the breaking up.
A: Oui.

K: Vous voyez, M., - si l'on peut vraiment approfondir ceci - ce contenu existe, qui est ma conscience, acquise, héritée, imposée, influencée par la propagande, l'attachement, le détachement, l'anxiété, la peur, le plaisir, et les choses cachées. Etant donné que l'analyse est une réelle paralysie, pas une supposition intellectuelle, mais un acte vraiment incomplet, l'analyse ne peut jamais produire un acte complet. Le mot 'analyse' lui-même signifie démonter.
18:11 A: To loosen up.

K: Loosen up, break it up. Therefore I reject that totally. I won't analyse, because I see the stupidity, the paralytic process of it. Then what am I to do? You are following? Because that's the tradition, introspective, or analysis by myself or by a professional, which is now the fashion, and so on, so on, so on. So if the mind sees the truth of it, and therefore analysis falls away, then what is the mind to do with the content? You...
A: Desserrer.

K: Desserrer, démonter. Je rejette donc totalement cette approche. Je n'analyserai pas car j'en vois la stupidité, le processus paralysant. Alors, que me reste-t-il à faire? Car c'est bien la tradition : l'introspection ou l'analyse par moi-même ou par un professionnel, ce qui est à la mode de nos jours, etc. Donc, si l'esprit en voit la vérité, l'analyse tombe d'elle-même. Alors, que doit faire l'esprit du contenu? Vous voyez?
19:04 A: Yes, I do see that. A: Oui, je vois cela.
19:07 K: We know what the content is. We don't have to eternally describe. Now, what is it to do? It has to be emptied. Otherwise it is mere continuity. K: Nous connaissons le contenu. Inutile d'éternellement décrire. Alors, que faut-il faire? Il faut le vider, sinon, ce n'est qu'une continuité.
19:21 A: No, there is no use analysing what is already there, because that will not change what is there in any way, shape or form. That seems to be very, very plain. Perhaps you would for a moment explain why we simply refuse to see that. We do believe that an analytical enquiry is ordered to a revelation. We do believe that.

K: No, sir. You can see it in a minute. Analysis implies the analyser and the analysed.

A: Yes.
A: Nul besoin d'analyser ce qui est déjà là, car cela n'en changera nullement l'aspect ou la forme. Cela paraît très simple. Peut-être pourriez-vous prendre un peu de temps pour expliquer pourquoi nous refusons simplement de voir cela. Nous croyons qu'une recherche analytique mène à la révélation.

K: Non, M. Cela peut se voir en un instant. L'analyse implique l'analyseur et l'analysé.

A: Oui.
20:06 K: The analyser is the analysed. K: Et l'analyseur est l'analysé.
20:12 A: Yes, we are back to the observer and the observed. A: Oui, nous revenons à l'observateur et l'observé.
20:15 K: Obviously! I am analysing my anger. Who is the analyser? Part of the fragment, which is anger. So, the analyser pretends to be different from the analysed. But when I see the truth that the analyser is the analysed, then a totally different action takes place. Then there is no conflict between the analyser and the analysed. There is instant action, a perception, which is the ending and going beyond the 'what is'. K: Evidemment ! J'analyse ma colère. Qui est l'analyseur? Une partie du fragment qui constitue la colère. L'analyseur prétend être distinct de l'analysé. Mais quand je vois la vérité que l'analyseur est l'analysé, un tout autre mode d'action a alors lieu. Il n'y a alors aucun conflit entre analyseur et analysé. Il y a action instantanée, perception, c'est-à-dire la fin et le dépassement de 'ce qui est'.
20:54 A: The reason I asked for the explanation was because of the concern raised earlier about knowledge. A: Ma demande d'explication est motivée par le souci évoqué plus tôt au sujet du savoir.
21:01 K: Yes. After all, the observer is knowledge. K: Après tout, l'observateur est le savoir.
21:06 A: Yes, I was concerned that study, in its proper form was not regarded - in the context of our discussion - as unprofitable as such.

K: No, no, of course not.
A: Oui, je me souciais de ce que l'étude proprement dite ne soit pas considérée comme étant inutile en tant que telle, dans le contexte de notre discussion.

K: Non, bien sûr.
21:24 A: We don't mean that.

K: We didn't even discuss it. That's so obvious.

A: Exactly. Yes, fine, do go. Well, yes, it is obvious in terms of our discussion, but the thing that concerns me is that so ingrained is the notion that... For instance, in the story I told you about, when I came to hear you years ago, I began doing analysis while I was listening to your words, and consequently I could hardly end up with anything qualitatively different from what I came in with. But you see, I didn't see that at the time. And in our videotaping our conversations here, this will be listened to, and when we say 'yes' about knowledge, this is obvious - in the context of our conversation it is. But then I'm thinking of...
A: Ce n'est pas ce que nous voulons dire.

K: D'évidence, nous n'en avons même pas discuté.

A: Cette évidence ressort des termes de notre discussion, mais ce qui me préoccupe, c'est que la chose soit si enracinée en nous que... Par exemple, comme je vous l'ai raconté il y a quelques années, en venant vous écouter, j'analysais tout en absorbant vos paroles, et je pouvais donc difficilement accéder à une chose d'une qualité autre que celle que j'avais déjà en moi. Cela m'échappait à l'époque. Mais les enregistrements de nos conversations ici seront écoutés, et quand nous acquiesçons à propos du savoir, c'est évident dans le contexte de notre conversation. Mais je pense alors à...
22:14 K: Not only in the context of our conversation, it is so.

A: It is as such.
K: Pas seulement dans le contexte de notre conversation, c'est ainsi.
22:18 K: Life is that.

A: Exactly, I couldn't agree, but immediately I flashed back to my own behaviour, and I know that I was not alone in that, because I listened to other conversations regarding it at the time. But, yes, I see what you mean now about analysis as such. It seems to me very clear.

K: Analysis implies, sir, the analyser and the analysed.
La vie est cela.

A: Oui, je ne pouvais acquiescer, mais je suis immédiatement revenu sur mon comportement habituel, et je sais que je n'étais pas seul à réagir ainsi, à en juger par ce que j'entendais alors autour de moi. Oui, je vois bien ce que vous entendez par l'analyse. C'est très clair.

K: L'analyse implique, M., l'analyseur et l'analysé.
22:44 A: Precisely.

K: The analyser is the analysed. And also analysis implies time, duration. I must take time to unearth, to uncover, and it will take me rest of my life.
A: Précisément.

K: L'analyseur est l'analysé. L'analyse implique aussi le temps, la durée. Il me faut du temps pour mettre à jour, pour découvrir, et cela me prendra le reste de ma vie.
23:00 A: This is a confusion we have about death too, death's relation to time. A: Nous faisons aussi une confusion au sujet de la mort par rapport au temps.
23:04 K: That's right. I'm coming to that. K: C'est exact. J'y viens.
23:06 A: Yes, of course, yes, please do, please. A: Oui, bien sûr, je vous en prie.
23:09 K: So, the mind, perceiving, discards analysis completely. Not because it's not profitable, not because it doesn't get me where I want, but I see the impossibility of emptying the consciousness of its content, if the mind approaches through that channel: analyser, time, and the utter futility - at the end of 40 years I am still analysing. K: Donc en percevant, l'esprit écarte complètement l'analyse. Non pas parce que c'est improductif, ou parce que cela ne mène nulle part, mais parce je vois l'impossibilité qu'il y a de vider la conscience de son contenu si l'esprit procède par ce moyen : l'analyseur, le temps et la futilité absolue du fait que, 40 ans plus tard, je continue à analyser.
23:50 A: And the content of my consciousness has not qualitatively changed at all.

K: Changed at all.
A: Et le contenu de ma conscience n'a pas du tout changé qualitativement.
23:54 A: No, it's becoming intensified in its corruption. Sa corruption s'est intensifiée.
23:58 K: That's right. That's right. But the mind must see its content, must be totally aware of it, not fragments of it. How is that to be done? You follow, sir?

A: Yes, I do.
K: C'est exact. L'esprit doit voir son contenu, il doit en être totalement conscient, pas de façon fragmentaire. Comment cela peut-il se faire? Vous suivez, M.?

A: Oui.
24:19 K: Because that's very important in relation to death. Because the content of my consciousness is consciousness. That consciousness is me, my ego, my saying, 'I and you, we and they', whether they the communists, they the Catholics, they the Protestants, or they the Hindus - they and we. So, it is very important to find out whether it is possible to empty consciousness of its content. Which means the dying to the me. You follow? K: Parce que c'est très important par rapport à la mort. Car le contenu de ma conscience est la conscience. Cette conscience est moi, mon ego, le fait que je dise 'vous et moi, eux et nous', que 'eux' soient le communiste ou le catholique, le protestant ou l'hindou - eux et nous. Il est donc très important de découvrir s'il est possible de vider la conscience de son contenu. Cela signifie mourir au moi. Vous suivez?
25:14 A: Yes, I do.

K: Because that is the me.
A: Oui.

K: Car le moi est cela.
25:19 A: This is where the terror starts. A: C'est là que commence la terreur.
25:21 K: That's where the terror starts. K: En effet, c'est là.
25:22 A: Precisely. There's the intuition that, if I die to the content of this consciousness, that I am wiped out. A: Il y a l'intuition que je meurs au contenu de la conscience, je suis liquidé.
25:29 K: Yes. I, who have worked, who have lived a righteous life - or unrighteous life - who have done so much, mischief or good, I have struggled to better myself, I've been so kind, so gentle, so angry, so bitter - you follow? - and when you say empty your consciousness, it means you are asking me to die to all that! So, you are touching at the very root of fear. K: Oui. Moi, qui ai travaillé, qui ai mené une vie juste ou injuste, qui ai tant accompli, en mal ou en bien, qui ai lutté pour m'améliorer, moi qui ai été si bon, si doux, si coléreux, si amer, - vous suivez? - quand vous me dites de vider ma conscience, vous me demandez en fait de mourir à tout cela ! Ainsi, vous touchez la racine même de la peur.
26:10 A: Yes, exactly.

K: At the root of terror of not being. Oh yes, that's it, sir. And I want to immortalise that me. I do it through books, writing a book, and say, famous book. Or I paint. Or through paint, through works, through good acts, through building this or that, I immortalise myself.
A: Oui.

K: La racine de la terreur de ne pas exister. Oh oui M., c'est bien cela. Et je veux immortaliser ce 'moi'. Je le fais par des livres, en écrivant un livre à succès. Ou bien, je peins. Ou encore, au moyen d'oeuvres, d'actes de bonté, en construisant ceci ou cela, je m'immortalise.
26:55 A: This has very pernicious effects within the family, because we must have a son in order to... A: Cela a des effets très pernicieux dans la famille, car il faut avoir un fils afin de...
27:03 K: ...carry on.

A: ...immortalise the name in time.
K: ...pérenniser.

A: ...d'immortaliser le nom.
27:06 K: Therefore the family becomes a danger.

A: Exactly.
K: Dès lors la famille devient un danger.

A: Exactement.
27:15 K: So, look what we have done, sir: the ancient Egyptians immortalised themselves, made their life immortal by thinking, carrying on. K: Alors, regardez ce que nous avons fait : les anciens Egyptiens se sont immortalisés, immortalisant leur vie en pensant la continuer.
27:27 A: Perpetuity.

K: Perpetuity. And the robbers come and tear it all to pieces. Tutankhamen is merely a mask now, a golden mask with a mummy, and so on. So, man has sought immortality through works, through every way to find that which is immortal, that is, beyond mortality. Right?
A: La perpétuer.

K: Oui, la perpétuer. Et les voleurs sont venus et ont tout démoli. Toutankhamon n'est plus qu'un masque, un masque en or sur une momie, etc. Ainsi, l'homme a cherché l'immortalité par les oeuvres, par toutes sortes de moyens pour trouver ce qui est immortel, c'est-à-dire au-delà de la mortalité. N'est-ce pas?
28:05 A: It's a very remarkable thing that the word 'immortal' is a negative.

K: Yes, not mortal.
A: Il est remarquable que le mot 'immortel' soit négatif.

K: Oui, non mortel.
28:10 A: Yes, it's not saying what it is. A: Cela évite d'expliciter la chose.
28:17 K: We are going to find out what it is.

A: Good.
K: Nous allons découvrir ce qu'il en est.

A: Bien.
28:21 K: You follow, sir? This is a very, very serious thing. It isn't a plaything between two people enjoying a discussion, It is tremendously important! K: C'est un sujet très sérieux, vous suivez? Ce n'est pas un jeu entre 2 personnes heureuses de discuter. C'est une chose terriblement importante.
28:31 A: Yes, I was laughing at the irony of it. That, inherent in the structure of that word, there is a warning, and we just go right through the red light. A: Oui, je riais à l'ironie de la chose. La structure interne de ce mot comporte un avertissement, et nous brûlons le feu rouge.
28:44 K: Right.

A: Yes, please do go on.
K: Exact.

A: Oui, poursuivez, svp.
28:47 K: So, what is immortality? Not the book.

A: Oh no.
K: Qu'est-ce alors que l'immortalité? Pas le livre.

A: Oh non.
28:55 K: Not the painting which I have done, not, going to the moon and putting some idiotic flag up there. Not, living a righteous life, - or not living a righteous life. So, what is immortality? The cathedrals are beautiful, marvellous cathedrals, in stone; an earthquake comes - gone. You carve out of marble a marvellous thing of Michelangelo, an earthquake, fire - destroyed. Some lunatic comes along with a hammer and breaks it up. So, it is in none of those. Right?

A: Right.
K: Ni le tableau que j'ai peint, ni le fait d'aller sur la lune et d'y planter quelque stupide drapeau. Ni celui de mener une vie vertueuse ou non. Qu'est-ce alors que l'immortalité? Les cathédrales de pierre sont merveilleusement belles; un tremblement de terre a lieu - terminé. Michelange sculpte merveilleusement le marbre, un séisme, un feu - tout est détruit. Ou quelque dément vient détruire cela à coups de marteau. L'immortalité n'est donc rien de tout cela. N'est-ce pas?

A: En effet.
29:47 K: Because that is capable of being destroyed. Every statue becomes a dead thing, every poem, every painting. So, then one asks, what is immortality? It's not in the building - just see it, sir - It's not in the cathedral. It's not in the Saviour, which you have invented, which thought has invented. Not in the gods that man has created out of his own image. Then what is immortality? Because that is related to consciousness and to death. Unless I find that out, death is a terror. K: Parce que cela peut être détruit. Toute statue, tout poème, toute peinture deviennent choses mortes. Alors, qu'est-ce que l'immortalité? Elle n'est pas dans la bâtisse voyez-le, M. Ni dans la cathédrale, ni dans le Sauveur que vous avez inventé, que la pensée a inventé. Ni chez les dieux que l'homme a créés à sa propre image. Qu'est-ce alors que l'immortalité? Car il y a un lien entre l'immortalité, la conscience et la mort. Faute de le découvrir, la mort est une terreur.
30:41 A: Of course, of course. A: Bien sûr.
30:45 K: I have tried to immortalise myself, become immortal by the thought that there is a Brahman, there is a God, there is eternality, there is a nameless one, and I will do everything to approach him. Therefore I'll lead a righteous life. Therefore I will pray, I will beg, I will obey. I will live a life of poverty, chastity, and so on, so on, so on, in order to have that immortal reality with me. But I know all that is born of thought. Right, sir?

A: Yes, as soon as...

K: Wait a minute, sir, see what happens. So I see thought and its products are the children of barren women.
K: J'ai essayé de m'immortaliser, de devenir immortel par la pensée qu'il existe un Brahman, Dieu, l'éternité, l'indicible, et je ferai tout pour m'en approcher. A cette fin, je mènerai une vie juste. Je prierai, je mendierai, j'obéirai. Je mènerai une vie de pauvreté, de chasteté, etc., etc., dans le but d'acquérir cette dimension immortelle. Mais je sais que tout cela est né de la pensée. N'est-ce pas?

A: Oui, dès que...

K: Un instant, M., observez ce qui a lieu. Je vois donc que la pensée et ses productions sont les enfants d'une femme stérile.
31:42 A: Precisely. A: Précisément.
31:45 K: See what's taken place. Then what is immortality? The beauty in the church - not I built the church - the beauty in the cathedral, the beauty in the poem, the beauty in the sculpture. The beauty, not the object of beauty. I wonder... K: Voyez ce qui a lieu. Qu'est-ce alors que l'immortalité? La beauté dans l'église - pas celui qui l'a construite - la beauté dans une cathédrale, dans un poème, la beauté dans une sculpture. La beauté, pas son objet.
32:16 A: The beauty itself.

K: Itself. That is immortal. And I cannot grasp that, the mind cannot grasp it, because beauty is not in the field of consciousness.
Je me demande si...

A: La beauté en soi.

K: En soi. Cela est immortel. Et je ne puis saisir cela, l'esprit ne peut le saisir car la beauté n'est pas dans le champ de la conscience.
32:39 A: You see, what you have said, again, stands it all on its head. We think when something dies that we have cherished, that is beautiful, that beauty dies, in some sense, with that which has passed away.

K: Passed away, yes.
A: Ce que vous venez d'énoncer renverse tout ce qui a été dit. Nous pensons que quand une belle chose que nous avons chérie, meurt, cette beauté meurt d'une certaine façon avec cette disparition.

K: Avec la disparition.
33:00 A: Actually it's the feeling of being bereft of that beauty that I regarded as my privilege to have personal access to. The belief that that has perished, not simply being lost, because what is lost is by its nature predisposed to be found. But to perish is to be wiped out utterly, isn't it? And so the belief is deep.

K: Oh, very, very.
A: Il s'agit en fait du sentiment d'être privé de cette beauté à laquelle j'avais un accès privilégié. La croyance que cela a péri et n'a pas simplement été perdu, car ce qui est perdu peut, par nature, être retrouvé. Mais périr, c'est être absolument annihilé, n'est-ce pas? Ainsi, la croyance est profonde.

K: Oui, très.
33:36 A: Extremely deep with respect to what we mean by perish. In fact, the word isn't used very often, it's frightening, it's a very frightening word. We always talk about losing things, hardly ever do we say something perishes. Now back to what I mentioned about standing it on its head. The image came to my mind as a metaphor - I hope not one of those images we've been talking about. That beauty, rather than being imprisoned and therefore taken down to the utter depths of nullity, when the thing perishes, has simply let it go. In some sense beauty has let this expression go. That is upside down from what is usually thought. A: Très profonde quant à ce que nous entendons par périr. Ce mot n'est pas souvent utilisé, il est très effrayant. On parle toujours de perdre une chose, on dit rarement qu'une chose périt. Revenons à cette notion que vous avez renversée. L'image m'est venue à l'esprit comme une métaphore. J'espère qu'il ne s'agit pas d'une de ces images dont nous avons parlé. Cette beauté, au lieu d'être emprisonnée et par conséquant réduite à strictement rien quand la chose périt, s'est simplement évaporée. En un sens, la beauté a laissé cette expression s'évaporer. C'est un renversement de la pensée habituelle.
34:33 K: I know, I know. K: Je sais.
34:35 A: And it has probably let it go precisely on time. A: Et elle l'a probablement laissée s'évaporer à l'heure exacte.
34:41 K: That's right.

A: That's what's so marvellous. Yes, yes.
K: C'est exact.

A: C'est ce qui est si merveilleux ! Oui.
34:45 K: So, immortality, we have said, is within the field of time. K: Donc l'immortalité, comme nous l'avons dit, se situe dans le domaine du temps.
34:55 A: In the one field. A: Dans ce seul domaine.
34:58 K: Right?

A: Yes.
K: Bien?

A: Oui.
34:59 K: The field of time.

A: Yes.
K: Le domaine du temps.
35:01 K: And death is also then in the field of time. Because I have created, through thought, the things of time. And death is the ending or the beginning of a state which is timeless. Of that I am frightened. So, I want everything preserved in the field of time. You follow, sir?

A: Yes, yes, we think it could...
Et la mort est alors aussi du domaine du temps. Parce que j'ai créé par la pensée les objets du temps. Et la mort est la fin ou le commencement d'un état hors du temps. C'est de cela que j'ai peur. Je veux donc que tout ce qui se situe dans le domaine du temps soit préservé. Vous suivez, M.?

A: Oui.
35:42 K: And that is what we call immortal - the statue, the poem, the church, the cathedral. And I see also all that is corruptible, destroyed by one accident, or by an earthquake - everything is gone. So, immortality is not within the field of time. And time is thought - of course. K: Et c'est cela que nous qualifions d'immortel - la statue, le poème, l'église, la cathédrale. Et je vois que tout cela aussi est corruptible, pouvant être détruit par un accident, ou un tremblement de terre - annihilé. Donc, l'immortalité ne se situe pas dans le domaine du temps. Le temps est pensée - bien sûr.
36:22 A: Of course, yes, that follows.

K: Of course. So, anything that thought creates must be within the field of time. And yet thought is trying to seek immortality, which is, immortality of itself - and the things it has created. You...

A: Yes.
A: Bien sûr, oui, cela va de soi.

K: Ainsi, tout ce que la pensée crée ne peut qu'appartenir au temps. Et pourtant la pensée recherche l'immortalité, c'est-à-dire sa propre immortalité et celle des objets qu'elle a créés.

A: Oui.
36:51 K: So, then the problem is, can the mind see all this, - see it! Not imagine that it is seeing it. K: Le problème est donc celui-ci : l'esprit peut-il voir tout cela? Le voir. Pas imaginer qu'il le voit.
37:07 A: No, actually see it.

K: Actually see it.
A: Non, le voir en fait.

K: Le voir en fait.
37:13 A: Yes, the remark I made before, when you began saying the field of time and I said the one field, I didn't mean that the field of time, as you've described it, is the one field, but that we could be so appallingly... A: Revenant sur ma remarque à propos de ce que vous disiez du temps en parlant du 'seul domaine', je ne voulais pas dire que le domaine du temps est le seul qui soit, mais que nous pouvons être tellement...
37:28 K: ...blind.

A: ...mistaken and blind...
K: ...aveugles.

A: ...et ignorants...
37:30 K: Ignorant. K: Ignorants.
37:31 A: ...that the field of time is another fragment and... A: ...que le domaine du temps n'est qu'un autre
37:36 K: That's right.

A: ...it's the only field. And what really struck me was: this misuse of thought generates the most appalling avarice.
fragment d'un seul domaine. Et ce qui m'a vraiment frappé, c'est que ce mauvais usage de la pensée génère la plus affreuse avarice.
37:51 K: Yes, sir. K: Oui, M.
37:57 A: I'm walling myself up in stone. Yes, please. A: Je me mure moi-même dans la pierre. Je vous en prie.
38:03 K: So, the mind, perceiving all this, if it is alert, if it has been watchful all the time that we have been discussing, must inevitably see the whole content exposed, without any effort. It's like reading a map. You spread it out and look. But if you want to go in a direction, then you don't look at the whole map. Then you say, I want to go from here to there, the direction is there, so many miles, and... you don't look at the rest. What we are asking is, no direction but just look. Look at the content of your consciousness, without direction, without choice. Be aware of it without any exertion of discernment. Be choicelessly aware of this extraordinary map. Then that choiceless awareness gives you that tremendous energy to go beyond it. But you need energy to go beyond it. K: Donc, percevant tout ceci, l'esprit, s'il est éveillé, s'il a été attentif pendant toute la durée de notre discussion, doit inévitablement voir exposé tout ce contenu, sans aucun effort. C'est comme lire une carte. Vous la déployez et regardez. Mais si vous choisissez une direction, vous ne regardez pas l'ensemble de la carte. Vous dites : je veux aller d'ici à là, dans telle direction, à telle distance, et vous faites abstraction du reste. Ce que nous disons, c'est : pas de direction, mais seulement regarder. Regarder le contenu de sa conscience sans direction, ni choix. En être conscient sans y appliquer quelque discernement que ce soit. Etre conscient sans choix de cette carte extraordinaire. Alors, cette attention sans choix vous donne cette énorme énergie qui permet d'aller au-delà. Mais il faut de l'énergie pour ce dépassement.
39:39 A: This leads me to the notion of reincarnation that we began to touch on a little earlier: I see the demonic root in that.

K: Yes, sir. You see, reincarnate next life. Nobody says, incarnate now.

A: Yes, exactly.
A: Cela me conduit à la notion de réincarnation que nous avons effleurée plus tôt : j'en vois la racine démoniaque.

K: Oui, M., se réincarner la prochaine vie. Personne ne dit : incarnez-vous maintenant.
40:04 K: You follow, sir?

A: Yes, I do, I do.
Vous suivez, M.?

A: Oui.
40:06 K: You can only incarnate now, when you die to the content. You can be reborn, regenerated totally, if you die to the content. K: On ne peut s'incarner qu'en mourant au contenu. On peut renaître, se régénérer totalement, si l'on meurt au contenu.
40:19 A: Yes. Yes. Yes. And there is a terrible truth on the dark side, the demonic side to this doctrine of reincarnation, because, if that content of consciousness is not emptied out, then it must prevail!

K: So what happens?
A: Oui, oui. Et la terrible vérité, le côté sombre, démoniaque de cette doctrine de la réincarnation est que si le contenu de la conscience n'est pas vidé, il ne peut que perdurer !

K: Que se passe-t-il alors?
40:45 A: Then it really does, yes!

K: It prevails. So what happens? I do not know, as a human being, how to empty this thing. I'm not even interested, I'm only frightened.
A: Il perdure vraiment !

K: Il perdure. Alors, que se passe-t-il? L'être humain que je suis ignore comment le vider. Cela ne m'intéresse même pas, j'ai seulement peur.
41:01 A: Only scared to death.

K: Scared to death. And I preserve something, and I die, am burned, or buried under ground. The content goes on. As we said, the content of me is your content also, it's not so very different.

A: No, no, no.
A: Je suis mort de peur.

K: En effet. Et je préserve quelque chose, et je meurs, je suis incinéré ou enterré. Le contenu se perpétue. Et nous avons dit que mon contenu est aussi votre contenu, il n'en diffère pas tellement.

A: Non.
41:27 K: Slightly modified, slightly exaggerated, given certain tendencies, which depend on your conditioning of environment, and so on, so on, but it is essentially same consciousness. Unless a human being empties that consciousness, that consciousness goes on like a river, collecting, accumulating - all that's going on. And out of that river comes the expression or the manifestation of the one that is lost. When the mediums, seances, all those say your brother, your uncle, your wife is here, what has happened is they have manifested themselves out of that stream which is the continuous consciousness of struggle, pain, unhappiness, misery - all that. And a man who has observed and has looked at the consciousness, and empties it, he doesn't belong to that stream at all. Then he is living each moment anew, because he is dying each moment. You understand, sir? K: Un peu modifié, un peu exagéré selon certaines tendances qui dépendent de votre conditionnement, de l'environnement, etc., mais il s'agit essentiellement de la même conscience. Si un être humain ne vide pas cette conscience, alors celle-ci se poursuit tel un fleuve, collectionnant, accumulant, tout cela continue. Et, de ce fleuve, sort l'expression ou la manifestation du disparu. Quand les médiums parlent, lors de séances, de la présence de votre frère, oncle ou femme, ce qui se passe, c'est qu'ils se sont manifestés à partir de ce flux continu de conscience fait de lutte, de douleur, de malheur, de détresse - tout cela. Mais celui qui a observé, regardé cette conscience et qui la vide, n'appartient plus du tout à ce flux. Il vit alors chaque instant à neuf, parce qu'il meurt à chaque instant. N'est-ce pas, M.?
43:02 A: Oh yes, I do, yes, I do. A: Oh oui.
43:04 K: There is no accumulation of the me which has to be expressed. He is dying every minute, living every minute, and dying every minute. And therefore in that there is - what shall I say? - there is no content. You follow, sir?

A: Yes.
K: Il n'y a pas d'accumulation du 'moi' qui doit s'exprimer. Il meurt à chaque instant, vit à chaque instant, et meurt à chaque instant. Par conséquent, il n'y a là - comment dire? - il n'y a aucun contenu. Vous suivez, M.?

A: Oui.
43:26 K: It is like a tremendous energy in action. K: C'est comme une formidable énergie en action.
43:30 A: This gives a totally different understanding of what we mean by the phrase 'in the afterlife'. On the one hand, there is this continuity in disordered content of consciousness...

K: It is totally disordered.
A: Ceci confère un sens totalement différent à ce que nous entendons par la phrase 'dans l'après-vie'. D'un côté, il y a cette continuité du contenu désordonné de la conscience...

K: ...totalement désordonné.
43:53 A: ...which is not radically affected qualitatively with respect to its nature, simply because somebody has stopped breathing for good. No. It's on its way.

K: On its way.
A: ...dont la nature n'est pas radicalement affectée qualitativement, simplement du fait que quelqu'un a cessé de respirer pour de bon. Il est en chemin.

K: En chemin.
44:07 A: And therefore the attempt that is often made on the part of persons to contact this stream of consciousness after the death of a person, when made within the same quality of consciousness, attains nothing but a reinforcement... A: Et, par conséquent, toute tentative que des personnes feraient pour contacter ce courant de conscience après la mort d'une personne, si elle est faite avec la même qualité de conscience, n'atteint rien d'autre qu'un renforcement...
44:34 K: Yes, that's right.

A: ...within their own personal life. And it does a terrible thing to their content of consciousness which has gone on, since it also feeds that some more.
K: Oui.

A: ...de leur vie personnelle. Et cela a des conséquences terribles sur le contenu de leur conscience qui a perduré, en l'alimentant davantage.
44:44 K: That's right. K: C'est exact.
44:46 A: Yes, I do see that. A: Oui, je vois cela.
44:48 K: A person came to see me, and his wife was dead. And he really thought he loved her. So he said, I must see my wife again. Can you help me? I said, which wife do you want to see? The one that cooked? The one that bore the children? The one that gave you sex? The one that quarrelled with you? The one that dominated you, frightened you? He said, I don't want to meet any of those. I want to meet the good of her. You follow, sir?

A: Yes, yes, yes, yes.
K: Quelqu'un dont la femme était morte est venu me voir. Il pensait vraiment l'aimer. Il dit : 'il faut que je la revoie. Pouvez-vous m'aider?' Je dis : 'quelle femme voulez-vous voir? Celle qui faisait la cuisine? Celle qui a porté les enfants? Celle qui vous a gâté sexuellement? Celle qui s'est disputée avec vous? Celle qui vous a dominé, qui vous a fait peur?' Il répondit : 'je ne veux revoir aucune de celles-là. Je veux revoir son bon côté. Vous suivez, M.?

A: Oui, oui.
45:37 K: The image of the good he has built out of her. None of the ugly things, or what he considered ugly things, but the idea of the good which he had culled out of her, and that is the image he wants to meet. I said, don't be infantile. You are so utterly immature. When you have slept with her, and got angry with her, all that you don't want, you want just the image which you have about her goodness. I said... And you know, sir, he began to cry, really cry for the first time. He said afterwards, I have cried when she died, but the tears were of self-pity, my loneliness, my sense of - you follow? - lack of things. Now I have cried because I see what I have done. You understand, sir? K: Il voulait la bonne image qu'il s'était faite d'elle. Aucune des mauvaises choses, ou ce qu'il voyait comme mauvaises, mais son idée du bien qu'il avait obtenu d'elle, et voilà l'image qu'il voulait revoir. Je lui dis : 'ne soyez pas puéril. Vous êtes tellement immature. Vous avez couché avec elle, vous êtes fâché avec elle, et cela, vous n'en voulez pas, mais ne voulez que l'image de sa bonté.' Et vous savez, il commença à pleurer, à vraiment pleurer pour la première fois. Il dit ensuite : 'j'ai pleuré quand elle est morte, mais ces larmes étaient dues à de l'apitoiement sur moi, à ma solitude, à ma sensation de perte. Maintenant je pleure parce que je vois ce que j'ai fait.' Vous comprenez, M.?
46:43 A: Yes, I do. A: Certainement.
46:50 K: So, to understand death there must be no fear. The fear exists and the terror of it exists only when the content is not understood. And the content is the 'me'. And the 'me' is the chair - you follow, sir? K: Il faut donc être affranchi de la peur pour comprendre la mort. La peur, la terreur de la chose n'existe que si le contenu de la conscience n'est pas compris. Et le contenu est le 'moi', et le 'moi' est la chaise, vous suivez, M.?
47:19 A: Oh yes.

K: The thing I am attached to. It is so stupid! And I am frightened of that, the bank account, the family - you follow?
A: Oh oui.

K: Ce à quoi je suis attaché. C'est tellement stupide ! J'ai peur de perdre cela, le compte en banque, la famille - vous suivez?
47:34 A: Oh yes, yes, I do. A: Oui, je comprends.
47:36 K: So unless one is really, deeply serious in this matter, you can't incarnate now in the deep sense of that word, and therefore immortality is in the book, in the statue, in the cathedral, in the things I have put together, the things I have put together by thought. That's all the field of time.

A: Right. It just occurred to me what a terrible thing we have been doing so often over and over again to Plato by this perennial attempt at academic analysis of the text, when he plainly said that the business of the philosopher, by which he didn't mean the analyser in this mad way that we have been observing it goes on, the business of the philosopher, namely the one who is concerned with a radical change and rebirth, which he associates with wisdom, the business of the philosopher is to practise dying, to practise dying.

K: Not practice.
K: Ainsi, si l'on n'est pas vraiment, profondément sérieux là-dessus, on ne peut s'incarner maintenant, au sens profond de ce terme, et l'immortalité se trouve donc dans le livre, dans la statue, la cathédrale, dans les choses que j'ai assemblées, que j'ai construites par la pensée. Tout cela est du domaine du temps.

A: Oui. Je viens de penser aux choses terribles que nous avons si souvent fait subir à Platon par cette éternelle tentative d'analyse académique de ses textes, alors qu'il disait clairement que le rôle du philosophe - qui n'est pas, à son sens, l'analyseur dont nous avons observé la démarche désordonnée - que le rôle du philosophe - qui est celui qui se soucie d'un changement radical et d'une renaissance qu'il associe à la sagesse - que le rôle du philosophe consiste à s'exercer à mourir.

K: Pas à s'y exercer.

A: Je ne pense pas
49:00 A: I don't think he meant routine, repetition: die, die, die, die, die. I think he puts it with an 'ing', because he doesn't want to fall out of act. I know I use this phrase all the time, but it came to me early in our conversations, and it seems to say, for me, what I want to say. I have to say I learned it from you, - though I don't want to put the words in your mouth. But it's possible to fall out of act into the terror and the demonic stream of time, but when one is in act, the whole thing is an ongoing move. qu'il parlait de la routine, de la répétition : mourir, mourir, mourir. Je pense que pour lui il s'agissait de ne pas sortir de l'action. Je sais que je me sers continuellement de cette terminologie que je considère comme très signifiante. Je dois avouer que je l'ai apprise de vous, mais je ne veux pas m'approprier vos paroles. Il est possible de quitter l'action pour tomber dans la terreur et le torrent démoniaque du temps, mais si l'on reste dans l'action, tout n'est qu'un mouvement continu.
49:50 K: So, sir, time has a stop.

A: Precisely.
K: Donc le temps cesse.

A: Précisément.
49:54 K: See the beauty of it, sir. And it is that beauty which is immortal, not the things which thought has created. K: Voyez-en la beauté, M. Et cette beauté-là est immortelle, par opposition aux créations de la pensée.
50:04 A: Right. A: En effet.
50:07 K: So, living is dying. K: Donc vivre, c'est mourir.
50:12 A: Right. A: En effet.
50:13 K: And love is essentially dying to the me. Not the things which thought has said: this is love, love-sex, love-pleasure. You follow? All that. K: Et l'amour consiste essentiellement à mourir au 'moi'. Rien à voir avec ce que la pensée a qualifié de ce nom : l'amour-sexe, l'amour-plaisir. Vous suivez?
50:31 A: Yes. A: Oui.
50:32 K: It is: the dying to time is love. So, living, love, and death are one thing, not divisive, not separated, not divorced, not in the field of time, but it is completely a living, moving thing, indivisible. And that is immortal.

A: Yes.
K: L'amour, c'est mourir au temps. Ainsi, vivre, aimer et mourir sont une seule et même chose, indivisible, inséparable, n'appartenant pas au domaine du temps. C'est une chose totalement vivante, mouvante, indivisible. Et cela est immortel.

A: Oui.
51:07 K: So, Now, most of us are educated wrongly. K: Ainsi, aujourd'hui nous sommes, pour la plupart, éduqués dans l'erreur.
51:16 A: How true that is! A: Comme c'est vrai !
51:19 K: From childhood we are never taught to be serious. From childhood we are taught the cultivation of thought, cultivation of thought and the expression and the marvels of thought. All our philosophies, books, everything is based on that. And when you say, die to all that, you really awaken the terror of not knowing. This, gives me security in knowing. K: On ne nous apprend jamais, dès l'enfance, à être sérieux. On nous enseigne dès l'enfance à cultiver la pensée, - la culture de la pensée - et à admirer son expression et ses merveilles. Toutes nos philosophies, tous nos livres reposent là-dessus. En préconisant de mourir à tout cela, on éveille véritablement la terreur de l'inconnu. Savoir me donne la sécurité.
52:10 A: Yes. A: Oui.
52:11 K: Then knowledge becomes the field of my safety. And you ask me, give all that up, die to all that. And I say you are insane. How can I die to that, that's part of me. K: Le savoir devient alors le domaine de ma sécurité. Et vous me dites : renoncez et mourez à tout cela. Je vous réponds : vous êtes fou, comment mourir à ce qui fait partie de moi?
52:31 A: There's a very, very beautiful Zen saying that seems to relate to this, when it's understood correctly. It speaks of jumping off the cliff with hands free. Jumping off the cliff with hands free. The hands... A: Il y a une très belle citation zen qui paraît correspondre à ceci quand elle est bien comprise. Elle parle de sauter de la falaise les mains libres. Sauter de la falaise les mains libres. Les mains...
52:53 K: ...that hold.

A: ...that hold, always grasping the past or reaching out towards the future, and we never get off that horizontal track. It's like a Lionel train, it forever goes on.
K: ...qui retiennent.

A: ...retiennent, se cramponnant toujours au passé, ou se tendant vers l'avenir, et nous ne quittons jamais cette piste horizontale. Comme un train miniature qui ne s'arrête jamais.
53:08 K: So, then it comes to the question: what is living in the present? Death is the future. And I've lived for 40 years, all the accumulated memories. What is the present? The present is the death of the content. You follow, sir?

A: Yes.
K: Alors se pose la question suivante : qu'est-ce que vivre dans le présent? La mort est le futur. J'ai vécu quarante ans et accumulé les souvenirs. Qu'est-ce que le présent? Le présent est la mort du contenu. Vous suivez, M.?

A: Oui.
53:37 K: I don't know, it has got immense beauty in that. Because that means no conflict - you follow, sir? - no tomorrow. If you tell a man who loves, who is going to enjoy that man or woman tomorrow, when you say there is no tomorrow, he says, what are you talking about? K: Il y a là une immense beauté, car cela signifie pas de conflit. - vous suivez, M.? - Pas de lendemain. Si vous dites cela à quelqu'un qui aime et se réjouit de revoir demain son ou sa partenaire, si vous lui dites : 'il n'y a pas de demain', il répond : 'de quoi parlez-vous?'
54:02 A: Yes, I know. Sometimes you will say, when you have said something, it sounds absurd. A: Oui, je sais. A vous entendre, on a parfois envie de dire que c'est absurde.
54:07 K: Of course. K: Bien sûr.
54:08 A: And, of course, in relation to the way we have been taught to do analysis, it sounds absurd. A: Et, bien sûr, par rapport à ce qu'on nous a appris de l'analyse, cela semble absurde.
54:14 K: Therefore, sir, can we educate children, students, to live totally differently? Live and understand, and act with this sense of understanding the content and the beauty of it all. K: Alors, peut-on enseigner aux enfants, aux étudiants, à vivre d'une toute autre façon? Vivre, comprendre et agir avec le sentiment de comprendre le contenu et la beauté de tout cela.
54:41 A: If I've understood you correctly, there's only one answer to that question: yes, yes. I think the word here wouldn't be 'absurd', it would be something like 'wild'. Yes, I see now what you mean about death and birth as non-temporally related, in terms of the question that we raised about their relation earlier, because when you say there is this incarnation... A: Si je vous ai bien compris, il n'y a qu'une réponse à cette question : oui. Le mot approprié ici ne serait pas 'absurde', mais, disons, 'insensé'. Je vois maintenant ce que vous entendez par le rapport non temporel qui existe entre la mort et la naissance. C'est un sujet qui fut évoqué plus tôt. Parce que si vous dites que cette incarnation...
55:21 K: ...now.

A: ...now, upon the instant...

K: Yes, sir.
K: ...maintenant.

A: ...dans l'instant.

K: Oui, M.
55:24 A: ...then... A: ...alors...
55:25 K: No, if you see the beauty of it, sir, the thing takes place.

A: Then it's happened.
K: Non, si vous en voyez la beauté, la chose a lieu.

A: Ensuite, elle a eu lieu.
55:31 K: It is not the result of mentation.

A: No.
K: Elle ne naît pas d'une conception mentale.
55:34 K: Not the result of immense thinking, thinking, thinking. It is actual perception of 'what is'. Elle ne résulte pas d'une vaste réflexion. Elle est la perception concrète de 'ce qui est'.
55:44 A: And the amazement that it is the same energy at root. A: Il est stupéfiant qu'elle prenne racine dans la même énergie.
55:50 K: Yes, sir. K: Oui, M.
55:51 A: It doesn't take something over here that's a different energy called God. A: Elle ne va pas à la recherche d'une autre énergie dénommée Dieu.
55:55 K: No, that's an outside agency brought in here. K: Non, ce serait recourir à un agent extérieur.
55:58 A: No.

K: It is the same wasted energy, dissipated energy, which is no longer dissipated.
C'est la même énergie auparavant gaspillée, qui ne l'est plus.
56:06 A: Exactly.

K: Therefore it is...
Elle est donc...
56:08 A: Exactly. This throws a totally... I'm beginning now to use the words 'absolutely' and 'totally', which in the Academy, you know, we're advised to be very careful of. A: Exactement. Ceci éclaire totalement... Je commence à me servir des mots 'absolument' et 'totalement' que l'Académie nous conseille d'utiliser avec prudence.
56:24 K: I know. K: Je sais.
56:27 A: But I'm sorry about all that. The fact remains that it is total. It is total.

K: Yes.
A: J'en suis désolé. Le fait est que c'est 'total'. C'est total.

K: Oui.
56:36 A: There is a total change. And the transformation of each individual is a total one. A: Il y a un changement total. Et la transformation de chaque individu est totale.
56:44 K: It is not within the field of time and knowledge. K: Elle n'est pas du domaine du temps et du savoir.
56:47 A: Is not within the field of time and knowledge. A: Elle ne s'y situe pas.
56:49 K: You see now the relation. K: Vous voyez maintenant ce qui les lie.
56:50 A: Yes, and then the profound seriousness of it that attends when one sees the rest of that sentence of yours: it is the responsibility of each. And if I may add just one other thing here, because it seems to me that it is coming together: that it isn't the responsibility of one over against the other to do something. It is to come with and to, as the other is coming to and with, and we begin together... A: Oui, et l'on en perçoit le profond sérieux qui agit quand on saisit le reste de votre phrase : 'il en va de la responsabilité de chacun'. Et j'aimerais ajouter une chose ici, car tout me semble prendre forme. Il ne s'agit pas d'une responsabilité de l'un à l'égard de l'autre dans l'action, mais que l'un et l'autre viennent tous deux à la chose, et que l'on commence ensemble...
57:30 K: Yes, sir. Share together.

A: ...to have a look.
K: Oui M., à partager.

A: ...à regarder.
57:33 K: Learn together.

A: Just quietly having a look. And in that activity, which is not planned, one of the amazing things about this conversation is that it - to use your beautiful word - flowers.
K: Apprendre ensemble.

A: Tranquillement regarder. Et, au sein de cette activité non planifiée - ce qui est stupéfiant dans cette conversation, selon vos propres termes - un épanouissement a lieu.
57:50 K: It flowers, yes.

A: It doesn't require an imposition without of a contrivance.
K: Un épanouissement, oui.

A: Qui n'a pas besoin d'imposition, ni d'obligation.
57:59 K: No. K: Non.
58:00 A: Of a management.

K: Management, quite.
A: Ni d'organisation.

K: Tout à fait.
58:03 A: Somehow it grows out of itself. It's this thing of growing out of itself that relates to this thing that you've been talking about in consciousness. By pointing to the head I don't mean consciousness is up here, no, but it's the 'out of itself', it's like that water that turns in on itself. A: La chose croît hors d'elle-même. Et c'est cette chose en croissance qui se relie à ce que vous avez dit de la conscience. En pointant ma tête du doigt, je n'entendais pas y situer le siège de la conscience, mais montrer qu'elle s'auto-génère, comme le cycle de l'eau.
58:27 K: But it remains water.

A: It remains water. Exactly. This has been a wonderful revelation, the whole thing about death, living and love. I do hope, when we have our next conversation, that we could begin to pursue this in relation to education even further.
K: Mais qui reste de l'eau.

A: Exactement. Quelle merveilleuse révélation au sujet de la mort, de la vie et de l'amour. J'espère qu'à l'occasion de notre prochaine conversation nous pourrons poursuivre ce sujet et le relier à l'éducation.
58:53 K: Further, yes, sir. K: Oui.